« Vivre en ville est-il bon pour la santé ? » La question n’est pas neutre. Elle invite même à mieux intégrer l’aspect santé dans lespolitiques urbaines.
« Vivre en ville est-il bon pour la santé ? » Patrick Deboosere, docteur en sciences sociales-démographe à la VUB, s’est posé la question. Ila présenté ses observations lors de l’École d’été « Penser la ville – Penser Bruxelles » organisée les 26-27-28 Août 2009par l’ULB1. Son étude repose en grande partie sur le recensement de 2001 – qui fut aussi la première enquête socio-économique nationale. À cetteoccasion, 9 millions de personnes ont répondu à la question « Comment jugez-vous votre état de santé ? » : un taux de réponserecord ! Sur la base des chiffres recueillis, on constate qu’en Flandre, on se sent en meilleure santé quel que soit l’âge (à partir de 6 ans) qu’en Wallonie. En revanche,jusqu’à l’âge de 39 ans, les Bruxellois se sentent en moins bonne santé que dans les deux autres régions. Ensuite, la tendance évolue de plus en plus favorablementpour Bruxelles, au point qu’il vaut mieux vieillir dans la Capitale qu’ailleurs.
Si l’on prend en compte des indices tel le taux de pauvreté – très élevé à Bruxelles – ou le niveau d’éducation, on constate que les personnespauvres et les gens moins qualifiés s’estiment en moins bonne santé. Dans le même temps, on se rend compte que les personnes moins qualifiées sous-estiment leur mauvaisesanté compte tenu de leur taux de mortalité. Les caractéristiques du logement ont aussi une influence : à Bruxelles, plus les conditions de logement sont mauvaises,plus les personnes se déclarent en mauvaise santé. Ainsi, à 51 ans, seuls 16 % des personnes habitant dans les meilleures conditions se considèrent en mauvaisesanté. Si on les compare avec des personnes du même âge habitant dans de mauvaises conditions, on s’aperçoit que plus d’une personne sur deux se sent en mauvaisesanté. Enfin, à travers l’indice de santé perçue, on retrouve le fameux « croissant pauvre bruxellois » qui fait l’objet de la plupart des politiquesurbaines bruxelloises (il s’agit des quartiers les plus pauvres, concentrés en croissant à la bordure du centre, du sud-ouest au nord-ouest de celui-ci). De manièregénérale, Patrick Deboosere constate que la ville n’est pas plus malsaine que la campagne des pays hautement industrialisés.
La santé sous influence
On notera que le travail de Patrick Deboosere a alimenté les travaux relatifs à l’Atlas des quartiers en difficulté, réalisé pour le compte de la Politiquefédérale des grandes villes ou encore le Monitoring bruxellois des quartiers, commandité par la Région de Bruxelles-Capitale. Il semble d’ailleurs que lasanté soit de plus en plus au centre des politiques urbaines. En janvier 2009, la Politique fédérale des grandes villes publiait « La Ville àl’épreuve de la Santé : recherche-action sur trois quartiers. Quelle approche pour intégrer la santé des habitants dans des projets urbains ? »La préoccupation ne date d’ailleurs pas d’hier. On se rappellera ainsi que la Région bruxelloise est membre, depuis 2003, du réseau « Ville en santé » del’Organisation mondiale de la santé (OMS) et qu’elle subventionne depuis 2009 l’asbl « Bruxelles, Ville en santé ». Ou encore des nombreux rapports pauvretéréalisés par l’Observatoire de la santé et du social de Bruxelles-Capitale… De son côté, la Région wallonne a même développé desRelais santé au sein de ses Relais sociaux urbains et fait de l’accès aux soins de santé un indicateur pour ses Plans de cohésion sociale.
La Santé semble vraisemblablement prête aujourd’hui à sortir du carcan des politiques sociales pour devenir une politique urbaine. L’accord régional bruxellois de 2009place d’ailleurs « la santé au cœur de la ville » avec pour priorités un égal accès à des soins de qualité et la promotiond’environnements de vie favorables à la santé des Bruxellois (logements, espaces verts, possibilité d’activités sportives, etc.).
Article mis à jour le 23 septembre 2010.
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