La validation des compétences, « du concept à la mise en œuvre », était au menu de la conférence d’ouverture de la 9e universitéd’été des formateurs d’adultes organisée par le Cunic1 le 16 août. Paul Simar, directeur général de Forem Formation mais aussi président duComité directeur du Consortium de validation des compétences, s’est pour la première fois exprimé publiquement sur la mise en place du système «wallo-bruxellois » de reconnaissance des qualifications et compétences acquises en dehors du système scolaire. Il a surtout remis en perspective ce processus par rapport àde nouvelles décisions européennes et aux nouvelles déclarations gouvernementales communautaire et régionale.
Principes et organisation
Pour rappel, le processus de validation repose essentiellement sur trois éléments : des référentiels de validation, des centres de validation agréés etdes titres de validation. En ce qui concerne les centres, Paul Simar précise qu’ils seront audités sur le plan qualité par un partenaire extérieur, Belcert, «selon la norme ISO EN45013 » (« ce qui met d’emblée le système à l’aune internationale »). Un tel centre, « interne aux quatre institutions duConsortium ou partenaire de l’une d’entre elles », devra notamment garantir « l’autonomie entre la sphère formation et la sphère validation » et doncla neutralité des examinateurs.
Le Forem, « Bruxelles-Formation », l’enseignement de promotion sociale et l’Ifapme sont les quatre institutions composant le consortium de validation. Ce dernier,basé à Bruxelles dans les locaux de « Bruxelles-Formation », est piloté par un comité directeur (avec à sa tête, donc, Paul Simar). Mais ilpossède aussi une « cellule exécutive », chargée de « l’opérationalisation et du secrétariat », dont le responsable est Alain Kock2.De plus, des commissions spécialisées seront chargées de réaliser les référentiels de validation. Quatre « commissions de référentielsexpérimentales » ont d’ores et déjà testé l’élaboration et la mise en œuvre d’outils pour « le tôlier en carrosserie», « le maçon », « la secrétaire “technicienne de bureau” » et « le mécanicien automobile ».
Par ailleurs, une commission consultative (réunissant les partenaires sociaux) nourrit l’action de ce consortium : c’est cette commission qui devrait bientôt choisir lespremières filières qui feront l’objet d’une validation. Le tout est piloté par les trois gouvernements : wallon, Communauté française et Cocof.
Contexte européen
Paul Simar a d’abord replacé le développement de la validation dans le cadre du processus Éducation et formation 2010 (la stratégie de Lisbonne – 2000) «qui a donné corps au concept de formation tout au long de la vie », la déclaration de Copenhague (2002) qui a initié le rapprochement des systèmesd’éducation et de formation professionnelles…). Ces textes européens visent, selon lui, « à établir des convergences entre deux types de système,l’enseignement et la formation professionnelle, afin d’acquérir des compétences tout au long de la vie ». Des groupes d’experts travaillent sur toute unesérie d’outils au service de cet objectif : le transfert d’unités de crédit, des principes communs de certifications, la réorganisation de tous lessystèmes d’éducation et de formation en huit niveaux, en ce compris l’enseignement supérieur « bolognisé », etc. Le 18 mai dernier, le Conseil desministres européens a adopté les conclusions de ces groupes d’experts sur « la transparence des qualifications » (l’Europass, voir dans ce numérol’article sur le processus de Lisbonne p. 8), le « renforcement de l’orientation tout au long de la vie » et « les principes européens communs pourl’identification et… la validation de l’éducation et de la formation non formelles et informelles ». Ceux-ci se regroupent en quatre points :
> « droits individuels » (caractère facultatif, égalité d’accès, respect de la vie privée…),
> « obligations des parties intervenantes » (garantie de qualité, conseils et infos sur les systèmes mis en place),
> « fiabilité et confiance » (méthodes équitables, transparentes…),
> « crédibilité et légitimité » (participation équilibrée des parties intervenantes, impartialité et compétence desévaluateurs…).
Les accords de gouvernement
Après avoir constaté que la formation professionnelle et enseignement étaient fortement liés en concordance avec les évolutions européennes, Paul Simar ainsisté sur le fait que la validation se trouve renforcée par ces accords, notamment par l’apparition d’un « diplôme du vécu » encore àdéfinir. Mais le principal impact de ces accords est entraîné par l’élargissement de la Commission communautaire des professions et des qualifications (visantuniquement jusqu’ici les référentiels scolaires) aux compétences régionales de formation : « les référentiels de validation serontrédigés par la CCPQ et non plus par le Consortium ». Mais comment la CCPQ opérera-t-elle ? La méthodologie adoptée jusqu’ici agglomère ou oublietoute une série d’éléments qui auraient avantage à être bien identifiés séparément : les référentiels des compétencesà maîtriser dans chaque grande activité qui structurent chaque emploi, mais aussi les répertoires de métiers, de certifications et de formations. En France, lesoutils de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes et de ceux de l’ANPE (le Répertoire opérationnel des métiers et des emplois, le ROME)ont ainsi été mis en concordance4. En multipliant des portes d’entrée (travail, formation, titres, etc.) mais en leur organisant un langage commun, on peut dès lorsautonomiser l’identification de compétences précises, croiser ces entrées et s’adapter rapidement aux évolutions du marché du travail en reconstruisantdes référentiels nouveaux sur la base de certaines compétences déjà définies.
Dans cette perspective, Paul Simar plaide pour s’appuyer sur le travail déjà effectué chez nos voisins français (et donc sur « leur force de frappeexpérimentée depuis 20 ans ») : sur le ROME directement ou sur le
COBRA (la traduction et l’adaptation flamande – VDAB et Orbem – du ROME). « Le COBRAaurait l’avantage supplémentaire de permettre l’accès plus facile au marché du travail flamand qui possède des emplois qui ne seront pas tout de suiteaccessibles à La Louvière ou Charleroi ; le ROME aurait l’avantage de nous préparer à une plus grande échelle à l’intégrationeuropéenne », explique Paul Simar : « Le politique devra choisir entre ces différents niveaux de “portabilité” des titres ».
Dans ce grand rapprochement entre la formation et l’enseignement, Paul Simar ne manque toutefois pas de souligner l’importance de garder leur spécificité auxdiplômes scolaires : une formation culturelle. « Le processus actuel, et notamment la modularisation et la certification partielle, apporterait en plus comme avantage auxélèves de l’enseignement de pouvoir, même en cas d’échec, reprendre des formations plus tard en s’appuyant sur des acquis scolaires. Aujourd’hui, unélève qui quitte l’enseignement après un décrochage en 6e ne peut pas capitaliser ce qu’il a déjà fait pour reprendre une formation sur cettebase », argumente-t-il.
1. Cunic, av. Général Michel, 1B à 6000 Charleroi – tél. : 071 65 48 30.
2. A. Kock était auparavant chargé de mission au CEF (où il a fortement fait avancer cette idée de validation) et a ensuite coordonné la Commission consultativeformation-emploi-enseignement de la Cocof. Tél. : 02 371 74 44 –
courriel : a.kock@bruxellesformation.be.
3. http://ue.eu.int/cms3_fo/showPage.ASP?lang=fr
4. Voir http://www.afpa.fr/ et http://www.anpe.fr/