Le Caire, 1940. Des Coptes originaires des régions pauvres de Haute-Égypte migrent vers la capitale. Cette communauté est victime de nombreuses discriminations. Au Caire, ils n’ont d’autre choix que de collecter les déchets pour subsister. Les Zabbalines sont nés. Au tournant des années 80, ces chiffonniers décident de développer leurs activités dans le recyclage, avec le soutien d’ONG pour financer les machines nécessaires au traitement des matière réutilisables. Ils récupèrent aussi les déchets organiques pour nourrir leurs cochons. Les excréments des animaux alimentent des usines de compost dans la périphérie. Le lisier est transformé en engrais et vendu aux agriculteurs locaux. Pas moins de 9 000 tonnes de déchets sont ainsi traitées chaque jour, peut-on lire dans un article paru dans Le Monde. En 2003, le président Moubarak préfère pourtant confier le recyclage à des multinationales. C’est un échec. La ville est de plus en plus sale. Aujourd’hui, Leila Iskandar, la nouvelle ministre égyptienne de l’Environnement veut faire sortir des familles de l’économie informelle pour prendre le relais du secteur privé, poursuit l’article.
L’innovation fait partie de ces termes qui ont fini par sentir le réchauffé à force d’être servis à toutes les sauces. Ou pire, par devenir pompeux! L’innovation, ce n’est pas faire du nouveau pour faire du nouveau, de l’original pour de l’original. Et c’est plus que de la simple inventivité. L’innovation est à l’image de ces chiffonniers cairotes. Elle peut naître d’un manque brutal ou d’une situation violente. Réponse collective à des besoins non couverts par la société, elle trouve ses ressources en dehors des circuits classiques. Et pousse à la prise de risque.
Pendant plusieurs années, les cahiers Labiso de l’Agence Alter ont mis en lumière des solutions innovantes dans le champ du travail social et de la santé : justice, santé mentale, logement, lutte contre la pauvreté, l’aide aux sans-abri… 151 cahiers plus tard, nous avons voulu donner plus de visibilité à ces initiatives. Le laboratoire des innovations sociales change de nom et devient Focales. En plus d’être décliné sur le web, Focales fait son apparition dans la version papier d’Alter Échos sous forme de supplément mensuel. Un carnet de douze pages détachables, pour se donner l’espace et le temps de se plonger dans ces projets et les enjeux sociaux auxquels ils tentent de répondre. Se donner le temps, aussi, de rencontrer les acteurs de terrain, ainsi que les bénéficiaires de ces initiatives, à qui la parole n’est pas si souvent donnée.