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Regard critique · Justice sociale

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"Laurette Onkelinx : "Ancrer nos projets dans l'agenda de l'Union""

24-01-2002 Alter Échos n° 113

Alter Échos – Comment prépare-t-on une présidence européenne ?
Laurette Onkelinx – La question est en fait de savoir quelles sont les conditions de réussite d’une présidence. Je les résumerais à trois : d’abord se doter d’un programmeavec nos accents propres, mais aussi bien inscrit dans les attentes des citoyens européens et dans l’actualité européenne ; ensuite anticiper, avec deux présidencesd’avance, en inscrivant nos préoccupations dans les dossiers et les ordres du jour qui émergent et en nouant un maximum de contacts ; et enfin travailler la main dans la main avec laCommission.
Pour ce qui est de notre programme, alors qu’au sein de la Commission on le trouvait explicitement trop ambitieux, nous avons pratiquement abouti sur l’ensemble des points. Nous nous sommes saisis dedifférents points de l’Agenda social et y avons amené nos accents propres. Même chose en termes de mainstreaming, où on avait placé la barre assez haut, sur les Gopeen particulier. Un aspect qui a joué aussi, c’est l’entente et la clarté au sein du gouvernement, où les dossiers emploi étaient parfaitement défendus par GuyVerhofstadt et Louis Michel dont les attributions sont naturellement déterminantes pour le bon déroulement d’une présidence. Le programme emploi était véritablementporté par l’ensemble du gouvernement.
AE – Et quels sont les dossiers que vous aviez pu attaquer pendant les présidences française et suédoise ?
LO – Nous avons travaillé sur des dossiers qui étaient prévus depuis Lisbonne, et qui se sont ouverts à Nice ou à Göteborg : les indicateurs de qualité,bien entendu, mais aussi le gender mainstreaming, la résolution sur l’E-Inclusion, la responsabilité sociale des entreprises. Plus spécialement, le dossier médiationsociale est typiquement un sujet d’initiative, mais il s’inscrit dans la suite directe des conclusions du sommet de Nice où avaient été relancées différentes pistespour la prévention et la résolution des conflits sociaux. L’Observatoire du changement est une autre de ces pistes.
Il y a aussi le travail sur la directive Renault, mais sur un tel dossier législatif, il s’est agi presque seulement d’un travail fin de renforcement d’alliances, de négociations. Lacoopération avec le Parlement européen, et en particulier avec Michel Rocard, président de la Commission des Affaires sociales, a été à cet égard unatout de première importance. Mais c’est un dossier, tout comme celui du dialogue social, qui montre bien l’importance d’accumuler un maximum de contacts informels avec les ministres del’Emploi, leurs administrations, leurs conseillers, etc. Et puis il y a des acteurs incontournables comme le Comité de l’emploi, où Michel Jadot, Secrétaire généraldu Ministère de l’Emploi, et l’un des représentants belges, a eu un rôle important. Je tiens aussi à souligner le rôle des partenaires sociaux européens: le baron Jacobs à l’Unice et Emilio Gabaglio, à la tête de la CES : notre dialogue constant avec eux a permis de déboucher sur une avancée réelle àLaeken. Une présidence, cela ne se fait pas dans le bureau de la présidente !
Pour ce qui est de la collaboration avec la Commission, le travail rapproché et suivi compte tout autant, aussi bien avec la Commissaire Anna Diamantopoulou qu’avec les différentsresponsables de sa Direction générale. Et il faut dire que ce travail en commun a été considérable et fructueux.
AE – Est-ce que la proximité géographique de la Commission, pour une présidence belge, c’est un facteur qui joue ?
LO – Peut-être que la proximité a pu jouer un rôle, mais ce qui est plus fondamental, c’est l’établissement d’une vraie collaboration. Et si on montre unevolonté de collaborer, et en plus de manière ambitieuse, alors on démultiplie notre impact.
Je dois d’ailleurs aussi dire toute l’importance d’un acteur qui reste fort dans l’ombre, mais par lequel tous les dossiers passent, c’est le Coreper, le Comité permanent des quinzereprésentants permanents des États membres, et son groupe des questions sociales.
AE – La présidence espagnole continue à travailler sur certains de vos dossiers : Avez-vous encore prise sur quelque chose ?
LO – Les dossiers sur lesquels on a obtenu des résultats, il est évidemment nécessaire de les approfondir et la Commission a un rôle tout à fait primordial en lamatière, en liaison avec les présidences du Conseil. Il y a des accords politiques à transformer en décisions ; comme sur les coopératives, sur l’amiante, lesvibrations. De la même façon que nous avons progressé à la suite de l’accord politique obtenu par la Suède sur la société européenne. Lesnouvelles Gope sont à préparer en tenant compte de nos innovations sur l’égalité hommes femmes. Le chantier de la qualité est approfondi par le Comité del’Emploi. Celui de la médiation par la Commission, avec l’Université de Madrid. Tout cela reviendra, sous la responsabilité de mes collègues espagnols puis danois, avecleurs accents particuliers, dans les débats des prochains Conseils Emploi et Affaires sociales, en particulier pour l’échéance importante du sommet de printemps àBarcelone
AE – À vous entendre, l’avant est plus facile à assurer que l’après…
LO – Une présidence, c’est à la fois bénéficier d’acquis, d’effets cliquets, et aussi arriver avec son autonomie, son agenda propre. Cela s’est passé de cettefaçon pour nous, et il en va de même pour les suivants.

Thomas Lemaigre

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