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Santé

L’avortement toujours menacé par le CD&V?

Une proposition de loi du parti néerlandophone entend inscrire les «enfants nés sans vie» en dessous de 180 jours de grossesse au registre des naissances. Ce qui pourrait menacer le recours à l’avortement. Le texte aurait pu être adopté en septembre. Cela n’a pas été le cas. Alter Échos vous explique pourquoi.

Une proposition de loi du parti néerlandophone entend inscrire les «enfants nés sans vie» en dessous de 180 jours de grossesse au registre des naissances. Ce qui pourrait menacer le recours à l’avortement. Le texte aurait pu être adopté en septembre. Cela n’a pas été le cas. Alter Échos vous explique pourquoi.

Article publié dans Alter Échos, n°433, 11 novembre 2016.

En juin, nous vous parlions d’une proposition de loi portée par le CD&V. Elle concerne les «enfants nés sans vie». Aujourd’hui, un enfant mort-né à partir de 180 jours de grossesse fait l’objet d’une déclaration d’enfant sans vie avec mention facultative des prénoms. Un acte de décès est ensuite délivré par la commune. Le texte mis sur la table par le CD&V maintient la limite de 180 jours mais propose une inscription spéciale au registre des naissances avec possibilité de donner un prénom et un nom. On ne parle donc plus d’acte de décès, mais d’acte de naissance. La proposition de loi donne aussi la possibilité aux parents de demander qu’une inscription au registre des naissances soit effectuée en dessous de 180 jours de grossesse. Selon les Régions, on pourra «descendre» très bas. Tout dépendra de la législation qui y est en cours en ce qui concerne l’inhumation ou l’incinération de l’embryon ou du fœtus issu d’une fausse couche. En Flandre, il n’existe pas de limite minimale. On peut donc enterrer ou incinérer un embryon de deux semaines. Selon le projet de loi du CD&V, celui-ci pourra donc être inscrit au registre des naissances. À Bruxelles et en Wallonie, la limite est fixée au 106e jour de grossesse. Une frontière qui devrait donc aussi s’appliquer pour l’inscription au registre des naissances.

 

«Notre proposition de loi vise certainement à contrecarrer les entraves à l’IVG», Véronique Caprasse (Défi)

 

Pour Sonja Becq, qui porte le texte pour le CD&V, l’objectif est de répondre à une demande de certains parents qui auraient besoin de ces mesures afin de faire leur deuil plus facilement. Mais pour ses opposants – dont le Centre d’action laïque (CAL) –, ce texte pourrait «sacraliser» l’embryon dès la conception. Et remettre en cause le recours à l’avortement.

Le MR mal pris

Avant l’été, on évoquait le mois de septembre pour le vote de la loi. Or rien n’a bougé depuis. L’agenda de la commission Justice du Parlement – où le texte est examiné – été chargé depuis la rentrée. Mais de l’aveu même de Sonja Becq, un accord semble compliqué à trouver au sein de la majorité «même si les partis flamands ont fait savoir par voie de presse qu’ils pourraient voter la loi». Si ce n’est pas eux qui bloquent, il ne reste donc plus que le MR. C’est peu dire que le parti libéral semble mal pris, lui qui se montre assez progressiste sur les questions liées à l’avortement. «Je partage certaines des difficultés qui sont évoquées par rapport au texte du CD&V, admet d’ailleurs Philippe Goffin, le président MR de la commission Justice. Le CD&V a donc été invité à retravailler son texte afin qu’il n’y ait pas de doute concernant les effets qu’il pourrait avoir sur l’accès à l’IVG. Nous attendons sa proposition.»

Un autre élément pourrait avoir une influence. Cinq partis de l’opposition – Écolo/Groen, DéFI, PS et sp.a – ont déposé récemment des textes proposant de sortir l’IVG du Code pénal. Pour rappel, la loi de 1990 dépénalisant partiellement l’IVG en Belgique n’autorise pas l’avortement mais suspend les poursuites légales si un certain nombre de conditions sont remplies. Aujourd’hui, l’IVG en Belgique fait donc toujours partie du Code pénal. L’en sortir pourrait garantir sa pérennité, malgré la proposition de loi du CD&V. C’est d’ailleurs le but avoué de certains partis. «Notre proposition de loi vise certainement à contrecarrer les entraves à l’IVG, dont la reconnaissance juridique des fœtus avec attribution de prénom et nom de famille fait partie», explique Véronique Caprasse (Défi). Si l’IVG devait être sortie du Code pénal, confesse le CAL, «on s’en foutrait alors un peu que la loi du CD&V passe».

De rumeurs évoquent d’ailleurs une sorte de marchandage au sein de la majorité: le vote de la loi du CD&V contre une sortie de l’IVG du Code pénal. Le MR serait en train de plancher sur une proposition de loi dépénalisant l’avortement. Ce que ne confirme pas Philippe Goffin. Qui ajoute tout de même: «J’y travaille»

 

A lire sur Alter Échos :

 

«L’avortement menacé par le CD&V?», Alter Échos n°424-425 du 21 juin 2016, Julien Winkel.

«L’IVG en danger?», dossier d’Alter Échos, N°377, 

 

capture-decran-2016-11-17-a-14-55-40Rencontre-débat  : Sortir l’avortement du code pénal

Après le colloque académique du 30 septembre à Bruxelles, le Centre d’Action Laïque et le Centre d’Action Laïque de la Province de Liège organisent une rencontre-débat avec les acteurs de terrain. Le mercredi 23 novembre, de 14h à 17h à la Cité Miroir,Place Xavier Neujean 22, 4000 Liège.

Julien Winkel

Julien Winkel

Journaliste

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