Alter Échosr
Regard critique · Justice sociale

Le come-back des « magasins du peuple »

La mouvance socialiste liégeoise réinvente les magasins du peuple. Ouverture du premier ce 10 décembre.

27-10-2009 Alter Échos n° 283

Les mots fleurent bon l’anachronisme, un retour aux valeurs d’antan, les échos d’une époque que l’on imagine, à tort ou à raison, plus solidaire, moins commerciale. Lamouvance socialiste liégeoise serait-elle tentée, crise oblige, par un refuge nostalgique, ou bien a-t-elle réinventé avec pertinence un concept commercial desannées trente ?

Liège, 1932 : 84 magasins coopératifs se répartissent sur les 115 communes de l’arrondissement. La crise de 1929 est passée par là, et la nécessitéde solutions alternatives permet au Parti ouvrier de créer ces commerces de proximité et de prix bas, en phase avec la désastreuse réalité économique etsociale du moment.

L’occasion est belle. Trois décennies de marges bénéficiaires donnent au parti la possibilité de s’installer durablement au cœur même des villes ; lesLiégeois voient ainsi, comme dans tant d’autres villes, se construire les « maisons du peuple » socialistes, lieux de rencontres, de militantisme et d’accèsà la culture.

Les « golden sixties » signeront la mort de ce genre de commerces. La grande distribution n’allait laisser aucune place au modèle coopératif, incapable desoutenir la concurrence. La clientèle déserta donc progressivement les « magasins du peuple », préférant les grandes surfaces et leur vaste choix deproduits, ses parkings gratuits et ses promotions alléchantes.

L’ « Union coopérative », propriétaire des lieux, fit faillite et la FGTB de Liège-Huy-Waremme1, soucieuse de préserver ceprécieux patrimoine immobilier, créa l’asbl « Les Travailleurs réunis ». Cette asbl reprit à son compte et transforma les « Maisons duPeuple » ; des cafés remplacèrent les magasins, et s’y installèrent des locaux du PS, de la FGTB et de la mutualité socialiste. À leur tour, cescafés furent de moins en moins fréquentés, et c’est dans une relative somnolence que ces lieux autrefois si populaires survécurent le plus souvent.

Liège, 2009, nouvelle crise mondiale…

De nouveau, l’accroissement rapide de la pauvreté, la difficulté d’accéder aux biens de consommation essentiels, les fins de mois difficiles…

Le concept de « maison du peuple » abritant café et salle de réunion ne demandait qu’à être repensé pour répondre aux défisd’un monde en crise.
La flambée de certains prix, par exemple, l’a rappelé brutalement : le nombre d’intermédiaires entre le producteur et le vendeur est devenu si grand que des produits depremière nécessité ne sont plus accessibles à tous. Il ne s’agit plus de pouvoir acheter un GSM, un téléviseur neuf ou un ordinateur portable, mais bien deremplir le frigidaire… Le modèle coopératif aurait-il donc, à nouveau, le vent en poupe ?

C’est ce pari que la FGTB Liège-Huy-Waremme et l’asbl « Les Travailleurs réunis », propriétaire de douze maisons du peuple dans la provinceliégeoise, ont lancé pour revitaliser et réinventer leurs « maisons du peuple ».

Les « magasins du peuple » revus et corrigés, installés dans une partie du bâtiment, se fourniront directement chez les producteurs locaux, permettantainsi des baisses de prix de près de 20 % sur des produits de base. Autre avantage, ces magasins ne sont pas créés pour dégager des bénéfices, etlà encore, la répercussion de cette philosophie commerciale sur les prix devrait être sensible ; seuls les frais de fonctionnement et le salaire équivalent à untemps plein et demi doivent être répercutés sur les prix.

La modernité offre aussi des possibilités nouvelles, et c’est un logiciel performant qui gérera les stocks de produits, limitant le gaspillage.

Ces magasins vendront fruits, légumes, fromages et viandes, et tous ces produits devraient être « locaux et frais ». De plus, certaines PME liégeoises ontdéjà marqué leur intérêt, et leur accord, pour commercialiser leurs produits sous le label « Magasin du peuple ». Enfin, le petit« plus » partisan, les affiliés du syndicat, de la mutualité socialiste ou du Parti socialiste, se verront accorder des ristournes et les membrescoopérateurs la possibilité de participer aux assemblées générales.

Le premier de ces magasins coopératifs sera inauguré à Blégny, le 10 décembre, jour des Droits de l’homme. Il devrait être suivi d’ouvertures àCheratte, Lixhe et Fléron.

1. FGTB Liège-Huy-Waremme, Centrale générale :
– adresse : place St. Paul, 13 à 4000 Liège
– tél. : 04 223 36 94
– courriel : marc.goblet@accg.be
– site : www.fgtb-liege.be

fredericl

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