Faible taux de scolarisation ou cantonnement dans des établissements spécialisés, le manque d’accès des enfants roms à l’éducation reste l’une des causesmajeures de leur exclusion de la société.
Pour sa deuxième édition sous l’égide de la présidence suédoise de l’UE, le 28 septembre à Bruxelles, la plate-forme européenne d’inclusion desRoms a concentré ses travaux sur une politique de base : l’éducation. Et plus précisément sur l’accès à « la vie scolairenormale ». Car, non scolarisés ou trop souvent envoyés, en Europe centrale, dans des « écoles spéciales » pour handicapés mentaux,avec une valeur éducative très limitée, les Roms n’ont quasi aucune chance de s’intégrer dans la société majoritaire.
L’accès à une éducation, un enseignement de haute qualité est la clé de l’intégration des Roms dans la société, « mais il estimportant d’avoir une approche holistique », a enchaîné le commissaire à l’Emploi, aux Affaires sociales et à l’Égalité des chances, VladimirSpidla. Cette intégration doit se faire sur le plan national mais aussi sur le plan local et régional, estime ce dernier. La Commission demande donc aux États membres« d’avoir une approche constructive qui soit élaborée avec les communautés roms et dans leur intérêt ». Et de rappeler avec insistance que laCommission « rejette clairement toute forme de populisme ».
Pour casser le cercle du chômage et de la pauvreté qui entraîne de mauvaises conditions de logement et des problèmes de santé, la Commission demande auxÉtats membres d’avoir une approche constructive qui soit élaborée avec les communautés roms et, dans leur intérêt, de promouvoir la culture rom comme partieintégrante de la mosaïque culturelle européenne.
Vivement préoccupé par les attaques, parfois mortelles, perpétrées par des groupes d’extrême droite contre les Roms en Hongrie ou en Républiquetchèque (son propre pays), Vladimir Spidla a reconnu que l’Europe est « encore loin du changement général ». La situation la plus compliquéeétant en Europe centrale, où les populations roms sont plus nombreuses.
« Le bilan est plutôt morne », a renchéri le commissaire européen à l’Éducation, le Slovaque Jan Figel, qui juge néanmoins que« certains pays ont fait des efforts » avec des mesures efficaces de soutien scolaire ou des bourses. Parmi les buts de la plate-forme qui réunit États membres,experts européens, ONG et représentants des Roms : échanger de bonnes pratiques. Référence concluante : l’Espagne, qui a lancé un programmed’accès à l’emploi financé par le Fonds social européen. En avril 2009, la plate-forme a aussi adopté 10 principes de base pour l’inclusion des Roms, prônantl’intégration plutôt que le développement d’un marché du travail spécifique.
De l’éducation spécialisée à la ghettoïsation
Pour Mihai Surdu, un expert du Fonds d’éducation des Roms, toutes les études montrent que les Roms passent en moyenne deux fois moins d’années dans leur systèmeéducatif national que leurs compatriotes. « Un très grand nombre d’entre eux n’ont jamais été inscrits dans l’enseignement, le taux de participationpréscolaire est extrêmement faible, la transition vers l’enseignement secondaire est très lente et parmi ceux-là beaucoup abandonnent l’écolesecondaire », note l’expert, dont le Fonds est le fruit d’un partenariat entre gouvernements, ONG et agences de développement en Europe centrale et de l’est et du sud-est.
Mihai Surdu dénonce aussi « le placement disproportionné » d’enfants roms dans des classes d’éducation spécialisées, notamment enSlovaquie, en République tchèque, en Hongrie, en Bulgarie, en Serbie et au Monténégro. En Slovaquie, pays particulièrement montré du doigt, 60 % desenfants placés dans des classes d’éducation spécialisées étaient des Roms l’an dernier. Quant à ceux qui accèdent au cursus scolaire classique,ils sont souvent placés dans des classes distinctes, de niveau moindre. Pour éviter ces écueils, l’organisation préconise une année d’inscription gratuite enpré-maternelle, ainsi que des politiques « soigneusement ciblées » de « discrimination positive » dans le secondaire.
L’UE se dit aussi déterminée à agir là où elle en a les compétences, notamment en s’assurant de l’application de la législation en vigueur, commela directive de 2000 sur l’égalité de traitement sans distinction de race ou d’origine ethnique. Si l’Europe n’a pas de pouvoir direct sur l’éducation, « nous avons lacapacité directe d’agir dans le cadre de l’anti-discrimination, et ce n’est pas peu », a plaidé Christer Hallerby. En réalité, l’UE n’a que peu de marge demanœuvre sur les politiques d’intégration. Elle fait donc pression sur les États membres. La Commission préconise toutefois une approche globale, car l’éducation nepeut être dissociée de l’accès au logement, au travail, et aux aides sociales.