À la mi-mai, la secrétaire d’État au Logement, Françoise Dupuis1, était interpellée au Parlement bruxellois. En cause: le non-avancement duPlan Logement. Le débat se poursuit aujourd’hui à coups de communiqués. Plusieurs partis et associations restent dubitatifs face à l’approche actuelle.
Le 12 mai dernier, Alain Daems (Écolo) interpellait au Parlement bruxellois la secrétaire d’État au logement sur « la mise en oeuvre du plan de construction de 5 000logements ». Et il n’était pas le seul… Presque tous les partis démocratiques (Écolo, MR, CDH, CD&V, VLD et SP.a-Spirit) ont demandé des comptes à laministre socialiste lors de cette séance. Pourtant, le débat a essentiellement opposé la ministre socialiste au député vert, au point que cela frisait le conflit depersonnes, quand ce n’était pas un conflit idéologique.
Les positions d’Écolo
Aussi, dans un communiqué daté du 29 mai, Écolo2 a-t-il décidé de rappeler ses positions défendues lors de cette séance : «À plusieurs reprises, la secrétaire d’État au Logement a été interpellée ici et là sur les causes des manquements constatés : lenteurs,bien sûr, mais aussi mauvaise qualité architecturale des projets, absence de garantie sur l’efficience énergétique des bâtiments, prix trèsélevés des entrepreneurs, manque de concertation avec les riverains et les communes et, enfin et surtout, risques de recours à répétition au Conseild’État, donc de paralysie prolongée voire d’échec total. » Les verts déplorent que la ministre ait cru bon « de pointer du doigt Écolo etses mandataires en matière de logement, nous accusant de ne pas soutenir le Plan du gouvernement ».
Pour Ecolo, il importe de « rendre confiance aux communes, CPAS et sociétés immobilières de service public (SISP), sollicités pour la mise à disposition deterrains », de prendre en compte l’intérêt de la participation des habitants et des acteurs sociaux pour améliorer les projets, d’inscrire la norme d’isolation thermique K45dans les cahiers de charge comme en Wallonie et en Flandre, d’obtenir un meilleur rapport qualité-prix, qui bénéficiera tant aux futurs locataires qu’aux SISP, et enfin de« constituer un véritable acteur immobilier public bruxellois, capable de construire, réhabiliter, rénover des logements sociaux au fur et à mesure des besoinsrecensés et des budgets disponibles » (idée lancée par Inter Environnement Bruxelles).
Chœur parlementaire
L’ensemble des autres partis démocratiques se demande également si la construction de 5 000 logements sur cinq ans est réaliste. Par ailleurs, Michel Colson (MR)réclame aussi plus de concertation avec les habitants pour favoriser la réalisation du Plan logement. Lors d’une conférence de presse, le 23 mai, le MR3 arappelé qu’en 17 ans, 8 493 nouveaux logements ont été produits, tous acteurs publics (SDRB, SISP, communes, etc.) et programmes confondus (construction, rénovation,contrats de quartier, rénovation urbaine, etc.), soit une moyenne de 500 logements par an. Pour le seul secteur du logement social, cela correspond à à la construction de 2 137logements neufs et la rénovation de 1.784 logements en… 17 ans.
Pour sa part, Bertin Mampaka Mankamba (CDH) demande où en est l’évaluation de la première phase du plan et quelles modifications ont été apportées aucahier des charges à la suite des problèmes observés lors de cette première phase. Brigitte De Pauw (CD&V) s’inquiète de la création des 1 500 logementsmoyens prévus au programme. Elle insiste sur la mixité sociale. Face à l’opposition de riverains concernant les logements sociaux, elle estime que « l’intérêtgénéral devrait primer sur la tyrannie et les capacités financières de quelques-uns ». Jean-Luc Vanraes (VLD) la rejoint sur ce point. Pour lui, « il va de soique les pouvoirs publics doivent tenir compte le plus possible de l’opinion, mais ils doivent aussi pouvoir trancher ».
Enfin, Marie-Paule Quix (SP.a-Spirit et ancienne vice-présidente du CA de la SLRB), insiste, elle aussi, sur la nécessaire performance énergétique des bâtiments,d’autant plus que « le prix de l’énergie va continuer à exploser dans les prochaines années (…). Des investissements supplémentaires en termes d’optimalisation desperformances énergétiques peuvent rapidement être amortis ». Elle insiste encore sur la qualité architecturale et urbanistique dans la construction des logementssociaux. « La qualité et la durabilité ne sont pas inabordables, contrairement à ce que de nombreux promoteurs immobiliers du privé tentent de nous faire croire.»
Réponse de la ministre
Dans un premier temps, la secrétaire d’État socialiste a vertement critiqué Écolo. Pour elle, il ne soutient pas le Plan logement. Elle répond que plusieursprojets ont déjà été approuvés, que la révision de certains projets a entraîné des retards, et aussi que la SLRB risque d’être rapidementdébordée.
Concernant les modifications au cahier des charges, il est prévu d’inclure une opération « entretien ». Elle est devenue une « option obligatoire détachable», explique la ministre. « En d’autres termes, si la proposition est utile, on la prend, et si elle dépasse les prix, on ne la prend pas. Mais on ne bloque plus tout le projet sousprétexte que cette partie-là ne fonctionne pas. »
Autres changements : l’introduction d’un plafond pour le montant des offres, l’assouplissement des conditions d’accès pour permettre à de plus petits entrepreneurs de faire despropositions, l’introduction d’éléments permettant d’évaluer la qualité énergétique, mais c’est la norme K55 qui reste d’application. Ces réponsesn’ont toutefois pas satisfait Écolo.
Les doutes de l’associatif
Début mai, le RBDH4 qualifiait de « plaisanterie » le « Plan pour l’avenir du logement ». Il livrait alors un jugement sans appel : « L’approcheactuelle démontre son amateurisme : projets rejetés, manque de dialogue et de concertation… À ce jour il n’y a donc eu aucun nouveau logement construit, aucune premièrepierre posée, aucune fondation coulée, aucun permis accordé. »
Dans le même esprit, Inter Environnement Bruxelles5 a aussi émis des critiques dans sa newsletter du 11 mai. Ces conclusions sont on ne peut plus critiques :
• « Il n’y a aucune stratégie et planification pour atteindre l’objectif annoncé ;
• l’abandon du partenaire privé est regrettable ;
• le « Plan » doit être mené de manière intégrée avec d’autres politiques volontaristes, dont l’aide à la personne. »
Et de conclure : « Accessoirement, ni la SLRB ni le cabinet ne peuvent donner de date de départ convenue pour marquer le début des cinq ans annoncés… »
Le Plan entre dans sa phase 2
Quoi qu’il en soit, le gouvernement bruxellois a adopté ce 1er juin les grandes lignes de la phase 2 du Plan logement. Conformément à ce qui avait étéannoncé au Parlement par la ministre, il est prévu de jouer sur la diversification des opérateurs publics pour mettre en œuvre ce plan.
«Aux côtés de la SLRB, la Société régionale d’investissement de Bruxelles (la SRIB) participera à la construction de logements publics »,mentionne un communiqué. Des contacts sont en cours avec la SDRB (Société de développement de la Région de Bruxelles-Capitale) tout comme des négociationsavec des propriétaires de terrains tels la Régie régionale, la Ville de Bruxelles, les SISP (Sociétés immobilières de service public) ou encore avec lasociété Bruxelles-Midi, devrait en aboutir à la construction de logements sur des terrains rue de Mérode. Signalons qu’il était déjà prévu deconstruire de l’habitat dans ce quartier pour remplacer les logements détruits en vue de l’implantation de bureaux. Environ 600 logements devraient être construits au cours de cettedeuxième phase.
1. Cabinet de Françoise Dupuis, bd du Régent 21-23 à 1000 Bruxelles – tél. : 02 506 3315 – fax : 02 506 33 20
2. Alain Daems, Groupe Ecolo, Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale à 1005 Bruxelles – tél. : 02 549 69 29 – fax : 02 549 65 27 – alain.daems@ecolo.be
3. Didier Gosuin, président du Groupe MR, Administration communale d’Auderghem, rue Idiers, 12-14 à 1160Bruxelles – tél./fax : 02 676 49 78
4. RBDH, rue du Grand Serment 2/1 à 1000 Bruxelles – tél. : 02 502 84 63 – fax : 02 503 49 05
5. Inter-Environnement Bruxelles, rue du Midi 165 à 1000 Bruxelles – tél. : 02 223 01 01 – fax : 02 223 12 96