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Regard critique · Justice sociale

Le secteur artistique suspendu aux lèvres du CNT ?

Le Conseil national du travail (CNT) a remis en juillet un avis qui pourrait redistribuer les cartes en ce qui concerne le statut d’artiste.

31-08-2012 Alter Échos n° 343

Le Conseil national du travail1 (CNT) a remis en juillet un avis qui pourrait redistribuer les cartes en ce qui concerne le statut d’artiste.

Dans la saga relative au statut d’artiste, l’avis n° 1.810 du CNT du 17 juillet risque bien de constituer une étape plus qu’importante. Outre une série de propositions qui font,déjà, parler d’elles (voir encadré), le document propose en effet d’étendre les mesures spécifiques d’accès et de maintien au chômage (les fameuxarticles 10 de l’AM du 26 novembre 1991 et 116 § 5 de l’AR du 25 novembre 1991. Voir Alter Echos n° 340 du 8 juin 2012 : « Statut d’artiste : le Conservatoire de Liège, victimecollatérale ? ») aux artistes créateurs.

Dans son avis, le CNT :

– propose d’introduire une carte d’« artiste », prouvant que les prestations fournies sont de nature artistique, lorsque l’artiste a recours au régime des petitesindemnités (RPI), un régime spécifique mis en place pour ce que le conseil appelle des artistes « amateurs » dont « les activités restentlimitées en pratique » ;

– propose de conditionner l’usage du (et donc l’accès au) « statut d’artiste » à l’obtention d’un « visa professionnel artiste » attestantdu caractère artistique et professionnel des prestations (lire à ce propos l’article dans ce même numéro d’Alter Echos : « (Carte) Visa pour l’artiste? ») ;

– estime que les techniciens du spectacle ne sont pas couverts par le statut d’artiste découlant du champ d’application de l’article 1er bis de la loi du 27 juin 1969 (introduit par laloi-programme du 24 décembre 2002) qui établit une présomption d’assujettissement des artistes de spectacle et des artistes créateurs au régime desécurité sociale de travailleurs salariés en l’absence de contrat de travail.

Une proposition, et une précision, qui pourrait venir détendre quelque peu l’atmosphère générée par une décision prise par l’Onem il y a un an,lorsque celui-ci décidait de « serrer la vis » concernant les règles relatives au chômage pour les artistes. Appliquées jusque-là demanière parfois « large », celles-ci se voyaient ramenées à une interprétation stricto sensu : l’article 10 est applicable aux artistes de spectacleet le 116 § 5 aux artistes et techniciens de spectacles. Avec, à la clé, un émoi certain dans le milieu artistique, de nombreuses personnes voyant leurs droits remis encause.

Un avis « contrasté et incomplet » ?

Du côté de Smart2, l’association professionnelle des métiers de la création, on ne s’y trompe d’ailleurs pas puisque l’asbl s’est félicité, dansun communiqué de presse, de cette recommandation. Un communiqué de presse qui qualifie cependant l’avis du CNT de « contrasté et incomplet ». C’est qued’autres propositions du CNT (voir encadré) font tiquer Smart. Selon l’asbl, outre le fait qu’elle regrette la proposition d’exclusion des techniciens du spectacle des mesures de protectiondes artistes, ces mesures (carte artiste et visa professionnel artiste) vont instaurer une distinction entre artistes « amateurs » et « professionnels »« qui ne se retrouve ni dans les pratiques artistiques actuelles ni dans la loi sur le statut de l’artiste ». « De plus, ces deux mesures que le CNT propose notammentdans son avis ne sont pas élaborées, il y a un manque de précision », regrette Eric Lauwers, directeur chez Smart.

C’est aux ministres, maintenant, de suivre (ou pas) les recommandations du CNT et de les faire appliquer par l’Onem. Sera-ce le cas ? Au cabinet de Monica de Coninck (Sp.a), la ministrefédérale de l’Emploi, on précise « qu’en général, on suit les avis du CNT. Nous allons essayer d’y coller le plus possible, mais il est impossibleà l’heure actuelle de dire jusqu’où ». Au niveau opérationnel, le cabinet distingue une période de moyen terme à la suite de laquelle les recommandationsdevraient être transposées dans le droit et une période de court terme pour laquelle un courrier à destination de l’Onem serait en préparation « afin devoir quels sont les volets auxquels on peut apporter une modification à court terme ».

1. CNT :
– adresse : av. de la Joyeuse Entrée, 17-21 à 1040 Bruxelles
– tél. : 02 233 88 11
– site : www.cnt-nar.be

2. Smart :
– adresse : rue Emile Féron, 70 à 1060 Bruxelles
– tél. : 02 542 10 80
– site : www.smartbe.be
– courriel : bruxelles@smartbe.be

Julien Winkel

Julien Winkel

Journaliste

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