La sexualité des personnes handicapées reste un tabou. Le député wallon Mathieu Daele (Ecolo) a déposé une proposition de résolution pour obligerles institutions d’accueil à aborder ce sujet qui fait tant rougir.
Les personnes handicapées ont droit à une vie affective et sexuelle comme tout le monde. Si le principe semble évident, dans les faits, c’est loin d’êtregagné. Les institutions d’accueil n’offrent pratiquement aucune intimité aux couples. Les opportunités de rencontre en dehors de celles-ci sont rares. Les personneshandicapées ne bénéficient pas toujours d’une information appropriée en matière de vie sexuelle et de contraception. « Il y a encore des personnesdéficientes mentales que l’on stérilise sans leur consentement parce qu’elles ne sont pas considérées comme responsables de leurs actes », s’insurge MathieuDaele, député au Parlement wallon et ancien assistant social.
Quelques progrès ont bien été enregistrés depuis la fin des années ’90. Des groupes de parole se mettent en place, les appartements supervisés semultiplient, des campagnes d’information sont montées, des colloques organisés, des études menées… Mais les tabous restent coriaces. « Les institutionsgardent des mentalités archaïques. À l’origine, beaucoup ont été créées par des parents de personnes handicapées. Pour eux, aborder la questionde la sexualité reste inenvisageable », note François Marien, fondateur de l’asbl Pas de bras, pas de chocolat1, qui mène des actions de sensibilisation surle sujet.
Le député écolo Mathieu Daele vient de déposer une proposition de résolution au Parlement wallon dans laquelle il appelle à une réflexion globalesur la sexualité des personnes handicapées. En Région bruxelloise, les institutions d’accueil ont l’obligation de traiter la question dans leur projet pédagogique.Il n’existe rien de tel au niveau wallon. « Les institutions peuvent prendre des initiatives selon leur bon vouloir. Ma volonté est de pouvoir imposer à ces institutionsd’aborder le sujet, sans pour autant orienter le sens que doit prendre cette réflexion », précise le député. Autre piste évoquée :créer un centre ayant pour mission de collecter, de traiter et de diffuser des données, outils et formations sur la prise en charge de la vie affective, relationnelle et sexuelle despersonnes handicapées.
Une proposition de résolution a également été déposée au niveau fédéral il y a quelques mois par le député socialiste FrancoSeminara, demandant à ce qu’une politique intégrée relative à la vie affective et sexuelle des personnes handicapées soit mise en place.
Le statut des assistants sexuels
La proposition de résolution de Mathieu Daele aborde aussi la délicate question du statut des assistants sexuels. Contrairement à l’Allemagne, à la Suisse, au Danemarket aux Pays-Bas où le métier d’assistant sexuel est reconnu, il n’existe en Belgique aucun cadre légal pour cette profession un peu particulière. Officiellement, iln’existe d’ailleurs aucun service d’accompagnement érotique pour les personnes handicapées. « On en arrive parfois à des situations extrêmes où ce sontles parents qui se retrouvent à jouer ce rôle », s’inquiète Mathieu Daele ! A défaut de services appropriés, certains font aussi appel à laprostitution. « Ce qui pose question, car les prostituées n’ont pas de formation ni de devoir d’éthique », poursuit le député.
En France, une proposition de loi visant à reconnaître le statut d’assistant sexuel a suscité l’ire des mouvements féministes. Partisans et opposants se sontaffrontés à coup de cartes blanches et de pétitions. A défaut d’avoir permis de trancher la question, le texte aura au moins eu le mérite de mettre pour un temps lesujet sur le devant de la scène médiatique française.
En Wallonie, depuis le début de la législature, on ne compte pas plus de deux ou trois questions parlementaires concernant la sexualité des personnes handicapées,observe Mathieu Daele. « Une des vertus détournées de cette résolution sera peut-être aussi que l’on parle un peu plus de ce sujet. »
A lire
• « Affectivité, sexualité et handicap », brochure publiée par l’Association socialiste de la personne handicapée (ASPH)2. Atélécharger sur www.asph.be ou à commander par téléphone : 02 515 02 65
• « Amour, sexualité, parentalité & handicap physique », in revue L’Observatoire n° 40, 2003. Site : www.revueobservatoire.be/parutions/40/dossier.htm
1. Pas de bras, pas de chocolat :
– tél. : 0478 47 82 36
– courriel : francois_marien@hotmail.com
– site : www.pasdebraspasdechocolat.be
2. ASPH :
– adresse : rue Saint-Jean, 32/38 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 515 02 65
– site : www.asph.be