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Economie

L’économie sociale bruxelloise passe à la circulaire

L’appel à projets « be circular », centré sur l’économie circulaire à Bruxelles, a retenu 41 projets. Parmi eux, quelques initiatives d’économie sociale. Alter Échos en détaille certaines.

CC_Maldoit

L’appel à projets «be circular», centré sur l’économie circulaire à Bruxelles, a retenu 41 projets. Parmi eux, quelques initiatives d’économie sociale. Alter Échos en détaille certaines.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que ça n’a pas traîné. En mars 2016, Didier Gosuin (Défi) – ministre bruxellois de l’Économie et de l’Emploi –, Céline Fremault (CDH) – ministre de l’Environnement et de l’Énergie – et Fadila Laanan (PS) – secrétaire d’État chargée de la Collecte et du traitement des déchets et de la Recherche scientifique – donnaient rendez-vous à la presse pour lancer le programme régional en économie circulaire. But de l’opération: donner un coup de fouet à cette économie de la récupération à Bruxelles. En faire une opportunité économique et environnementale, notamment en ancrant le tout à Bruxelles. Et, bien sûr, créer des emplois. Au total, ce sont 111 mesures qui étaient prévues. Parmi elles, on trouvait notamment la mise en place d’un appel à projets doté d’un million d’euros ciblé «sur l’économie circulaire spécifiquement pour les entreprises et portant sur les nouveaux modèles économiques circulaires ainsi que sur le réemploi et la réutilisation des matériaux».

Un appel à projet qui a d’ailleurs vu son budget gonfler puisqu’on est passé d’un million à 1,7 millions d’euros

Quelques mois plus tard, l’affaire est dans le sac. Le 13 décembre dernier, Didier Gosuin et Céline Fremault ont dévoilé le nom des 41 projets sur 85 ayant été retenus dans le cadre de l’appel à projets «be circular». Un appel à projets qui a d’ailleurs vu son budget gonfler puisqu’on est passé d’un million à 1,7 million d’euros. Son objectif est clair: «Accélérer la mise en œuvre concrète de différents modèles d’économie circulaire en Région bruxelloise.» Il s’agit donc de donner un coup de pouce à certains projets portés par des structures ayant une expérience du secteur… et un projet bien avancé en tête. Pour cela, les projets ont pu obtenir jusqu’à 80.000 euros, avec un bonus de 10.000 euros pour les initiatives d’économie sociale.

Financer la main-d’œuvre

Parmi les projets retenus, on retrouve d’ailleurs quelques initiatives d’économie sociale. La ferme Nos Pilifs – une entreprise de travail adapté – a ainsi déposé un projet de développement d’une filière de valorisation de bois de récupération, pour lequel la structure a obtenu un peu plus de 80.000 euros. «Nous consommons énormément de bois sous forme de palissades, de potagers suspendus, de terrasses, de niches, de poulaillers, cela représente des dizaines de milliers d’euros par an», explique Benoît Ceysens, directeur de Nos Pilifs. Tous ces objets sont soit vendus en magasin sur le site de l’ETA soit utilisé par les équipes de jardinage de la ferme travaillant chez les particuliers. Grâce au projet, Nos Pilifs entendent récupérer du bois auprès d’entreprises de construction. «Elles en utilisent beaucoup, notamment pour les coffrages, continue le directeur. Tout le monde sera gagnant. Elles ne devront plus payer pour se débarrasser du bois… et nous, nous le récupérerons.» Le financement obtenu sera dirigé vers les salaires. Trois travailleurs devraient voir leur temps de travail augmenter. Et la structure procédera à l’engagement d’un responsable d’atelier menuiserie. Tout devrait se mettre en branle à partir du mois de mars. «Le projet était déjà en gestation depuis un certain temps, détaille Benoît Ceysens. Le financement reçu dans le cadre de l’appel à projets nous a permis d’aller plus vite.»

«Il a fallu deux ans au magasin de Seraing pour être autosuffisant. Ce qui coûte, c’est l’aménagement et la pub», Geneviève Godart du Groupe terre

Autre projet où le financement devrait bénéficier à la main-d’œuvre: le développement des activités d’Ecotop – une entreprise d’insertion active dans la remanufacturation des cartouches d’imprimante – sur le territoire bruxellois. Active du côté de Fleurus, la structure compte déjà un atelier de triage dans la capitale. Mais elle n’y a pas encore vraiment développé de stratégie commerciale. L’appel à projets en sera l’occasion. 50.000 euros sont prévus pour permettre à Ecotop d’engager un commercial chargé de développer le marché bruxellois. «Il faudra démarcher les clients et les partenaires, explique Thierry François, directeur général d’Ecotop qui flaire déjà le bon coup. À Bruxelles le marché est énorme avec les administrations, les institutions européennes. En Belgique, entre 12 à 14% des cartouches sont recyclées alors qu’en Australie ou aux É.-U., on parle de 50%. La marge de progression est donc grande.»

Développer les projets

Outre la main-d’œuvre, plusieurs projets ont pu s’appuyer sur l’appel à projets pour d’autres objectifs. Le «Groupe Terre» entend ainsi créer un «Factory Shopping» à Bruxelles, comme il en existe déjà un à Waremme, Seraing ou Jemappes. Pour rappel, le Groupe Terre est notamment actif dans la récupération de vêtements. Des vêtements que la structure remet en vente au sein des «Boutiques Terre». «Les Factory Shoppings se distinguent des boutiques par le fait qu’ils se trouvent sur des zonings – alors que les boutiques ont tendance à se situer dans les noyaux urbains –, qu’ils offrent de grands parkings et de plus grandes surfaces commerciales», explique Geneviève Godart, du Groupe Terre. Les produits sont vendus à un prix unique par catégorie (pantalon, pulls, etc.). «Ce sont des vêtements qu’on a peu ou n’a pas du tout portés, datés de deux ans au maximum et qui ont été collectés par le biais de nos bulles», continue Geneviève Godart. Des accessoires et de la maroquinerie sont aussi disponibles. Le but de la structure est donc clairement de «venir concurrencer des enseignes comme Wibra, Zeeman ou Primark». Le financement prévu – 90.000 euros, ce qui signifie que le Groupe Terre a bénéficié du «bonus» économie sociale – servira à couvrir les frais de lancement. «Terre» est notamment à la recherche d’une surface commerciale de 500 mètres carrés. «Il a fallu deux ans au magasin de Seraing pour être autosuffisant. Ce qui coûte, c’est l’aménagement et la pub», souligne Geneviève Godart.

Enfin, notons que «be circular» a aussi permis de soutenir un projet centré sur la récupération de fruits et légumes invendus, mené par l’ETA «Travie». Cette structure est notamment active dans la transformation, l’assemblage et le conditionnement de produits frais. Dans ce contexte, le projet financé à hauteur de 80.000 euros permettra la collecte d’invendus auprès de gros distributeurs. «Ce sont des fruits et légumes qui n’auront pas été en rayon et qui sont seront restés dans les hangars des gros distributeurs», explique Nicolas Paullus, responsable commercial de Travie. Ils pourront être valorisés sous forme de soupes ou de jus pressés à froid. Le rôle de Travie consistera en la réception, le nettoyage, l’épluchage, la découpe et le conditionnement des produits. Le reste devrait être effectué par des prestataires de service. À moins que… «Nous pourrions aller jusqu’à presser les fruits…», souligne Nicolas Paullus. Ici, le financement permettra d’investir dans la phase test du projet. Et de se fournir en outillage industriel, «très cher». Le projet devrait prendre forme au deuxième semestre 2017.

«La permaculture appliquée aux organisations», Alter Échos n°427, août 2016, Rafal Naczyk.

Julien Winkel

Julien Winkel

Journaliste

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