Les missions assumées par les CPAS sont de plus en plus importantes. Leur image n’a pourtant jamais été aussi mauvaise et leurs moyens aussi réduits. C’est ce quedémontre la Fédération des CPAS de l’Union des villes et communes de Wallonie dans une étude en forme de plaidoyer.
Les CPAS seraient-ils encore plus défavorisés que le public dont ils s’occupent ? C’est en tout cas la question qui se pose à la lecture de la récente étudesur « le poids des CPAS ». Prenant la défense de cette institution trop souvent méprisée, Ricardo Cherenti, chercheur responsable de la cellule insertionsocioprofessionnelle de la Fédération1, a entrepris de mesurer ce qu’elle représente réellement sur le plan social, politique, médiatique etéconomique.
« L’image négative et passive que le public a des CPAS est largement renforcée par les médias », constate le chercheur, qui a épluché lesarticles parus dans les deux quotidiens francophones nationaux. D’après ses observations, les articles consacrés aux CPAS font rarement plus de quelques lignes et se concentrentessentiellement sur des informations comme l’ouverture d’un nouveau bâtiment ou un incident politique. « Les CPAS sont présents là où on les attend le plus, surle thème de la pauvreté. Beaucoup plus rarement pour parler de leur politique d’insertion. Les CPAS, remarque toutefois le chercheur, font peu d’effort de leur côté pourcommuniquer sur leurs actions. »
Quand les chiffres parlent plus que les mots :
– Les 262 CPAS wallons emploient 25 890 salariés. A titre de comparaison, le premier employeur privé wallon est GSK, avec 6 153 travailleurs.
– Entre 2002 et 2009, le nombre d’effectifs a diminué de 13 %. Un assistant social doit gérer 140 dossiers pour couvrir le coût de son salaire.
– Entre 2008 et 2010 le nombre de bénéficiaires du revenu d’intégration a augmenté de 18,6 %, ce qui représente 42 138 personnes. Pas moins de45 % du public est placé dans une forme active d’insertion.
– Les CPAS ne « coûtent » que 546 euros en moyenne par an à chaque wallon.
Toujours plus avec moins
Avec les communes, les CPAS sont à la fois les premiers employeurs et les premiers investisseurs en Wallonie, démontre l’étude. Les services qu’ils développent n’ontcessé de se diversifier pour englober un champ plus large : restaurants sociaux, logements d’insertion, initiatives culturelles, cellules énergie, espaces citoyens,activités pour le troisième âge, permanences juridiques, etc. La liste est loin d’être exhaustive mais les moyens ne suivent pas. Non seulement le nombre d’agents est enchute libre, mais leur statut est de plus en plus précaire. L’étude relève que le nombre de statutaires a diminué de 46 % entre 2002 et 2009. Un fameux paradoxe pourRiccardo Cherenti. « Il peut être étonnant de voir une institution aussi fondamentale et omniprésente que le CPAS être à la fois sous-estimée,décriée quelquefois, dévalorisée le plus souvent, traitée avec mépris trop régulièrement et, au même moment, de constater qu’on luidemande de prendre en charge un nombre exponentiel de matières aussi diverses que coûteuses tout en vantant l’excellent travail de proximité qu’elle fait », s’indignel’auteur de l’étude. Et d’ajouter dans la foulée : « une société qui sous-estime son secteur social est une société malade. »
Le chercheur s’est aussi intéressé au discours politique. Si les CPAS sont souvent mentionnés dans les programmes des partis, les déclarations gouvernementales desdifférents niveaux de pouvoir sont beaucoup plus discrètes à leur propos. « Il y a un double message de la part des politiques. On affirme que le rôle desCPAS est essentiel mais, quand il s’agit de faire des choix, ils sont complètement oubliés », interprète le chercheur.
Riccardo Cherenti dénonce au passage le phénomène de « localisation de la sécurité sociale ». Depuis quelques années, les CPAS sontconfrontés à une hausse non négligeable des demandes d’interventions financières provenant de personnes ayant subi une sanction de l’Onem. Le coût direct pour lesCPAS est estimé à plus de 36 millions d’euros pour l’année 2009. Sans parler du poids administratif que cela engendre. « C’est dans les communes les plus pauvres queles exclusions sont les plus nombreuses. C’est donc dans les communes avec peu de moyens que la paupérisation va s’accroître », dénonce le chercheur.
1. La Fédération des CPAS de l’Union des villes et communes de Wallonie :
– adresse : rue de l’Etoile, 14 à 5000 Namur
– tél. : 081 240 659
– site : www.uvcw.be