Nombreux sont ceux qui voudraient que l’éducation à la vie affective et sexuelle soit inscrite dans les programmes scolaires. D’autres préféreraient ne pas en entendreparler. Une circulaire incitative est à l’étude et un lobby se met en place.
Mi-novembre dernier se tenait à Schaerbeek un festival dédié à la création culturelle des jeunes. Parmi les travaux proposés au public, une sériede courtes vidéos centrées notamment sur la question de la relation entre les garçons et les filles. L’occasion de prendre conscience d’une quantité d’a priori qu’ont lesfilles par rapport aux garçons, et vice versa. Ces derniers s’imaginent leurs congénères féminines obnubilées par le maquillage, tandis que les demoiselles sedemandent pourquoi les mecs sont scotchés devant le sport ou ne pensent qu’à coucher !
« En travaillant en équipe mixte sur un projet de vidéo, les filles et les garçons ont très vite revu leurs idéespréconçues », explique Olivia Capeta, de la maison des jeunes ixelloise « XL’J ». Et celle-ci de souligner le manque d’espace pour un vrai dialogue entre garçons etfilles, un dialogue qui ne fasse pas l’impasse sur les relations affectives et sexuelles. Ce n’est qu’un témoignage parmi beaucoup d’autres qui attestent du besoin impérieux qu’ont lesjeunes de parler affectivité et sexualité. Et pourtant, on semble bien loin d’une politique éducative volontariste en la matière.
Vous avez dit Evas ?
De fait, le 29 septembre dernier, la Fédération laïque des centres de planning familial (FLCPF)1 organisait une soirée sur le thème del’intégration de l’éducation à la vie affective et sexuelle dans les programmes scolaires (Evas). L’objectif de la table ronde était de faire le point sur lalégislation avec les décideurs politiques concernés. En effet, aujourd’hui, les initiatives en faveur de l’éducation affective et sexuelle sont laissées à labonne volonté des établissements scolaires. Pour nombre d’acteurs du secteur, que ce soit les centres de planning familial, des associations féministes ou des intervenants dusecteur jeunesse, il faut généraliser les animations Evas dans les écoles, c’est-à-dire les rendre obligatoires.
Selon Nicolas Menschaert, directeur de la FLCPF, la soirée a montré une ouverture du politique sur la généralisation de l’Evas. Pourtant, lors d’une réunion deconcertation entre cabinets concernés et représentants du secteur (centres de planning familial et réseaux d’enseignement) qui a suivi de quelques semaines cette soirée,les positions se sont nettement radicalisées. « En particulier, souligne Menschaert, le cabinet de la ministre de l’Enseignement obligatoire Marie-Dominique Simonet (CDH) ne faisaitpas preuve d’une grande volonté d’avancer sur ce dossier. Et le Segec, représentant l’enseignement catholique belge francophone, s’est montré très frileux sur cepoint. »
Une circulaire incitative est en cours de rédaction. Incitative, celle-ci – par définition – ne rend donc pas obligatoire l’intégration aux programmes scolaires del’éducation à la vie affective et sexuelle. Elle ne semble pas non plus être accompagnée des moyens financiers nécessaires au déploiement del’éducation affective et sexuelle dans l’enseignement. Pour aboutir à un projet de loi satisfaisant en la matière, les centres de planning familial ainsi qu’un certain nombred’associations (féministes, d’aide à la jeunesse, etc.) sont en train de s’associer pour former une plate-forme de lobbying sur l’Evas.
Sur le fond, les positions se cristallisent donc autour des positions classiques, plutôt cathos d’un côté, plutôt sociales de l’autre. Le positionnement conservateur voitd’un mauvais œil une éducation à la vie affective et sexuelle qui donne une large place aux questions mécaniques, pragmatiques de la sexualité. Cette position veuts’attacher à l’éducation aux relations plutôt qu’à la sexualité. Et l’on ergote alors sur les termes : il y a les tenants de l’Evas – l’éducationà la vie affective et sexuelle – et les défenseurs de l’Evras, l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle.
A l’heure du sida et de la pornographie diffusée à tout-va sur Internet, il paraît en tout cas bien nécessaire de disposer d’un espace pour le dialogue sur l’affectif etle sexe dans le cursus scolaire. Tout particulièrement en ce qui concerne les ados, ces jeunes qui naissent à leur vie affective et sexuelle.
1. Fédération laïque des centres de planning familial (FLCPF) :
– adresse : rue de la Tulipe, 34 à 1050 Bruxelles
– tél. : 02 503 30 93
– site : www.planningfamilial.net