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Les recettes annuelles du Conseil supérieur de l’emploi

Le Conseil supérieur de l’emploi fêtera cette année ses dix ans d’existence (il a été institué le 22 décembre 1995). Un anniversaire qui ne l’a pasempêché de présenter son rapport annuel à la fin du mois de juin. C’est par la voix de son vice-président Jan Smets, directeur de la Banque nationale, que lesthématiques principales en ont été présentées à la presse. Le rapport 2005, long de près de 230 pages, aborde essentiellement trois thèmes :les développements récents du marché de l’emploi, la nouvelle stratégie européenne pour l’emploi, l’attrait financier du travail (make work pay)1.

02-08-2005 Alter Échos n° 191

Le Conseil supérieur de l’emploi fêtera cette année ses dix ans d’existence (il a été institué le 22 décembre 1995). Un anniversaire qui ne l’a pasempêché de présenter son rapport annuel à la fin du mois de juin. C’est par la voix de son vice-président Jan Smets, directeur de la Banque nationale, que lesthématiques principales en ont été présentées à la presse. Le rapport 2005, long de près de 230 pages, aborde essentiellement trois thèmes :les développements récents du marché de l’emploi, la nouvelle stratégie européenne pour l’emploi, l’attrait financier du travail (make work pay)1.

Les développements récents du marché de l’emploi

Peu de surprises sous cette rubrique : si les constats sont connus (taux d’emploi insuffisant : 60,4 % en 2004 contre 66,7 % dans les pays voisins ; fortes disparités régionales : 64% en Flandre contre, respectivement 55,5 et 55,4 % en Wallonie et à Bruxelles ; taux d’emploi record – vers le bas – pour les plus de 55 ans : 30,1 %), les remèdespréconisés le sont tout autant :
• Maîtrise des coûts salariaux et « dans la mesure du possible, un nouvel allégement de charges […] de préférence axé sur le travail moinsproductif ».
• Amélioration du fonctionnement du marché du travail « afin notamment de mieux faire correspondre l’offre et la demande de travail ». Pour ce faire, il conviendrait derenforcer la mobilité géographique et fonctionnelle. Au passage – et sans que le lien soit évident – le Conseil se réjouit des accords de coopération enmatière de politique d’activation des chômeurs.
• Renforcement de la participation au marché du travail, et en particulier, celle des groupes sous-représentés, à savoir « les personnes de plus de 55 ans, lesallochtones, les handicapés, les personnes peu qualifiées, les femmes et les jeunes » – une manière euphémisée de signifier qu’à part pour leshommes blancs d’âge moyen, diplômés et en bonne santé, la situation d’ensemble est largement insatisfaisante…

La nouvelle stratégie européenne pour l’emploi

S’il salue la nouvelle Stratégie de Lisbonne et la « coordination bienvenue » qui en découle, le Conseil ne fait guère plus qu’en rappeler les grandes lignes, sanspréconiser de mesures particulières et sans formuler de remarques précises. Tout au plus peut-on relever l’insistance sur la nécessité d’une véritablecohérence entre les programmes régionaux – cohérence qui, selon les auteurs, pourrait être facilitée par « l’adoption d’objectifs quantitatifs».

Rendre le travail plus attrayant

Le rapport se fait ici beaucoup plus fourni et bien plus détaillé. Il part notamment des dernières recommandations formulées par le Conseil européen àl’intention de la Belgique (octobre 2004) et visant à promouvoir le vieillissement actif, développer l’activation des chômeurs, des jeunes défavorisés et desimmigrés par les services publics de l’emploi, et à encourager la formation.

Par ailleurs, une attention particulière est accordée à la question des pièges à l’emploi tant du côté des travailleurs (piège àl’inactivité) que du côté des entreprises (piège à la productivité – lorsque les emplois ne sont pas assez productifs par rapport aux coûts qu’ilsengendrent pour les entreprises). Le rapport en propose une typologie assez détaillée, fondée sur un inventaire actualisé des pièges financiers établi par leCentrum voor Sociaal Beleid de l’Université d’Anvers. Plusieurs cas ont été sélectionnés et ce, pour huit ménages types (avec ou sans enfants, avec ou sansfrais de garde, bénéficiant d’un ou de deux revenus allant du salaire minimum national à deux fois ce revenu). Quatre transitions ont encore étéétudiées :
• du chômage vers un emploi à temps plein ou à temps partiel
• de l’inactivité vers un emploi à temps plein ou à temps partiel
• du revenu d’intégration vers un emploi à temps plein ou à temps partiel
• d’un emploi à temps partiel vers un emploi à temps plein.

La conclusion principale réside dans le constat d’absence de piège financier dans la plupart des cas de transition – si on accepte comme définition de piègefinancier « une situation dans laquelle un supplément de travail entraîne une perte financière ou un gain de revenu net inférieur à 15% ».

De plus, s’il subsiste bel et bien des pièges, leur nombre serait en régression, notamment du fait d’une série de mesures récentes. Et le Conseil de citer leremplacement des ALE par le régime des titres-services, le relèvement du minimum non imposable et l’instauration d’un crédit d’impôt pour les enfants à charge.

Si la situation est donc globalement positive, demeurent cependant une série de transitions problématiques dont les principales concernent la transition de l’inactivité versun emploi à temps partiel, la transition d’un revenu d’intégration vers un emploi à temps partiel, la transition du chômage vers le travail pour les couples à revenuunique dans le cadre du passage d’une allocation de chômage maximale au salaire minimum, etc.

Selon le rapport, ces pièges restants pourront sans aucun doute être combattus à l’avenir, mais les auteurs soulignent que « l’adoption de mesures dans ce sens risquetoutefois d’engendrer un coût budgétaire considérable, étant donné que la recherche d’une véritable sécurité sociale et d’incitants au travailsuffisants s’accompagne souvent d’une hausse des allocations sociales, d’une part, et d’une subvention salariale pour un grand nombre de travailleurs, d’autre part. » Selon le Conseil, lapériode de basse conjoncture que nous connaissons – et la préparation des finances publiques au vieillissement de la population – ne sont pas propices à la prise dece type de mesures. En conséquence de quoi, il préconise de « viser en priorité d’autres éléments qui influencent la décision de travailler » -en clair de poursuivre (de durcir ?) la politique d’activation.

1. Le rapport est consultable sur le site http://meta.fgov.be/pc/pcc/frcc08.htm

Edgar Szoc

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