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"Les travailleurs sociaux des prisons au bout du rouleau"

07-05-2001 Alter Échos n° 97

Depuis plusieurs mois, les travailleurs sociaux des administrations pénitentiaires manifestent un certain mécontentement et tirent la sonnette d’alarme à propos de leursconditions de travail. Les agents affectés au secteur psychosocial, c’est-à-dire les assistants sociaux, les psychologues et les psychiatres, soit quelque 200 personnes pourtoutes les prisons du Royaume, se disent dépassés par le volume des tâches supplémentaires auxquelles ils doivent faire face en raison de nouvelles dispositionslégislatives entrées récemment en vigueur, comme le port du bracelet électronique à l’extérieur de la prison. Ces missions nouvelles s’ajoutentaux interventions résultant des modifications intervenues en matière de libération conditionnelle. Dans le même temps, les travailleurs sociaux dépendant de ladirection générale de l’administration pénitentiaire doivent continuer à assurer l’encadrement des détenus auxquels sont accordés descongés en vue de préparer leur retour dans la société.
Ce 26 mars, les travailleurs sociaux des prisons ont donc manifesté pour la première fois devant les bureaux de MarcVerwilghen, leur ministre de tutelle, dénonçant leclimat social qui règne dans les prisons, le manque de personnel et le manque de moyens. « Aujourd’hui, c’est la cacophonie qui règne dans les services, dénonceBrigitte Bailly, assistante sociale à la prison de Lantin1. Nous n’en serions pas là si les nouvelles orientations législatives étaient prises en concertation avecceux qui sont appelés à les appliquer. Nous n’avons jamais été autant bombardés de circulaires, toutes pour la plupart difficilement applicables et peuréalistes. » Ainsi, il est demandé que pour les détenus sous le régime du bracelet électronique (300 d’ici fin 2001 en principe), soit trouvé undomicile avec une ligne téléphonique, « Une tâche qui nous demande une énergie considérable, explique Brigitte Bailly. Beaucoup de détenus se retrouvent eneffet dans des maisons d’accueil car ils ne peuvent pas payer de garantie ou de loyer sur le marché locatif traditionnel. »
De l’écoute au sécuritaire
Brigitte Bailly travaille dans le milieu carcéral depuis bientôt 20 ans, elle a vu l’évolution des tâches confiées aux services psycho-sociaux : « Lesassistantes sociales ont travaillé énormément dans le soutien et dans l’aide aux détenus. On arrivait finalement à les voir évoluer au sein del’établissement et au sein de leurs réflexions par rapport aux faits, par rapport à leur situation. À l’heure actuelle, on ne voit plus les détenus quepour préparer la libération conditionnelle. » Brigitte Bailly a en charge le traitement de 80 dossiers de détenus. C’est deux fois plus que le nombre recommandé parsa hiérarchie. Et c’est sans compter sur l’arrivée prochaine de la surveillance électronique des détenus. Problème d’encadrement, dit-elle, maispas seulement… « Je pense qu’il est important aussi de revoir finalement nos missions, de faire un travail de fond par rapport aux missions qui ont étédéveloppées depuis l’arrivée de Marc Verwilghen au ministère de la Justice. Nous avons réellement constaté un glissement de notre travail audépart tourné vers l’aide , l’écoute, la réinsertion vers du boulot administratif de tenue de statistiques et toujours plus de contrôle, desécuritaire. À l’administration pénitentiaire, on préfère savoir les détenus à l’intérieur qu’en congépénitentiaire. Les détenus ne sont plus prioritaires et c’est la panique quand l’un de ceux-ci va vraiment très mal. Il y a aussi une certaine démotivation dupersonnel par rapport à la surpopulation et aux contrats précaires. »
Du côté du cabinet Verwilgen, on a promis mi-avril que plus de 170 personnes seraient recrutées pour venir en renfort des services psycho-sociaux actuels. Les travailleurs sociauxles attendent avec impatience.
1 Prison de Lantin, rue des Aubépines 2 à 4450 Lantin, tél. : 04 239 65 60, services psycho-sociaux, contact : Brigitte Bailly.

catherinem

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