« Les citoyens de l’Union économiquement inactifs qui se rendent dans un autre État membre dans le seul but de bénéficier de l’aide sociale peuvent être exclus de certaines prestations sociales », a conclu la Cour de justice européenne après l’examen, ce mardi, du cas d’une Roumaine et de son fils, auxquels un centre d’assistance sociale allemande avait refusé des aides. D’après les magistrats, cette exclusion ne contredit pas le principe d’égalité de traitement, celui-ci étant conditionné à un droit de séjour. Or, pour pouvoir effectuer un séjour de plus de trois mois dans un autre pays européen, les personnes inactives doivent disposer de « ressources propres suffisantes », rappelle la Cour en se fondant sur la directive sur la libre circulation, datée de 2004.
Sauf que la Cour n’a pas statué de son propre chef. Elle a répondu à un État membre, l’Allemagne. « Dans le climat actuel, certains pensent que la Cour veut envoyer un message politique. Mais elle statue en droit », se défend Gilles Despeux, porte-parole de la CJUE.
Une agit-prop anti-immigrés ?
Cet arrêt intervient dans un contexte où des formations europhobes dénoncent l’immigration intra-européenne comme une explication à la crise économique. Avec, pour origine, une campagne engagée au début du printemps dernier outre-Rhin par l’Alternative pour l’Allemagne (AfD) (extrême droite) puis les chrétiens sociaux bavarois (CSU), dans la perspective des élections européennes. C’est à cette occasion, en effet, qu’est apparu l’étrange concept de « tourisme social », repris sans distance depuis mardi, après le verdict de la cour. Les accusations portant sur un abus du principe de libre circulation entre États membres de l’Union européenne, ainsi détourné en « tourisme social », ont notamment favorisé une poussée de partis comme le britannique Ukip, arrivé en tête aux élections européennes. En France, les réactions les plus enthousiastes venaient d’ailleurs, mardi, du Front national. La Cour, jubilait ainsi Louis Aliot, vice-président du FN, « valide un type bien précis de priorité nationale » et reconnaît la « charge déraisonnable du traitement social de l’immigration ». Au Royaume-Uni, le premier ministre, David Cameron, s’est réjoui d’une « décision (…) qui ne fait que souligner ce que nous disons depuis longtemps : la liberté de circulation n’est pas un droit absolu », commentait son secrétaire d’État au Travail, Iain Duncan Smith.
3000 permis de séjour retirés
En Belgique, sous la précédente législature, quelque 3.000 permis de séjour de ressortissants européens ont été supprimés au motif de « tourisme social », indique le cabinet de Bart Tommelein, secrétaire d’État (Open Vld) à la lutte contre la fraude sociale. Ces permis de séjours ont été supprimés sur la base « d’une non-activité en Belgique et de l’ouverture immédiate de droits sociaux indus pesant sur notre système social », peut-on lire dans le journal L’Echo.