L’accès à l’énergie fragilise les ménages précaires. Les mesures sociales ne suffisent pas. Les emplois générés par les titres-services sontloin d’être tous des emplois de qualité. Voici très résumées quelques grandes lignes du Rapport pauvreté 2007 dénonce. Les différentsgouvernements du pays sont désormais prévenus.
Ce 20 décembre, le Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale1, actif au sein du Centre pourl’égalité des chances et la lutte contre le racisme (CECLR), a remis officiellement son quatrième rapport bisannuel2 au président de la Conférenceinterministérielle de l’Intégration sociale. Celui-ci est responsable de sa transmission aux différents gouvernements du pays. Ces derniers sont tenus de débattre durapport, ainsi que des avis rendus par leurs instances consultatives. Les parlements le reçoivent également. Ce Rapport constitue aussi une contribution au Plan d’action nationalinclusion sociale que la Belgique rédige dans le cadre de ses obligations en tant qu’État membre de l’Union européenne.
Le rapport pauvreté 2007 met, comme les précédents, le doigt sur les dysfonctionnements puisqu’il rend compte des expériences de ceux qui sont confrontésà la pauvreté, mais Edouard Delruelle, directeur adjoint du CECLR, tient d’emblée à rappeler que « si 14,7% de personnes vivent en-dessous du seuil de risquede pauvreté en Belgique, il y en aurait 41,8% sans la protection sociale ».
Le rapport se subdivise en deux parties. La première reflète le débat que le rapport Abolir la pauvreté, paru en 2005, a suscité aux différentsniveaux de pouvoir. Elle s’inspire donc des réactions de décideurs politiques, de cabinets et d’administrations : des évolutions législatives ou des initiativespolitiques y sont brossées. La deuxième partie présente les résultats de quatre concertations thématiques, relatives au droit à l’enseignement, àl’habitat permanent dans les équipements touristiques, au droit effectif à l’énergie et aux titres-services comme mode d’insertion socioprofessionnelle. Originalité de ladémarche : les problématiques sont analysées et les recommandations politiques formulées à partir des expériences d’interlocuteurs qui, à titrepersonnel ou professionnel, sont confrontés à la pauvreté. Nous résumons ici deux thélatiques épinglées par le Service de la lutte contre lapauvreté.
Accès à l’énergie
En matière d’accès à l’énergie, Françoise De Boe, coordinatrice adjointe du service, relève les constats suivants :
– « la libéralisation fragilise les ménages précaires ;
– à revenu égal, tous les ménages ne bénéficient pas des mêmes mesures sociales lorsque celles-ci sont liées au statut ;
– certaines réalités sont masquées – et dès lors non traitées – par les mesures sociales. Ainsi, l’interdiction de coupure du gaz et del’électricité durant l’hiver ne signifie pas que les ménages préalablement coupés soient rebranchés ;
– les mesures permettant de diminuer la consommation d’énergie, comme les déductions fiscales pour des investissements liés à des économiesd’énergie ou les primes pour l’achat de certains appareils de chauffage, n’atteignent pas ou très peu les ménages pauvres. »
Nous reviendrons plus largement sur ces constats dans un prochain n° spécial d’Alter Échos consacré à l’accès à l’énergie.
Emplois titres-services
« En ce qui concerne les titres-services, les médias et les responsables politiques lient généralement leur succès au nombre d’emplois créés »,souligne Henk Van Hootegem, collaborateur du service. Mais les acteurs de terrain s’interrogent sur la part considérable des contrats à durée déterminée, surles contrats de quelques heures/semaine et le revenu qui en découle, sur les conditions de travail très pénibles dans certains secteurs, etc. » La question de la qualité deces emplois est trop souvent reléguée à l’arrière-plan constate le service de lutte contre la pauvreté qui détaille de manière trèsintéressante les nombreuses dérogations au droit du travail, l’effet de substitution provoqué, la faiblesse de la protection du travailleur et de la qualité desformations. Et de s’interroger en conclusion sur l’avenir du financement d’une telle mesure combinée souvent à des mesures d’aide à l’emploi (tellesActiva ou Sine) qui arrivent à échéance cette année avec les premiers contrats conclus cette année. Autre question : faut-il subsidier de la mêmemanière le secteur de l’économie sociale ou de l’aide aux personnes que le secteur de l’intérim et le secteur privé à but lucratif alors que laqualité des emplois et la plus-value sociale proposée sont loin d’être identiques ?
Responsabilisation individuelle accrue
Les constats des différents groupes de concertation révèlent une tendance politique croissante à lutter contre la pauvreté par des mesures qui accentuent laresponsabilité individuelle. Ainsi, les compteurs à budget renvoient-ils les ménages à leur propre capacité à recharger leur carte et dès lorsà disposer de courant. Ceci alors que le fond du problème – le manque de moyens qui empêche des ménages de satisfaire des besoins de base – estévacué. D’autres exemples qui concernent le logement, la santé, l’emploi, l’enseignement, et. sont cités dans le rapport. Cette propension à laresponsabilisation est ressentie de façon injuste tant par les personnes concernées
que par nombre d’acteurs de terrain. Un constat qui attend selon eux des réponses et desactions politiques fortes.
1. Service de lutte contre la pauvreté:
– adresse : rue Royale 138 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 212 31 73
– courriel : luttepauvrete@cntr.be
– site : www.luttepauvrete.be
2. Rapport du service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale : « Lutter contre la pauvreté. Évolutions et perspectives. Unecontribution au débat et à l’action politiques » – 210 p.
Téléchargeable sur le site : http://www.luttepauvrete.be
Disponible auprès de l’Infoshop du SPF Chancellerie du Premier Ministre – tél. : 02 514 08 00.