Pour la nouvelle ministre flamande du Logement, la N-VA Liesbeth Homans, le droit à habiter un logement social devrait être reconsidéré tous les trois ans. Avec quelles conséquences pour la mixité sociale?
C’était écrit dans les étoiles: le droit à rester à vie dans un logement va être remis en question au nord du pays. Ce droit était essentiellement défendu par le sp.a – au nom de la mixité sociale dans les quartiers – mais il y a longtemps qu’elle est dans le collimateur des nouveaux partenaires du CD&V et de la N-VA, l’Open VLD. Et les socialistes sont désormais dans l’opposition.
«Nous allons évoluer vers un système comparable à celui du marché privé de l’immobilier avec des baux 3-6-9 et des évaluations à chaque intervalle», a déclaré Liesbeth Homans au Laatste Nieuws. «Donc il doit devenir possible de mettre fin aux contrats lorsque les locataires occasionnent de graves nuisances, mais aussi lorsqu’ils atteignent un certain niveau de revenus.» La nouvelle ministre entend désormais réserver les logements sociaux «aux plus nécessiteux». Elle précise que les locations déjà en cours ne seront pas concernées par ces nouvelles règles.
Actuellement, on compte environ 150.000 logements sociaux en Flandre et 100.000 personnes sur liste d’attente. En théorie, les limites de revenus pour prétendre à une habitation sociale sont de 23.269 euros (imposable) par an pour un isolé et de 34.902 euros, plus 1.951 euros par personne à charge, pour une famille. Certaines sociétés admettent à l’occasion des personnes avec un revenu supérieur. En 2013, on estimait que 7,2% des locataires de logements sociaux gagnaient plus que les plafonds autorisés, ce qui représente environ 11.000 logements. Mais ces logements-là ne se libéreront pas, vu que leurs locataires ont des contrats de location en bonne et due forme. Ils paient généralement un prix plus élevé, grosso modo conforme à ceux en vigueur sur le marché locatif.
Qui sera concerné par la nouvelle règlementation alors? Les locataires des 43.000 logements nouveaux que les pouvoirs publics flamands comptent construire d’ici à 2025; ceux des 10.000 habitations qui se libèrent chaque année du fait du décès ou du déménagement des occupants et tous ceux qui sont sur liste d’attente.
Un nouveau piège à l’emploi?
La limite au-delà de laquelle Liesbeth Homans entend résilier les contrats locatifs futurs reste floue. À l’heure actuelle, il existe un cadre juridique qui stipule qu’un locataire qui gagne pendant plusieurs années un revenu équivalent à 200% du seuil d’admissibilité peut être exclu de son logement mais cela concerne extrêmement peu de cas, selon Björn Mallants. Par contre, il suffit que, dans un couple, le mari soit engagé comme facteur à plein temps et l’épouse comme femme de ménage à mi-temps pour dépasser le plafond de 34.902 euros, explique Joris Vandenbroucke, l’ancien chef de cabinet de Freya van den Bossche, la ministre SP.A sortante du Logement. Et Pascal De Decker, spécialiste en aménagement du territoire, craint que le but de la nouvelle coalition ne soit d’en finir avec la mixité sociale. «Cela reviendrait vraiment à donner une impulsion décisive à la création de ghettos sociaux (…), les habitations sociales devenant de facto des maisons de pauvres. En plus, les gens qui dépassent tout juste la limite autorisée se retrouveront sans logement parce qu’il n’y a pas suffisamment de logements de qualité disponibles tout en bas du marché immobilier.» Un risque collatéral serait alors de créer un équivalent immobilier du piège à l’emploi, certains craignant la perte de leur logement en cas de retour sur le marché du travail. Le plus surprenant est que, voici à peine un an, Liesbeth Homans avait réagi de manière très négative à une proposition similaire de la députée libérale Mercedes Van Volsem: «Cela ne peut tout de même pas être un objectif que des locataires [de logements sociaux] se mettent à hésiter avant d’accepter un emploi par peur de perdre leur logement?», avait-elle déclaré à l’époque.
Revue de presse réalisée d’après De Morgen et Het Laatste Nieuws