À quelques mois de l’arrêt de ses activités en région bruxelloise, Médecins sans frontières1 réitère son appel pour lefinancement public d’un relais santé pour les exclus des soins. Du côté des ministres bruxellois, on se dit prêts à se mettre autour de la table. Il va falloir laprévoir longue : si l’on compte le fédéral, pas moins de six ministres sont impliqués ainsi que 19 présidents de CPAS.
Ayant annoncé aux pouvoirs publics depuis plusieurs mois l’arrêt, début 2008, de ses activités médicales en région bruxelloise, à deux pas dela place Anneessens, Médecins sans frontières (MSF) s’inquiète de l’immobilisme des autorités par rapport à la continuité des services.Malgré certaines améliorations de l’accès aux soins des personnes en séjour irrégulier (cf. Alter Échos n° 208 et n° 168), « unestructure de référence telle que le « relais santé » de MSF restera indispensable. Il appartient aux autorités d’en prendre la responsabilité et de la financer», peut-on lire dans un communiqué de l’ONG diffusé le 8 janvier dernier.
Un relais santé, une nécessité
En Belgique, les personnes en séjour précaire ont droit aux soins de santé et les sans-papiers à l’aide médicale urgente, et de plus en plus de CPAS ensont conscients et tentent de répondre aux besoins. Mais la complexité du système et les procédures font que les droits des patients ne sont pas systématiquementappliqués. D’où l’importance cruciale d’un « relais santé » qui peut informer, rediriger et dépanner les personnes en quête desoins.
« La preuve de l’efficacité de cette structure permettant d’aiguiller les exclus des soins vers le système classique est, qu’à peine un quart despatients revient une deuxième fois chez nous », explique le docteur Pierre Ryckmans, coordinateur médical des projets belges de MSF. « Une fois qu’ils ontété orientés vers le prestataire de soins, ils n’ont plus de raisons de revenir chez nous. Ils savent à qui s’adresser pour les consultations futures. »En 2007, le relais santé géré et financé par MSF a effectué plus de 4 000 consultations médico-sociales.
Ces résultats montrent, selon l’ONG, qu’une telle structure doit être pérennisée. Tout d’abord, parce qu’un flux de nouveaux patients continuerade nécessiter une orientation. Ensuite parce que Bruxelles, et ses 19 CPAS, aux modes de fonctionnement différents, rendent le labyrinthe administratif complexe pour le patient. Lesdélais sont parfois très longs avant que le droit aux soins ne soit officiellement reconnu, ce qui peut poser problème pour les personnes malades.
En 2005, la création par la Région wallonne du premier relais santé, à Liège, avait permis à MSF d’y arrêter ses activités. Depuislors, ce modèle a été répliqué par la Région à Charleroi et à Mons (cf. Alter Échos n°231). En France, ce type de structureintermédiaire existe depuis 1999 sous le nom de Pass (Permanence d’accès aux soins). « Mais à Bruxelles, malgré nos appels répétés, lesautorités tardent à réagir, et ne s’engagent pas sérieusement pour l’avenir d’une telle structure ».
La Belgique rappelée à l’ordre
MSF rappelle qu’en tant qu’ONG, elle n’a pas pour vocation d’apporter des solutions structurelles mais bien de combler temporairement des manques tout en mettant les différentsacteurs face à leurs responsabilités. Après plus de 17 ans de présence à Bruxelles, MSF estime donc que le moment est venu pour les autorités de prendreleurs responsabilités.
« L’organisation « Médecins du Monde » reprendra la structure en région bruxelloise, mais il est impensable que les autorités ne s’impliquent pas dans cette reprisealors que les besoins sont clairement établis. L’accès aux soins pour tous est un devoir auquel la Belgique s’est engagée. Le pays a d’ailleursété récemment rappelé à l’ordre par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies pour ses lacunes en ce qui concernele droit à la santé des personnes en séjours irréguliers. »
Du côté de Pascal Smet, ministre SP.A compétent pour l’Aide aux personnes à la Commission communautaire commune (Cocom)2, il existe une volonté depoursuivre le travail entrepris par MSF. Le ministre se dit prêt à mettre les différents acteurs autour de la table et ils sont nombreux : quatre ministres au niveaurégional (Cerexhe, Van Hengel, Huytebroeck et Smet) et deux au niveau fédéral (Onkelinx et Dupont) ainsi que les présidents des 19 CPAS bruxellois. Mais Pascal Smet se ditconfiant quant au fait qu’un accord – (introuvable jusqu’ici) – intervienne encore cette année, « d’autant que le budget avancé par MSF, soit 200 000euros sur une base annuelle n’est pas énorme ». Au cabinet Huytebroeck3, on soutient la démarche, tout en expliquant que : « Nous ne sommes pas compétentsdans ce cas-ci pour prendre l’initiative, mais nous avons déjà par le passé octroyé un subside de 18 000 euros à MSF « .
MSF cessera ses activités à Bruxelles en avril 2008 et restera actif uniquement à Anvers, où l’accès aux soins reste un problème trèsimportant, selon l’ONG, pour laquelle l’inertie du CPAS d’Anvers constitue un obstacle majeur.
1. MSF:
– rue Dupré, 94 à 1090 Bruxelles
– tél. : 02 474 74 74
– courriel : info@msf.be
– site : www.msf.be
2. Cabinet Smet :
– adresse : Botanic Building, bd Saint-Lazare, 10 à 1210 Bruxelles
– tél. : 02 517 12 59
– courriel : info@smet.irisnet.be
– site : www.pascalsmet.be
3. Cabinet Huytebroeck :
– rue du Marais 49-53 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 517 12 00
– site : http://evelyne.huytebroeck.be