Dans le débat public tel qu’il a pu émerger à Bruxelles et en Wallonie, le pacte associatif a d’abord été tpensé comme un objectif àréaliser sur le plan communautaire et régional1. C’est notamment sur la base de la consultation des acteurs que l’échelon local a émergé comme un desaxes majeurs de sa mise en œuvre, voire une des conditions de sa réussite. S’il existe encore peu d’exemples très concrets de version locale d’un pacte associatif en tant que tel,on compte déjà beaucoup de réflexions et de balises théoriques posées pour une future mise en œuvre à cet échelon.
Parmi les signes qui attestent de la montée en puissance du niveau local dans les réflexions sur le pacte associatif, on citera notamment le fait très récent que lesdeux thématiques finalement retenues (au lieu des quatre initialement prévues) comme sujet des tables rondes organisées par les gouvernements de la Région wallonne, de laCommunauté française et de la Cocof, sont la structuration et la représentation du monde associatif d’une part, l’implication de l’échelon local dans la conclusion et lamise en œuvre du pacte associatif, de l’autre. Pour rappel, ces tables rondes sont prévues afin de donner l’occasion aux quelque 28 associations consultées dans le cadre duprocessus d’élaboration du pacte, d’échanger et d’affiner leurs points de vue et de mieux informer la décision politique. Elles constituent la suite logique del’après-midi du 10 juillet lors duquel ces mêmes associations avaient pu dévoiler leurs « positions de départ » à propos du pacte et écoutercelles des ministres concernés, mais pas encore entrer en débat.
Autre signe, qui atteste non seulement du regain d’intérêt pour l’échelon local dans le processus de confection du pacte, mais aussi de la faible connaissance de lamanière dont les actions des pouvoirs publics et des acteurs associatifs s’articulent à ce niveau : la Communauté française a également confié àl’Institut Jules Destrée, l’élaboration d’une recherche sur cette thématique. Les articulations entre les fonctionnements des pouvoirs publics et ceux du secteur associatif yseront analysées dans quatre communes wallonnes et bruxelloise aux pratiques très diverses : Ottignies-Louvain-la-Neuve, Pont-à-Celles, Charleroi et Saint-Gilles.
L’égalité de traitement : pas si clair que ça…
Une des questions qui se posent avec le plus d’acuité au niveau local est évidemment celle de l’égalité de traitement entre associations d’appartenance philosophiqueet/ou idéologique différentes, mais aussi entre associations prestatrices de services collectifs voire de services d’intérêt général. Reste quederrière l’apparente évidence du concept d’égalité de traitement, se cachent une série de difficultés pratiques. Sous le sceau de la confidence, tel cabinetévoque ainsi les problèmes insolubles que pose la question de l’accès aux locaux publics : sur la base de quel critère devrait se calculer cette égalité detraitement, qu’est-ce qui doit primer entre équité horizontale (traiter de façon identique des situations identiques) et équité verticale (traiter de manièredifférente des situations différentes), et dans ce dernier cas, quel est le critère adéquat pour mesurer et tenir compte de cette différence?
Un des points de contention les plus connus en la matière porte évidemment sur l’enseignement, et la rivalité, particulièrement marquée pour le primaire entreles écoles communales et les écoles libres (cf. la dépêche « Les communes prises dans lequasi-marché scolaire » dans ce numéro). La voie choisie pour tenter d’apaiser une partie de la question a été celle d’un décret de la Communautéfrançaise : le décret sur les « avantages sociaux » qui précise la liste des avantages qu’une commune ne peut donner aux écoles dont elle est le pouvoirorganisateur, sans automatiquement les attribuer aux autres écoles présentes sur son territoire. Reste qu’ici, la voie législative semble insuffisante pour apaiser les tensionsou modifier les pratiques, comme en témoignent les différents procès qui se sont succédés à ce propos ces dernières années (voire notamment lestrois arrêts rendus par la cour d’appel de Liège, en date du 20 décembre 2004 – voir AEduc n°97). Une des questions que soulève cette situation estprécisément celle de la manière d’instaurer des règles d’égalité de traitement : vaut-il mieux instaurer une liste de critères précis, quitteà multiplier les possibilités de recours et les complications administratives, ou édicter quelques grands principes, au risque de ne pas pouvoir trancher des situationsconcrètes.
Le local comme recours
Face aux difficultés à conclure un pacte en tant que tel (c’est-à-dire, un texte engageant deux parties, et pas une seule, quant à leurs droits et devoirs respectifs)au niveau régional et communautaire, l’échelon communal pourrait bien apparaître comme une possible voie de recours. Ainsi, pour ne prendre qu’un exemple, l’obstacle que constituela représentation de la diversité associative est-il vraisemblablement moins rédhibitoire à l’échelle d’une commune de quelques milliers d’habitants qu’àcelle d’une communauté de plusieurs millions. On mesurera avec d’autant plus d’intérêt la présence de ce thème dans les programmes des futures majorités. Onse souvient notamment que le parti socialiste avait émis l’intention de conclure, dans chacune des communes où il ferait partie de la majorité, des contrats d’avenir locaux avecles « forces vives ». Il était également question d’y inclure les principes d’une charte d’engagement vis-à-vis du secteur associatif2.
Un pacte associatif à Charleroi
Initialement impulsé par la ville, dans le cadre de Charleroi 2020, et confié à la Maison pour associations de Charleroi (MPA), le processus de pacte associatif carolo arapidement été confronté à une demande d’autonomie de la part des associations : celles-ci ont, par exemple, demandé d’ouvrir le chantier à des associationsnon initialement invitées. Lancées début 2006, les réflexions1 ont d’abord débouché sur la création de cinq thèmesgénéraux faisant l’objet d’autant d’ateliers de travail : le dialogue civil avec les associations ; la sécurisation des projets associatifs ; l’engagement associatif et lebénévolat ; l’emploi et l’associatif ; la promotion des valeurs démocratiques. Ces groupes ont désormais décidé de se rassembler en un seul, tant lesquestions traitées leur apparaissent entremêlées. L’espoir des participants au processus est de déboucher sur un texte rédigé par les associationselles-mêmes, à soumettre au politique. On observera donc qu’au niveau local, dans ce cas-ci à tout le moins, la logique semble inversée par rapport au processuscommunautaire et régionale. « Top-down » d’un côté, « bottom-up » de l’autre… A Charleroi, le modèle revendiqué n’est d’ailleurs pas belgemais français : celui des chartes de la vie associative, et plus particulièrement, celle qui a été conclue à Tourcoing, ville dont la Maison des associations est encontact régulier avec son pendant carolo.
1. Le site de la Maison pour associations de Charleroi offre plus d’informations sur la démarche, ainsi que le compte-rendu des différents ateliers et réunions
1. Tout au plus, pouvait-on lire dans la déclaration de politique communautaire de la Communauté française : « Le Gouvernement incitera également les pouvoirslocaux à ouvrir des discussions avec les représentants du monde associatif dans le but de décliner ce pacte associatif au niveau local. »
2. Très pratiquement, on renverra vers le site du Moc – mouvement ouvrier chrétien -, qui propose lui aussi un contrat entre les pouvoirs publics communaux et le monde associatiflocal, à faire signer par les nouvelles majorités mises en place. Le document est téléchargeable en ligne (au format pdf).