Apprendre le français sera bientôt obligatoire pour les primo-arrivants wallons. Pourtant, lors de la précédente législature, Éliane Tillieux s’y était opposée.
C’était l’une des surprises du chef Magnette. Le fameux parcours d’intégration wallon obligera les primo-arrivants à apprendre le français. C’est écrit en toutes lettres: «Rendre l’apprentissage du français obligatoire».
Rappelons que sous la précédente législature l’enjeu de l’obligation du parcours fut particulièrement houleux. Au terme de nombreuses discussions, Éliane Tillieux, la précédente ministre en charge de l’intégration des étrangers, avait décidé de ne rendre obligatoire que le premier volet du parcours. Un volet «accueil», constitué d’informations pratiques, notamment sur la suite du parcours, d’un bilan social et d’orientations.
Quant aux autres composantes du parcours, Éliane Tillieux s’était déclarée opposée à l’idée de les rendre obligatoires. Elle le disait notamment dans nos colonnes, en 2013: «Je ne pense pas qu’on puisse apprendre une langue en obligeant les gens à aller trois fois par semaine suivre des cours sous peine de leur supprimer leur revenu d’intégration. C’est quand on donne la possibilité aux gens de participer à la société […] que le besoin et l’envie d’apprendre s’expriment. Et puis, on peut parler français sans être intégré pour autant. La question de l’intégration ne se réduit pas à la langue.»
Certes, Éliane Tillieux est désormais ministre de l’Emploi. Mais le Parti socialiste tient les rênes de ce gouvernement, même si c’est désormais Maxime Prévot (cdH) qui a récupéré le dossier «intégration». Alors, comment expliquer ce changement?
Le français: une condition de l’intégration
Du côté du ministre-président, on récuse l’idée d’une «rupture politique». «L’apprentissage du français est une condition d’intégration indispensable, nous dit-on. La volonté politique de tendre vers une obligation est affirmée. Il n’y a pas de différence de fond avec ce que pensait Éliane Tillieux. Elle ne souhaitait pas poser une obligation sans pouvoir la financer.»
Doit-on comprendre que les associations et autres organismes de formation du français vont recevoir moult subsides pour pouvoir assumer leurs nouvelles missions? Pas si sûr, vu le contexte budgétaire actuel. C’est sans doute pourquoi dans l’entourage de Paul Magnette on insiste pour rappeler que la déclaration de politique régionale est prudente. Cette obligation sera «graduelle» et dépendra des «moyens» disponibles. Il se dit que le cdH aurait milité pour une formule plus «musclée» et engageant davantage le gouvernement.
Quoi qu’il en soit, du côté des opérateurs wallons de l’intégration, on accueille plutôt favorablement ce changement. Pour Patrick Montjoie, président du Dispositif de concertation et d’appui aux centres régionaux d’intégration (Discri), cette volonté de rendre obligatoire l’apprentissage du français, n’est «pas une mauvaise chose. Connaître une langue nationale c’est renforcer la cohésion sociale. Cela permet d’entrer en contact avec les gens autour de soi. Cela étant dit, il est essentiel que cela soit assorti de moyens supplémentaires.»
Aller plus loin
Alter Échos n° 354 du 15.02.2013 : «Quel parcours d’accueil pour les primo-arrivants?» (dossier)