La Fondation Roi Baudouin organisait un déjeuner de presse, le 25 juin dernier, sur le thème « la philanthropie, ça marche ! » Échos de nos échangessur des esquisses d’enjeux, en prémices à une journée de la philanthropie programmée pour la rentrée.
Le centre de philanthropie de la Fondation Roi Baudouin (FRB) gère plus de 200 fonds nominatifs totalisant un capital de 100 millions d’euros et un budget annuel de fonctionnement de 5millions d’euros. Sans compter les plus modestes « comptes de projets », soutiens ponctuels à des actions de proximité. Au final, chaque année en Belgique, ce sont 2500 associations qui bénéficient des largesses de philanthropes, rien qu’à travers les fonds gérés par la FRB. Face à la croissance duphénomène, celle-ci a décidé de braquer les projecteurs sur cette philanthropie et demande aux pouvoirs publics de la promouvoir.
Amour de l’Humanité
Telle est la signification étymologique de « philanthropie ». Mais encore ? Une chose est sûre, affirment nos interlocuteurs, la philanthropie ce n’est pas dufundraising, ces shows, courants aux États-Unis, qui permettent à des ONG, des universités et autres services collectifs de financer leurs activités grâceà la générosité des participants à leurs galas1. La différence ? Le fundraising s’organise de plus en plus comme un véritablemarché à partir de la demande de financement. Inversement, dans l’approche philanthropique, on part de l’offre : des personnes ou des entreprises disposent d’une sommequ’elles souhaitent affecter à une activité « utile ».
Des risques de dérives ultra-libérales ?
En demandant aux pouvoirs publics de promouvoir et de faciliter la philanthropie, ne donne-t-on pas des arguments à celles et ceux qui préconisent la réduction desdépenses publiques et de la pression fiscale générale ? Selon Luc Tayart de Borms, administrateur-délégué de la FRB, « il serait naïf de croireque les fondations privées vont un jour remplacer les gouvernements. Dans notre pays, où la pression fiscale moyenne est de l’ordre de 45 à 50 %, il s’agitplutôt de souligner la complémentarité de ces deux sources de financement. D’autant que certains financements publics exigent des promoteurs de projet qu’ils trouventune amorce de 10 à 15 % avant de les subsidier. »
Des opportunités pour les associations ?
En attendant l’hypothétique idéal (pléonasme ?) qui verrait les collectivités publiques rencontrer l’ensemble des besoins sociaux sous le sceau del’intérêt général, pourquoi ne pas profiter de ces mannes financières privées ? On l’a vu, de nombreuses associations bénéficientdéjà – via des appels à projets, notamment – de coups de pouce de fondations belges. D’autres, qui ont des partenariats dans des pays de culture anglo-saxonnelouchent souvent sur les faramineux montages privés-publics qui permettent à leurs consœurs de mener des actions dans des contextes financiers confortables. Et pourquoi pas cheznous ? Au-delà de légitimes désaccords idéologiques, il y a aussi la méconnaissance des milieux de la philanthropie, de ses codes, de ses demandes ; ainsi que lacrainte d’instrumentalisation qu’elle peut inspirer. « Cette méconnaissance et cette méfiance sont réciproques, nous répond Jean-Paul Collette,responsable de la communication à la FRB. Les personnes qui veulent affecter leur fortune à des projets ne savent pas non plus à qui s’adresser, que proposer ni quedemander. »
Une journée de sensibilisation
C’est dans ce contexte que la FRB a programmé le 30 septembre prochain une journée de réflexion et de sensibilisation intitulée « La philanthropie,ça marche !2 ». Au programme : des conférences et des ateliers sur le mécénat d’entreprise, le rôle de la philanthropie, les professionnels ensoutien aux projets philanthropiques ainsi que quelques domaines emblématiques où ceux-ci se déploient : relations Nord-Sud (on ne parle pas ici de la Belgique…), art,jeunesse, diaspora.
Si cette journée s’adresse surtout aux (candidats) philanthropes, elle représente aussi une occasion pour les différentes parties d’apprendre à seconnaître. Et à dénouer des nœuds de principe autant que les cordons de la bourse.
1. Lire à ce propos l’édifiant reportage de Guillemette Faure, « Donne ! À New York, l’incroyable business de la charité » dans le n° 2 dela revue XXI. (www.leblogde21.com)
2. Plus d’infos sur : www.kbs-frb.be