Le grand chantier
Vu l’ampleur du problème, le gouvernement régional de Bruxelles-Capitale a décidé, en octobre dernier, sur proposition de la secrétaire d’État au Logement, Nawal Ben Hamou (PS), d’interdire aux propriétaires bailleurs d’indexer le loyer de leur logement si celui-ci présente de piètres performances énergétiques. Les derniers de la classe – ceux qui présentent un certificat de performance énergétique (PEB) de classes F et G, soit environ 45% du bâti régional certifié – sont dans le viseur. Les logements qui ne disposent pas de certificat PEB ne pourront pas non plus voir leur loyer indexé, et il s’agit tout de même de 55% des logements de la capitale. L’objectif est ici de pousser les propriétaires à rénover leurs biens.
Mais une simple interdiction de l’indexation ne suffira pas pour résoudre le problème de la précarité énergétique.
Au-delà de l’urgence, le gouvernement de la Région-Bruxelles capitale dit avoir fixé un cap. Celui de "supprimer les passoires énergétiques en 2033 et ainsi améliorer la santé des Bruxellois, la qualité de l’air et diminuer la précarité énergétique", affirme Julien Simon, du cabinet d’Alain Maron (Écolo), ministre régional de l’Énergie et pilote de la stratégie bruxelloise de rénovation du bâti "Rénolution".
Rénolution, c’est la stratégie pour rénover en profondeur le bâti bruxellois. En 2023, le gouvernement bruxellois a prévu une enveloppe de 53 millions d’euros à ce poste, soit un doublement du budget par rapport à 2019.
Une consommation divisée par trois
À Bruxelles, le secteur du bâtiment – chauffage, eau et cuisson – représente, selon l’administration, 61% des émissions de gaz à effet de serre de la région. La vétusté et l’ancienneté du bâti y sont particulièrement mauvaises. On compte environ 30% des bâtiments non isolés. L’objectif de la Région est d’atteindre, en moyenne, et sur l’ensemble du parc immobilier bruxellois, une performance énergétique de 100 kilowattheures par mètre carré et par an, donc l’équivalent d’un PEB C+, à l’horizon 2050, alors que la moyenne est aujourd’hui de 210 kWh.
Cela représente une consommation moyenne divisée par trois par rapport à aujourd’hui sur l’ensemble du parc de logements.
D’ici 2025, tous les bâtiments bruxellois devront en outre disposer de leur certificat PEB. Il servira de base à l’établissement d’un plan de rénovation personnalisé pour chaque bâtiment. A partir de 2030, le propriétaire devra réaliser une mesure au choix, tous les cinq ans, afin que son immeuble atteigne l’objectif PEB fixé pour sa typologie en 2050. A Bruxelles, en 2033, tous les labels F et G devront avoir atteint le niveau E.
En Belgique, la moitié des 4,5 millions de logements ont été construits avant 1960 et près de 25% avant 1920. En Flandre, 32,2% des bâtiments (logements compris) ont été construits après 1981, contre 21,4% en Wallonie et seulement 6,7% en Région de Bruxelles-Capitale. Et que ce soit dans le logement public ou privé, la rénovation est encore trop lente.
Le levier du logement social
La Fondation Roi Baudouin souligne dans la dernière édition de son baromètre que la rénovation des logements sociaux est d’ailleurs un "levier clé" pour lutter contre la précarité énergétique.
"En premier lieu, il faut rénover le parc du logement social, affirmait Sarah De Laet en 2021, coordinatrice chez Inter-Environnement Bruxelles. Car ce sont les seules habitations sur lesquelles les Régions peuvent directement intervenir, sans que cela fasse augmenter de trop les prix des loyers".
Ce serait effectivement un bon début. Pour le moment, le logement social n’est ni en nombre suffisant ni qualitatif à Bruxelles. Selon la Fondation Roi Baudouin, environ 50% des logements sociaux belges peuvent être considérés comme "très énergivores" (dont 63% en Wallonie, 44% à Bruxelles et 40% en Flandre) et 41% des ménages vivant dans ce type d’habitation se trouveraient en situation de précarité énergétique.