Dans son dernier rapport, la CAAP (Concertation des associations actives en prison) s’est intéressée à la sortie de prison, et plus particulièrement aux dispositifs existants en matière de réinsertion.
La sortie de prison fait trop rarement l’objet d’une préparation approfondie et concertée, reproche la CAAP. Pourtant, les problématiques sont nombreuses: retissage des liens familiaux, recherche d’un logement, recouvrement des droits sociaux, détermination d’un projet socioprofessionnel, respect des conditions de libération, etc. Pour la CAAP, de nombreuses synergies sont possibles et permettraient d’améliorer le retour des personnes sortant de prison en mettant en place des projets d’insertion individualisés, collant aux besoins, aptitudes et aspirations des personnes. Ces projets lutteraient même, à entendre l’association, plus efficacement contre la récidive.
La CAAP appelle les autorités à préparer la sortie de prison dès l’entrée en prison. «Ceci afin d’éviter les écueils d’une préparation précipitée et de donner du sens au temps passé en prison», explique Séverine Climaz, auteure du rapport. «Cet objectif est à mettre en parallèle avec la mise en place du plan de détention (NDLR : prévu dans la loi de principe) qui ne pourra être appliqué sans une amélioration structurelle du système carcéral.» Autre aspect relevé: la plus grande implication de l’entourage dans la préparation à la réinsertion. «Les proches des personnes sortant de prison constituent des acteurs centraux prenant en charge les fonctions d’accueil et de soutien. Ils doivent être mieux pris en compte dans les programmes et dispositifs de réinsertion», rappelle Séverine Climaz.
À l’instar de son précédent rapport, datant de 2015, analysant l’offre de services faite aux détenus en Wallonie et à Bruxelles, la CAAP en appelle une nouvelle fois à améliorer les conditions de travail des services actifs en prison, comme à la sortie, notamment en renforçant leur financement et leurs effectifs. «En plus de palier leur saturation, l’amélioration de ces conditions de travail concourrait au développement des services dédiés à la réinsertion», continue Séverine Climaz. La CAAP souhaite favoriser l’accès aux personnes sortant de prisons à ces dispositifs: «Pour ce faire, il est nécessaire d’offrir des garanties aux différents secteurs concernés. Par exemple, en matière de logement, il s’agirait de prévoir un accompagnement suffisant et adéquat pour maintenir ces personnes dans les lieux où elles sont hébergées», poursuit l’auteure du rapport.
Dans ses recommandations, la CAAP aborde aussi l’hypothèse des Maisons de transition, comme le fait également la déclaration de politique communautaire 2014-2019 du gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Le ministre Rachid Madrane a d’ailleurs rappelé lors de la présentation du rapport tout son intérêt pour la mise en place de ces maisons.
Pour la CAAP, la maison de transition devrait s’appuyer sur un cadre juridique suffisamment souple pour permettre une flexibilité organisationnelle aux différentes initiatives, en favorisant, par exemple, un modèle semi-ouvert, tourné vers l’extérieur pour privilégier une logique de proximité avec le tissu associatif et l’appui sur les ressources locales. «Il faudra rester attentif à ce que la personne puisse à la fois conserver les liens avec ses proches et s’inscrire dans un tissu permettant l’élaboration d’un projet d’insertion», explique Mélanie Bertrand, auteure du rapport. «La maison de transition ne devrait pas devenir un instrument utilisé à l’excès par l’appareil judiciaire, comme certaines mesures alternatives telle la surveillance électronique», précise-t-elle par contre. «Il ne faudrait pas non plus que la maison de transition se mue en une mini-prison organisée principalement sur les principes de sécurité et de surveillance.» Raison pour laquelle le rapport de la CAAP rappelle que le séjour en maison de transition ne se justifierait pas pour tous les détenus.
En savoir plus
«À Montréal, des maisons pour réussir la transition», Alter Échos n°423, mai 2016, Sophie Mangado.
«Un modèle québécois pour penser la sortie de prison», Alter Échos n°423, mai 2016, Sophie Mangado.
«Sortir de prison, pas si facile», Alter Échos n°413, décembre 215, Marinette Mormont.