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"Réforme du minimex : débat entre le ministre et les associations"

10-09-2001 Alter Échos n° 104

La proposition de réforme du minimex du ministre de l’Intégration sociale Johan Vande Lanotte1 a continué à faire des vagues. Le 30 août dernier se tenaitune conférence de presse organisée par une plate-forme (la Ligue des droits de l’homme, Droits pour tous!, le Collectif des associations partenaires du rapportgénéral sur la pauvreté, la Ligue des familles, la FGTB-Bruxelles, la CSC-Bruxelles, le Mouvement des jeunes socialistes, et encore nombre d’autres associations, soutenues par undes partis de la majorité, Écolo, qui déclare tout simplement inacceptable la réforme proposée par le ministre.
Déjà le 28 août, leurs revendications avaient été relayées à l’Université d’été du PS par Andrea Rea et Mateo Alaluf, tous deuxsociologues à l’ULB, qui débattaient respectivement avec Laurette Onkelinx et Yvan Mayeur.
Dans la foulée de la conférence de presse, une manifestation avait lieu le soir même devant le cabinet du ministre, suivie par une brève entrevue avec ses collaborateurs,qui s’engageaient à ouvrir une consultation marathon. Les associations ont donc été reçues séparément début septembre au cabinet Vande Lanotte pour yfaire entendre leur point de vue. La plate-forme n’en demeure pas moins insatisfaite, estimant que la consultation devait être largement et globalement menée.
Un débat avec les associations jugé tardif
Le représentant du ministre Vande Lanotte, Alexandre Lesiw, a participé ce 5 septembre à une soirée de débat où il a répondu à toutes lesinterrogations et mises en cause des opposants au projet de réforme, pourtant déjà retouché par le gouvernement fin juillet. Au banc de l’accusation se trouvaient laLigue des droits de l’homme, Droit pour tous!, le Mouvement des jeunes socialistes, Écolo, les Jeunes-CSC-Bruxelles, la FGTB-Bruxelles, la Fédération des étudiant(e)sfrancophones. Manquaient les associations responsables du rapport général contre la pauvreté qui ont unanimement désavoué l’absence d’une réelleconcertation sur le modèle de la table-ronde de la sécurité sociale.
Jacques Fierens, avocat et professeur aux Facultés universitaires Notre-Dame de la Paix à Namur, a introduit le débat. Présentant la réforme comme « inspiréedu libéralisme du XIXe siècle », il a souligné le fait que « derrière la mise au travail des bénéficiaires de minimex ne se profile pas tant le souci del’éducation des pauvres que celui de la rentabilité économique de ces derniers. La contractualisation du rapport entre le CPAS et le bénéficiaireprésente depuis 93 supplante aujourd’hui le droit au minimum vital. Les pauvres sont donc toujours supposés paresseux et profiteurs. » La principale contestation repose sur ce queles associations considèrent comme du travail forcé et qui déroge à tous les acquis sociaux, à la loi sur le contrat de travail (loi de 78) et à ce que lalégislation chômage définit comme un emploi convenable (le droit de refuser un emploi selon certains critères).
Défense du ministre
Alexandre Lesiw, attaché du ministre et détaché pour l’occasion, a expliqué que la notion d’emploi adapté était moins péjorative que celled’emploi convenable et que le CPAS ne pouvait pas garantir p. ex. à un minimexé historien de l’art un travail correspondant à ses qualifications. Selon lui, il estillusoire de penser que les services de placement des chômeurs y arrivent mieux… Alexandre Lesiw confirme en outre la position du ministre selon laquelle l’augmentationprévue de 4% en 2002 puis de 6% en 2005 du revenu vital sera liée au fait que la réforme passe…
Les syndicats de leur côté s’inquiètent évidemment de la possibilité qu’un minimexé travaille comme un autre travailleur mais pour un salaire etdes droits sociaux moindres… Le collaborateur du ministre confirme en outre que toute une série de dispositions qui influencent le niveau de revenu du minimexé, comme le calculdes revenus immunisés, sont renvoyées aux arrêtés d’application, et donc, ne font pas même l’objet d’un débat au conseil des ministres.
Présentée comme très progressiste, la mesure qui consiste à permettre aux étrangers (inscrits au registre de population) de bénéficier du revenu vitalest vivement contestée car les régularisés, par exemple, sont inscrits au registre des étrangers et en sont dès lors exclus. À la question du nombre dejeunes de moins de 25 ans potentiellement concernés par la mise au travail, Alexandre Lesiw estime qu’un tiers de ces jeunes poursuivront leurs études et un tiersbénéficieront de l’équité (liberté est laissée aux CPAS d’apprécier si la personne est en état de travailler), et donc un derniertiers des jeunes concernés pourraient être mis au travail.
Seconde lecture au conseil des ministres
Le 7 septembre, le projet, rebaptisé « revenu d’insertion », était entériné par le gouvernement, prêt à être envoyé au Conseil d’État et auParlement. Écolo se félicite d’avoir obtenu quelques avancées, sur la qualité d’emploi, la liberté de choix du bénéficiaire, la possibilité desuivre des études ou des formations avant 25 ans, etc., mais se dit toujours insatisfait des principes fondamentaux du texte comme la différence faite entre les plus et moins de 25 ans,le maintien de la conditionnalité et la définition de l’emploi convenable. Écolo déplore aussi le report sine die de la seconde augmentation du montant del’allocation.2
1 Cabinet Vande Lanotte, rue Royale, 180 à 1000 Bruxelles, tél. : 02 210 19 11, fax : 02 217 33 28.
2 Le texte revu a été diffusé ce lundi 10 septembre, ce qui ne nous laisse pas le temps de vous en fournir un commentaire sérieux. Nous n’y manquerons pas dans notreprochain numéro.

Agence Alter

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