A l’initiative du ministre-président de la Région de Bruxelles-Capitale, Charles Picqué1, deux jours de débats et de rencontres sur le thème de la revitalisationdes quartiers en crise ont eu lieu ces 8 et 9 octobre derniers aux Halles Saint-Géry à Bruxelles. Des experts belges et européens, des élus communaux ainsi que desreprésentants d’associations locales et de comités de quartiers s’y étaient donné rendez-vous.
Lors du premier jour, deux tables rondes se sont tenues autour des thèmes «la gestion des dynamiques collectives» et «le logement comme facteur d’intégration». Al’issue de cette journée, une «bourse aux stands» réunissant une vingtaine d’organisations2 actives notamment auprès de «quartiers en crise» bruxellois, apermis aux intéressés de s’informer sur les projets en cours.
Le deuxième jour, le débat sur le «développement socio-économique des quartiers» a retenu toute l’attention des 200 personnes présentes au colloque.Introduisant la table ronde, Eric Buyssens, délégué à la DRISU (Délégation régionale interministérielle aux solidarités urbaines), arappelé que la précédente législature (90-95) avait eu dans ses objectifs la formation et l’insertion professionnelle des jeunes dans les grandes entreprises bruxelloises.«Malgré l’embauche de quelque 1.200 jeunes demandeurs d’emploi, issus pour la plupart de l’immigration, l’appui recherché auprès des acteurs traditionnels du monde del’entreprise n’a pas eu les effets escomptés». La Région s’est donc tournée, pour cette seconde législature, vers le développement de l’économiesociale locale avec, comme cadre, les contrats de quartiers, les quartiers d’initiative et le programme européen URBAN. Toutefois, souligne le représentant de la DRISU, «lesecteur de l’économie sociale n’est pas une solution miracle en soi». Il s’agit en effet de poursuivre les efforts en matière d’insertion socioprofessionnelle dans les secteurstraditionnels de l’économie bruxelloise. «A titre d’exemple, les récentes opérations de rénovation des quartiers en difficulté financés par laRégion et les communes pourraient être réalisées par les demandeurs d’emploi de ces mêmes quartiers».
Toutefois, les entreprises de construction ne font pas toujours appel à de la main-d’œuvre locale. «C’est malheureux» s’indigne Monsieur Venderelst, coordinateur du centre FAC(Centre de formation en alternance de la construction), «dans une commune où le taux de chômage est élevé, des ouvriers extérieurs, parfois même desflamands ou des wallons, sont embauchés sur chantier alors qu’il suffit de puiser dans la main-d’œuvre du quartier». Malgré ce paradoxe, à Bruxelles, les formations enalternance permettent chaque année à plus de 1.000 jeunes sans-emploi de trouver un emploi dans le secteur de la construction. «Notre force réside dans le fait que noussommes en contact permanent avec les entreprises. Nous pouvons donc mieux former en répondant réellement aux demandes du marché».
Présentant le centre Euclides, José Menendes, son responsable, affirme que les entreprises d’insertion insufflent un cadre nouveau dans les quartiers dits en crise. «Situéà Cureghem, le centre a hébergé, depuis sa création en 1994, une vingtaine de projets visant à développer le quartier», explique le directeur ducentre. «Au départ, on vient chez nous avec un projet. Ensuite, nous analysons le marché et la demande locale. Si le projet est viable, nous tentons de le développer encréant des partenariats avec d’autres entreprises du quartier». Grâce à cette stratégie, deux nouvelles entreprises locales (Imago et Murmuur) ont étérécemment mises sur pied. Une dizaine de sans-emploi anderlechtois y seront engagés prochainement.
Pour Madame Decoster, coordinatrice du GUIDE/ULB (centre de recherche sur le développement local), l’essor socio-économique d’un quartier dépend aussi du développement etdu suivi éducatif, culturel et social de la population qui y réside. Prenant l’exemple des régies de quartiers en région wallonne, elle explique que plusieurs missions ysont menées de front : «Inscrire les gens dans le circuit du travail, leur apprendre à écouter et à prendre la parole (mission d’éducation permanente), lesconseiller (par exemple sur les possibilités de primes à la rénovation) et jouer le rôle d’agence de développement local (soutenir par exemple des projets collectifsou promouvoir la mise en place de transports publics dans un quartier)». Par ailleurs, le volet formation est, selon Madame Decoster, extrêmement important : «il faut non seulementqu’il soit en adéquation avec la demande du marché local, mais également susciter, pendant cette période, des rencontres plus fréquentes entre deux mondes qui serencontrent rarement : les demandeurs d’emploi locaux et les PME d’un quartier».
Le ministre-président de la région de Bruxelles-Capitale a clôturé les débats par un discours encourageant et réaliste. «Ces deux journées decolloque ont permis d’évaluer ce qui a été réalisé : ce qui a marché et ce qui n’a pas fonctionné. Nous devons donc aujourd’hui en tirer lesconséquences et nous inscrire dans la durée. Il est en effet impossible de résoudre 30 années de non-gestion de la ville en cinq ans. Pour se faire, a-t-ilsouligné, il s’agit de rassembler le plus de moyens possibles et de placer la problématique des villes au plus haut niveau de l’Etat».
1 Rue Ducale 9 à 1000 Bruxelles, tél : 02/506 32 11.
2 Etaient présents : Réseau habitat, Centre urbain, Bruxelles propreté, DRISU, Inter Environnement Bruxelles, BRAL, CEFA Ixelles-Schaerbeek, Convivences, Camelia, Avanti, CAFA,Régie de quartier, Renovas, Bouillon de culture, les Centres de contact, Recyclart, la Maison de la participation, Euclides, l’Union des locataires d’Anderlecht/Cureghem et Forest, la Missionlocale de Schaerbeek.
Archives
« Résoudre en cinq ans trente années de non-gestion de Bruxelles ? »
Alter Échos
12-10-1998
Alter Échos n° 38
Alter Échos
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