Le quartier de la gare du Midi est en pleine mutation. La gare, qui accueillera des liaisons directes vers Francfort, Cologne et Amsterdam dès 2009, est devenue une véritable ported’entrée dans la capitale de l’Europe avec toute l’internationalisation qui s’ensuit. De nouveaux enjeux pas toujours évidents à concilier avec la vie deshabitants au sein de ce quartier…
Dans un communiqué, les habitants des derniers îlots non expropriés du versant saint-gillois de la gare du Midi font part de leur mécontentement.Insécurité, incendies, chantiers, dépôts d’immondices, coupures de l’éclairage public,…. le comité d’habitants1 estime queles autorités expropriantes emploient le temps comme une arme destinée à « les faire craquer et accepter une offre de rachat à bon compte». Pour PatrickDebouverie2, échevin MR en charge de la coordination des projets de développement dans le quartier, il s’agit là d’accusations injustifiées. «La commune investit beaucoup dans le quartier et nous sommes attentifs à son développement», explique-t-il, en nous détaillant le plan de ce territoire qui trône dansson bureau. « Nous avons un centre d’entreprises. Une maison de l’emploi va ouvrir… » Quant à l’insécurité, l’échevin assure quela police patrouille régulièrement dans le quartier, même s’il ne nie pas que les problèmes existent notamment au niveau des immeubles vides qui devraient êtremurés : « Nous nous battons pour que ce soit fait au plus vite mais il faut respecter certaines procédures. Par exemple, nous ne pouvons pas murer un immeuble avant que certainesinspections aient été réalisées notamment au niveau de la détection de l’amiante… »
De réelles lenteurs
Le plan d’expropriation qui couvrait depuis dix ans l’ensemble de la zone, à savoir quatre îlots dits A, B, C et D, qui comprennent des habitations et des commerces, estarrivé à échéance en octobre 2006. Divers bâtiments sont pourtant toujours debout et abritent des propriétaires qui se demandent s’ils pourront resterdans leurs habitations. La réponse de la commune est claire : « Des projets existent à ces endroits et nous avons des investisseurs. Les choses vont donc aller très vite.» Avant de mettre en œuvre un plan d’expropriation, la commune préfère poursuivre des négociations à l’amiable via le comitéd’acquisition qui a repris le dossier. Ce comité géré par le service du ministère des Finances a reçu des moyens supplémentaires alloués par laRégion afin de négocier pour les propriétaires de meilleurs prix que les offres insatisfaisantes et clairement sous-évaluées faites par le passé par lasociété anonyme Bruxelles-Midi. Pour les membres du comité de riverains, le comité d’acquisition n’a toutefois rien changé puisque, selon eux, iln’emploie pas de pratiques plus cordiales et plus justes. Le comité s’indigne aussi du fait que « quand les propriétaires sont contactés pour un éventuelrachat de leur maison, le représentant du Comité d’acquisition se présente en compagnie d’une employée de Bruxelles-Midi quand ce n’est pas uniquementdes représentants de Bruxelles-Midi qui se présentent pour faire des offres de rachat. » « Le représentant de Bruxelles-Midi est un expert, répond PatrickDebouverie. Il accompagne mais le montant reste fixé de manière indépendante par le comité. Il ne s’agit absolument pas d’intimider les gens. »
Autre son de cloche dans le chef du juge de paix du canton de Saint-Gilles, dans son jugement du 7 mars dernier relatif à une expropriation dans le quartier. Le juge, statuantcontradictoirement et en dernière instance, a fustigé la gestion des autorités publiques dans ce dossier. Selon notre confrère Mehmet Koksal dans un article publiédans La Tribune de Bruxelles de ce 31 mai 2007, le juge de paix confirme que le faux plan d’expropriation de 1992 constitue “une lourde faute équipollente à lamauvaise foi du pouvoir public”, que “l’intermédiaire créé par le pouvoir public, étant le véhicule Bruxelles Midi, créa de surcroîtpar sa seule existence un brouillard et une équivoque de nature à installer le trouble dans l’esprit des citoyens concernés” et que le système mis enœuvre est un “modèle d’administration mal conçue et malfaisante”. C’est pourquoi, le juge précise que “la faute grave continue del’expropriante causa […] un dommage moral et matériel certain”. « En plus d’éponger la faillite d’une société privée, la Régiondevra donc se préparer à payer de conséquents dommages et intérêts aux derniers propriétaires expropriés de la Gare du Midi,écrit lejournaliste. Si toutefois elle finit, enfin, par mettre ses menaces à exécution…
En attendant, la Région est à présent chargée de voter un nouveau plan d’expropriation limité à quatre immeubles.
Un problème de communication ?
Pour l’échevin MR, un des problèmes majeurs dans ce dossier réside dans sa complexité et donc dans la difficulté de donner une information claire etprécise aux habitants. Un état de fait contre lequel il entend se battre puisqu’une communication est en cours de rédaction. Pour la rentrée de septembre, les habitants duquartier du Midi seront informés des évolutions que va connaître le lieu. « Nous avons maintenant de nombreux éléments en main pour montrer ce qui va sepasser. Des panneaux didactiques seront installés dans le quartier, un numéro de téléphone d’information sera mis en place… » À travers cesexplications, la commune entend décrire aux habitants sa vision de leur futur quartier. « On y retrouvera une grande mixité sociale et un bon équilibre entre lecôté international et le côté local. Il y aura des commerces et des services pour les résidents. Nous ne voulons pas d’une zone morte en soirée et durantle week-end mais d’une symbiose entre quartiers anciens et contemporains ».
Entre délocalisation et création d’emplois
Reste la question de l’emploi réellement créé dans le quartier. Les nouveaux bureaux résultent en effet souvent d’un déménagement d’uncoin à l’autre de Bruxelles. Patrick Debouverie ne le nie pas mais assure que tous les nouveaux bureaux sont à présent occupés. Même s’il reconnaîtcertaines lenteurs, dues notamment aux nombreux intervenants et aux procédures parfois très lourdes, il promet qu’à présent, les ch
oses vont aller vite et avance ledélai de fin 2007, début 2008. « Il est un peu prématuré de donner des chiffres mais rien que pour les hôtels on aura environ 600 emplois. De nouveauxinvestisseurs arrivent et des commerces seront créés suite à l’arrivée des bureaux mais aussi des habitants. Le problème c’est qu’on se focalisetoujours sur quatre îlots alors que c’est plus vaste. On a eu 230 logements supprimés dont certains étaient de véritables taudis mais on oublie qu’on en acréé 500 nouveaux sur l’ensemble du secteur. Un contrat de quartier a été mis en place et nous sommes attentifs à un aménagement lié aubien-être des habitants. »
1. Comité d’habitants du Midi – courriel : comite@quartier-midi.be
Jeudi 14 juin à 19h30 Projection-débat autour d’un film sur le quartier du Midi “Dans 10 jours ou dans 10 ans…”, rue Guillaume Tell, 61 à 1060 St-Gillesau “Pianofabriek”, entrée gratuite.
2. Maison communale de Saint-Gilles, place Van Meenen, 39 à 1060 Bruxelles – tél. : 02 536 03 11 – courriel : patrick.debouverie@brutele.be