Le Conseil central de l’économie (CCE) et le Conseil national du travail (CNT)1 ont approuvé leur nouveau rapport concernant l’évaluation de l’obligation enmatière de premier emploi (notamment via les contrats dits « Rosetta »). Il pointe un certain manque de respect par les employeurs de leurs obligation et, surtout,l’impossibilité de faire une réelle évaluation de la mesure.
Pour rappel, la loi du 24 décembre 1999 oblige les employeurs à engager un certain nombre de jeunes de moins de 26 ans via des « conventions premier emploi » (CPE), dansle but de favoriser leur insertion sur le marché de l’emploi. Ainsi, les employeurs du secteur public et du non-marchand doivent occuper des jeunes travailleurs à concurrence de 1,5 %de leur effectif. Si le secteur de l’enseignement est exempté, les autorités fédérales et les entreprises du secteur privé (qui, dans ce cas précis,doivent compter au moins 50 travailleurs en service au 30 juin de l’année précédente), quant à eux, se trouvent dans l’obligation de respecter un quota de 3%.
Le rapport réalisé par le CCE et le CNT pointe néanmoins un changement important concernant le secteur privé, depuis le début 2004 : si avant cette date seulsles jeunes nouvellement occupés dans le cadre d’une CPE étaient pris en considération afin d’évaluer le respect des quotas, à l’heure actuelle tous les jeunes desmoins de 26 ans entrent en ligne de compte, en ce compris les jeunes travailleurs déjà en fonction. Néanmoins, s’ils veulent bénéficier de certains avantages commedes réductions de charges, les employeurs doivent toujours bien avoir 3 % de travailleurs sous CPE.
Premier point important du rapport CCE-CNT: toutes les branches de l’activité économique en Belgique enregistrent une baisse assez importante d’entreprises employant au moins 3 % dejeunes. Si le chiffre global était de 95,3 % en 2003, il ne s’élève plus qu’à 92,2 % en 2007. Parmi les secteurs les plus touchés, on retrouve notamment celui duprivé marchand qui passe de 95 % en 2003 à 91 % en 2007. Pour l’ensemble des entreprises privées de plus de 50 travailleurs, les jeunes représentent néanmoins quandmême 22,5 % de l’emploi.
Pour ce qui concerne les CPE, le rapport note que la plupart de celles-ci sont des contrats de travail ordinaires alors que d’autres formules comme un contrat d’apprentissage ou la combinaisonemploi à temps partiel/formation sont également possibles. Les femmes n’occupent que 34 % des CPE (un recul de 2 % par rapport à 2003), alors qu’on sait par ailleurs qu’ellesreprésentent 45 % des jeunes de 15-25 ans au travail…
Impossible d’évaluer l’efficacité
Mais ce qui marque le plus dans ce rapport, c’est l’absence d’évaluation de l’efficacité de la mesure « premier emploi ». En effet, selon le CCE et le CNT, il estimpossible à l’heure actuelle de déterminer combien de jeunes travailleurs embauchés sous une CPE s’intègrent durablement dans le monde du travail, même aprèsla disparition des incitants découlant de la mesure. Les deux organismes proposent dès lors de procéder à une analyse qui permettrait d’évaluer dans quelleproportion l’entrée sur le marché de l’emploi par le biais d’une CPE facilite l’accès à un emploi « classique ».
La Cour des comptes2 avait de son côté analysé le suivi et l’évaluation de cette politique. En avril 2008, elle constatait que « le SPF Emploin’a pas traduit cette politique en objectifs ou en indicateurs permettant d’en mesurer les effets » et également que « depuis 2004, l’obligation de recrutementn’est plus réellement contrôlée [par le SPF Emploi], même en cas de réduction des cotisations ». La Cour relève également quel’État n’a pas organisé non plus le suivi des obligations spécifiques incombant aux services publics (respect du quota, affectation prioritaire à des projetsglobaux en lien avec les besoins de société, etc.). Un comble.
1. Conseil central de l’économie (CCE) et Conseil national du travail (CNT) :
– adresse : av. de la Joyeuse entrée, 17-21 à 1040 Bruxelles
– tél. : 02 233 88 11
– site : www.ccecrb.fgov.be
2. Cour des comptes :
– adresse : rue de la Régence, 2 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 551 81 11
– site : www.ccrek.be