Ces 7 et 8 novembre, plusieurs agriculteurs et experts se sont réunis autour de la question de la succession des terres agricoles en Europe. À l’initiative de ces rencontres, Maarten Roels, de Terre-en-vue, qui facilite chez nous l’accès à la terre. Cette journée fut aussi l’occasion de présenter le projet TupperTerre, une plateforme lancée en 2015 pour faciliter la rencontre entre propriétaires et futurs fermiers.
Alter Échos: La question de la succession des terres agricoles est une réalité souvent rencontrée par les agriculteurs. Pourtant, il existe peu d’outils à leur disposition.
Maarten Roels: En effet. Quand Terre-en-vue a été sollicitée pour accompagner une ferme sur une question de succession, nous étions totalement démunis. C’était en 2012. On s’est rendu compte que c’était un sujet très complexe, tant juridiquement qu’administrativement. On a cherché un spécialiste en Belgique et on n’a trouvé personne pour répondre à nos interrogations. On s’est aussi aperçu qu’il n’y avait pas d’outils adaptés. Comme notre association fait partie d’un réseau européen pour faciliter l’accès à la terre, nous avions accès à d’autres partenaires à l’étranger qui rencontraient les mêmes difficultés. D’où ce séminaire pour réfléchir à cette problématique et aux bonnes pratiques à adopter pour améliorer la succession des fermes et des terres agricoles en Europe.
A.É.: Et il y a urgence…
M.R.: Oui, pour quatre agriculteurs qui arrêtent, il n’y en a qu’un qui s’installe en Belgique. L’âge moyen des agriculteurs en Belgique et en Europe est très élevé et tourne autour des 55 ans. Aujourd’hui, 45% des agriculteurs ont 65 ans et plus, tandis que seulement 5% ont moins de 35 ans. Il n’y a pas que le problème de la succession, il y a aussi le prix des terres, qui fait que l’agriculture familiale est de moins en moins attirante pour beaucoup de jeunes. Nous sommes à une étape charnière, liée à cette question de la succession. Si on ne fait rien, l’agriculture familiale sera démembrée. Avec un autre problème, d’ordre économique, c’est que les outils de travail (tracteurs, bâtiments…) y sont souvent très datés. C’est un frein pour beaucoup de jeunes. Pourtant, en Wallonie, il y a une conscientisation récente autour de cette problématique, du point de vue tant fiscal que social. Par exemple, grâce à Sowaccess (Société wallonne d’acquisitions et de cessions d’entreprises), il y a beaucoup d’avantages proposés pour reprendre une ferme, plutôt que de partir de rien. Hélas, ils sont trop peu connus.
A.É.: Quant aux outils, quels sont-ils?
M.R.: Par exemple, il y a moyen de créer une coopérative foncière, comme on l’a fait avec Terre-en-vue. Dans une ferme moyenne, au moment de l’arrêt de l’activité, on sépare généralement le bâtiment et le terrain parce que financièrement, pour beaucoup d’agriculteurs, il est très difficile de survivre sans vendre le bien qu’ils possèdent. C’est un scénario typique qui favorise des exploitations de plus en plus grandes. Ce qu’on veut montrer, c’est qu’il existe des structures qui permettent de financer l’acquisition des terres, qu’il y a moyen de créer une continuité et surtout d’offrir à l’agriculteur une pension décente. Le modèle d’une coopérative foncière permet aussi de maintenir une agriculture paysanne et biologique face au développement de l’agro-industrie.
A.É.: L’une de vos dernières idées présentées lors de ces journées, c’est TupperTerre. De quoi s’agit-il?
M.R.: Il est simple: mettre en contact des propriétaires et de futurs fermiers. C’est une plateforme de rencontres qui facilitera la succession et la transmission de terres et surtout un moyen pour créer une nouvelle dynamique pour une agriculture paysanne performante. Il existe un projet similaire aux Pays-Bas, ce qui nous permettra de combiner nos énergies autour de cette problématique.
Guide pratique en ligne sur le site de http://www.farmsuccession.eu.