Aux Pays-Bas, les conditions légales d’installation d’un slimme meter ont été définies dans une loi du 30 avril 2007, à la suite d’un rapport favorable de l’Institut néerlandais de Normalisation. L’année suivante, une nouvelle loi sur le marché du gaz et de l’électricité précisait les modalités d’installation, par exemple, le libre choix du consommateur ou l’obligation pour le fournisseur d’énergie de proposer un contrat écrit. L’objectif déclaré alors était la couverture totale du territoire néerlandais pour 2014. Depuis, tout a changé.
En 2011, après avoir revu leur copie, le Parlement et le Sénat ont lancé officiellement l’installation de compteurs intelligents. Mais cette couverture s’effectuera désormais de manière très progressive. Le site de l’administration publique néerlandaise1 déclare en effet que « pendant les deux premières années, les compteurs intelligents ne seront installés que si le compteur actuel doit être remplacé, lors d’une nouvelle construction ou d’une rénovation à grande échelle […] » ou en cas de demande par les consommateurs eux-mêmes.
Cette installation « à petite échelle » durera jusqu’en fin 2013. Le gouvernement procédera à l’évaluation de l’expérience et décidera de la suite à y donner.
Une opposition croissante à l’installation des slimme meters
Pourquoi le programme ambitieux de départ a-t-il cédé la place à une modeste « installation à petite échelle » ? C’est qu’entre-temps, une opposition de plus en plus forte s’est fait jour aux Pays-Bas.
Dès 2008, en pleine euphorie sur la nouvelle loi concernant le gaz et l’électricité, l’association des consommateurs publiait un rapport2 qui laisse peu de place au doute quant au caractère intrusif du dispositif. Le respect de la vie privée, déclare ce rapport, consiste en « protection de l’habitation, du corps, des communications confidentielles, de la vie intime et familiale, ainsi qu’en la préservation des données privées. Ce dernier aspect est protégé par la loi sur la Protection des données privées qui, dans les discussions néerlandaises sur le compteur intelligent, apparaît comme central. »
Pour l’association, le compteur intelligent va à l’encontre de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme dans ses trois dimensions : protection de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance.
Ce qui était mis en cause, c’était non seulement l’obligation d’accepter un compteur intelligent – ce que la loi a modifié depuis. C’était aussi la mesure quart d’heure par quart d’heure de la consommation d’électricité et par heure de celle du gaz.
Pour l’association, la délivrance régulière de données personnelles à un tiers – le fournisseur d’énergie – est totalement disproportionnée face à l’économie d’énergie supposée et surtout, totalement inutile dans une société démocratique. Le rapport souligne que des alternatives – comme l’envoi de données statistiques anonymes, par exemple – n’ont pas été suffisamment explorées.
Depuis, de nombreux sites dénoncent également le risque potentiel de ces dispositifs, tel « wij vertrouwen slimme meters niet »3 (nous ne faisons pas confiance aux compteurs intelligents) qui arbore le logo : « Slimme meter = slinks weten » (compteur intelligent = savoir sournois). Celui-ci s’est livré à une revue de presse parlante : « Marre de l’électronique intelligente. Le seul produit bon marché, ce sont les mensonges. » (Telegraaf) « Objectif des compteurs intelligents : sûrement pas l’économie d’énergie » (Vrijbit : article qui dénonce l’utilisation des compteurs afin de définir le profil du consommateur et de lui offrir le service le plus rentable pour le fournisseur). Etc.
Les compteurs sont sans doute plus simples à installer que la confiance du consommateur…