Les étudiants, futurs professionnels du social ou travailleurs sociaux en reprise d’études, ont décliné – durant l’automne et l’hiver 2019-2020 – plusieurs sujets, des dossiers bien connus analysés sous des angles qui le sont moins, mais aussi des problématiques qui passent habituellement sous les radars.
On découvrira notamment une analyse sur le profilage ethnique, une pratique illégale au regard du droit mais courante. Et même assumée? Les récentes actualités ne nous diront pas le contraire. «Quelle est la limite entre mesures de sécurité et abus de pouvoir?», interrogent les étudiants auteurs de cet article. «C’est toi qui sens la situation ou le danger», leur déclare M., policier dans la Région de Bruxelles-Capitale depuis plus de 16 ans. Mais pour Chaïma El Yahyaoui, criminologue (et membre de notre équipe), à tout moment, le policier va pouvoir se justifier en disant: «Je me sentais en danger, et comment sur le moment aurais-je pu objectivement l’évaluer?»
Des mécanismes similaires sont identifiables dans les discriminations à l’embauche. Si la législation est claire – et interdit la discrimination à l’embauche sur la base de plusieurs critères –, les employeurs font des demandes discriminatoires, «parfois même sans s’en rendre compte». De quelle nationalité êtes-vous? Pensez-vous pouvoir vous intégrer avec les autres «cultures» de l’entreprise? Pourriez-vous vous adapter à la culture belge? Pourriez-vous retirer votre voile pour ce poste?… Voilà les questions que Samira a entendues lors de son entretien d’embauche. Les personnes discriminées ne portent pas toujours plainte. Samira, qui connaît pourtant l’existence d’Unia, avoue qu’elle n’a pas porté plainte par «manque de confiance»: «Je me suis dit: ‘Oui, de toute façon les entreprises privées sont protégées, elles font ce qu’elles veulent. Ce n’est pas du public; du coup, même si je porte plainte, ça n’aurait pas de grande conséquence’.»
Autre sujet emblématique dans cette thématique – et très présent dans l’actualité sociale «covidienne»: la prostitution, «qui flirte entre légalité et illégalité», univers flou émaillé de fraudes sociales, évasions fiscales, blanchiment d’argent, risques sanitaires, insécurité…
Les étudiants passent aussi à la loupe le dispositif DASPA, visant à assurer l’accueil, l’orientation et l’insertion de l’élève primo-arrivant dans l’enseignement ordinaire, fondamental et secondaire. «Intégration réussie ou reproduction des violences symboliques vers la relégation sociale?», interroge l’article. «Pour ces enfants au contexte familial chahuté, les indicateurs de compétences cognitives et les prérequis pédagogiques utilisés lors des tests d’évaluation et d’orientation sont souvent bien trop éloignés de la réalité de ces jeunes. […] Cet écart est alors trop souvent à l’origine d’orientations inadéquates en enseignement professionnel ou en spécialisé», lit-on dans l’article.
Faut-il parfois flirter avec l’illégalité pour garantir des politiques sociales? Pour certains médecins de plannings familiaux, la réponse est oui. «Ils assument et revendiquent l’importance de pouvoir, parfois, flirter avec les limites de la loi. Un seul but: soutenir la femme dans ses choix et diminuer la souffrance liée à cet acte encore trop stigmatisé dans notre société», apprend-on dans un article sur «l’avortement après 12 semaines». De petits arrangements pour le meilleur. Et parfois pour le pire comme quand des acteurs des titres-services s’arrangent pour passer outre aux politiques publiques mises en place et obtenir quelques avantages en toute illégalité…