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Regard critique · Justice sociale

Structurer l’aide d'urgence aux sans-abri, on y arrive ?

L’idée d’un service d’urgence d’aide aux sans-abri, commun aux dix-neuf communes de Bruxelles-Capitale, a resurgi. Faute de volonté politique, la Région ne se dotera pasencore d’un outil structurel pour affronter une problématique qui l’est tout autant.

28-11-2011 Alter Échos n° 328

Un service d’urgence public commun aux dix-neuf communes de la Région de Bruxelles-Capitale ? Nous n’y sommes pas encore. Et pourtant…

L’idée avait été proposée par Yvan Mayeur (PS)1, président du CPAS de Bruxelles-Ville, à ses dix-huit homologues de la Région.L’« Association chapitre XII »2 porte sur la mise en place d’un dispositif public d’urgence, commun à l’ensemble de la Région bruxelloise, permettantde venir en aide aux sans-abri.

Si cet outil avait été accepté par les dix-neuf communes, il n’a pourtant jamais vu le jour. « Les autres CPAS ont freiné des quatre fers »,regrette l’initiateur du projet, par ailleurs directeur du Samu social3 chargé de mettre en œuvre le plan hivernal. « La participation a un coût qu’ilsn’étaient pas prêts à payer. Pourtant, l’action sociale sans dépenses, ça n’existe pas ! », raille-t-il. La volonté d’impliquerl’ensemble des acteurs est partagée par Laurent Hoorebeke, directeur de La Strada4, ce centre d’appui d’aide au secteur bruxellois des sans-abri, public comme associatif.« Un outil commun et public gagnerait en efficacité et en cohérence et rendrait plus claire une architecture d’aide qui l’est peu », argue-t-il.

Dont acte. Bruxelles-Ville y est donc allée seule. Le 15 novembre dernier, dans le cadre du plan hivernal, elle mettait un bâtiment tout juste acquis, et fraîchement, maispartiellement rénové, à disposition du Samu social. Yvan Mayeur y voit les prémisses d’une réponse structurelle à la problématique del’hébergement, une « manière de pérenniser l’action ». « Ces 400 places venant s’ajouter aux cent quarante déjà existantes aucentre permanent du Samu devraient nous permettre d’accueillir positivement toutes les demandes », se réjouissait-il. Avant de déchanter.

Aussi pour les demandeurs d’asile

Et pour cause : l’accueil ne se limite pas aux sans-abri. Il s’étend à un autre public fragilisé : les demandeurs d’asile. « Bruxelles-Capitale estsaturée de personnes « non désignées », tonne Yvan Mayeur. Pourtant sous la responsabilité de l’État fédéral, elles ne sont pas accueillies parFedasil5 ». Selon les chiffres de septembre et d’octobre, ils seraient 2 000 à venir de facto grossir les rangs des sans-abri. La pression est alors renforcéesur les structures existantes. « Si l’outil envisagé ne traitait que les situations d’urgence d’accueil des sans-abri, en première ligne, il prendrait tout son sens, expliqueLaurent Hoorebeke. Le problème, c’est qu’il n’y a pas de solution structurelle. »

Il existe en outre à Bruxelles un réseau associatif dédié aux sans-abri. Laurent Hoorebeke ajoute cette composante à l’édifice commun.« Il serait insensé de ne pas intégrer le Samu ou Médecin du Monde à la démarche », disait d’ailleurs Yvan Mayeur, sans insister surl’importance d’une concertation avec l’ensemble du secteur privé. Les acteurs sont nombreux, les thématiques et compétences interconnectées et les niveaux depouvoirs impliqués multiples. Faut-il dès lors tous les associer à la démarche ? Cette idée est revendiquée par Pierre Verbeeren6, directeurde Médecin du Monde Belgique. « Devant le problème structurel des sans-abri, des demandeurs d’asile, du logement, de la santé mentale, il est nécessaire que lesdécideurs de tous les niveaux de pouvoir se mettent autour de la table et abordent ces éléments de manière pluridisciplinaire », dit-il. La Strada prônele travail en amont pour palier les manques, sans quoi « démultiplier les places d’urgence ne règlerait rien. »

L’hiver est à nos portes et le nombre de demandes va croissant, laissant des centaines de sans-abri sur le carreau. Surprise ou défaut de prévoyance ?« L’hiver tombe tous les ans en… hiver, résumait Pierre Verbeeren, amer. Il est donc nécessaire de redéfinir ce qu’est réellement l’urgence. »Et d’apporter une réponse durable et concertée à la problématique du sans-abrisme, au sens large.

1. Yvan Mayeur, Cpas de Bruxelles-Ville :
– adresse : rue Haute, 298 A à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 543 60 22
– courriel : yvan.mayeur@proximus.be
– site : www.yvanmayeur.be
2. L’appellation fait référence au chapitre de la Loi du 8 juillet 1976 régissant les Cpas.
3. Samu social :
– adresse : rue du petit Rempart, 5 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 551 12 20
– site : www.samusocial.be
4. La Strada :
– adresse : avenue Louise, 183 à 1050 Bruxelles
– tél. : 02 880 86 89
– site : www.lstb.be
5. Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile (fedasil) :
– adressse : rue des Chartreux, 21 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 213 44 11
– courriel : info@fedasil.be
– site : www.fedasil.be
6. Médecins du Monde :
– adresse : rue de l’Eclipse, 6 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 648 69 99
– courriel : info@medecinsdumonde.be
– site : www.medecinsdumonde.be

Valentine Van Vyve

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