« Le non-paiement de ces subsides va non seulement mettre un arrêt immédiat à tous les engagements programmés mais aussi provoquer des licenciements vul’impossibilité financière pour les CPAS d’assumer sur fonds propres et sans préavis le défaut total de prévoyance du ministre wallon des Affairessociales et de la Santé, Thierry Detienne ». L’attaque est directe, elle vient de la Fédération des CPAS de l’Union des villes et communes1. En cause,l’épuisement du budget consacré aux subventions accordées aux CPAS wallons dans le cadre de l’intégration professionnelle. Pour rappel, conformémentà la loi de 1998, les CPAS bénéficient d’une subvention régionale de 223 euros par mois2 pendant une période maximale de 18 mois pour toute mise au travaillorsqu’ils engagent des allocataires dans le cadre du contrat « article 60 § 7 » et « article 61 » de la loi organique des CPAS.
Selon la fédération, le trou à combler pour 2003 serait de 2,5 millions d’euros. Ce subside régional représente une part importante des subventions que lesCPAS reçoivent dans le cadre de la mise au travail des personnes (outre les 223 euros de la Région wallonne, ils reçoivent également 778,21 euros/emploi duFédéral). « Les CPAS des petites communes vont freiner les engagements, voire licencier certaines personnes, avance Claude Emonts, président de la Fédérationdes CPAS et président du CPAS de Liège. Les CPAS des grandes villes sont contraints par la convention grande ville de poursuivre ces engagements avec pour résultat une asphyxiefinancière pour l’institution et, indirectement, les communes. Pour une commune comme la mienne (ndlr : Liège) sous plan d’assainissement, comment va-t-elle réagir,vous croyez, si je lui dis qu’il manque 450 000 euros pour la politique d’insertion du CPAS. Ca représente 45 emplois en moins ! »
Un nombre d’art. 60 et 61 en constante augmentation
Pour 2003, on estime à 4 200, le nombre de personnes qui bénéficient des mesures art. 60 et 61, soit deux fois plus qu’en 2001. « Nous avons interpelléà deux reprises M. Detienne sur l’insuffisance du budget prévu, poursuit Claude Emonts (ndlr : le 18/12/02 et en février 2003), interpellations restées sansréponse, puis nous recevons ce courrier daté du 10 septembre 2003 où le ministre Detienne précise que lors de l’ajustement budgétaire, il a demandé uneaugmentation de 2,5 millions d’euros en moyens d’action et 1,532 million d’euros en moyens de paiement par un glissement de moyens non consommés cette année eninfrastructure. Il nous déclare toujours dans cette lettre que son collègue, Michel Daerden, ministre du Budget, a fait une lecture restrictive de la circulaire budgétaire et quedès lors, l’opération demandée n’a pu se réaliser et comme le budget est épuisé, il devra “limiter en 2003 l’octroi de subventions enfonction du budget disponible”. Pourtant, nous avons reçu une lettre du ministre Daerden datée du 19 septembre qui ne semble pas corroborer les dires du ministre Detienne…»
La lettre du ministre Daerden dit en substance ceci :
> le projet d’ajustement budgétaire a été approuvé collégialement par le gouvernement wallon et donc par le ministre Detienne ;
> il n’a fait en tant que ministre du Budget que respecter et assumer cette décision ;
> la circulaire budgétaire relative à l’ajustement a elle aussi été approuvée collégialement par le gouvernement wallon et donc par le ministreDetienne ;
> il apparaît que le ministre Detienne n’a pas jugé le thème des contrats article 60 suffisamment prioritaire pour effectuer les arbitrages nécessaires au seinde son budget (sic).
Réponse du berger à la bergère…
Dans sa lettre datée du 10 septembre, le ministre Detienne se dit également surpris de la croissance importante des demandes car, « contrairement à ce que laissaientprévoir les mesures fédérales pour l’emploi, les CPAS ont choisi de multiplier les mises à l’emploi via les article 60 et 61 ». Une déclarationque ne comprend pas la Fédération des CPAS : « Tous les indicateurs mettent en évidence au contraire que les CPAS allaient utiliser de plus en plus de manièreimportante cette mesure, s’indigne Claude Emonts. Pour exemple, la nouvelle loi sur le droit à l’intégration sociale entrée en vigueur le 1er octobre 2002 metfortement l’accent sur l’insertion professionnelle, le renforcement du programme Printemps qui vise à réduire le nombre de personnes émargeant au CPAS, lesconventions ‘grandes villes’qui se concentrent également sur l’insertion professionnelle des bénéficiaires, les incitants du ministre Vande Lanotte,renforcés par un soutien régional de l’ex-ministre wallonne de l’Emploi en matière d’économie sociale et de création d’ateliersd’économie sociale dans les CPAS. »
…ou bagarre de chiffonniers sur les chiffres
Du côté du cabinet Detienne3, on rappelle que « le maintien du soutien financier aux CPAS – qui n’existe pas en Région bruxelloise – reste dans lespriorités du ministre qui reconnaît aux articles 60 et à l’ensemble des initiatives d’insertion professionnelle toute leur utilité dans le large processus deréinsertion d’une personne. » On rappelle également que le budget alloué à ce dispositif est difficilement maîtrisable car la Région wallonne nepeut évaluer précisément la manière dont le processus va être activé. « Depuis 1999, le gouvernement a chaque année procédéà un réajustement du budget estimé en fonction de la réalité. Le budget global alloué par la Région wallonne aux CPAS pour l’ensemble de leursinitiatives est en augmentation de 30 %. Dans ce contexte, contrairement à ce que dit la Fédération des CPAS, les subsides destinés aux article 60 n’ont subi aucunebaisse depuis 1999. La Région wallonne soutient proportionnellement largement l’insertion professionnelle puisque celle-ci est subventionnée à hauteur de 5 millionsd’euros contre 400 000 euros pour l’insertion sociale. » Le ministre s’engageait, en outre, dans un communiqué de presse datant du 24 septembre 2003 à ce quedès 2004, des moyens suffisants permettent de couvrir le coût des nouveaux articles 60. Dans un nouveau communiqué datant du 2 octobre, Thierry Detienne se réjouissaitqu’une solution ait pu être trouvée au sein du gouvernement wallon. « À la suite d’une négociation avec le cabinet du ministre du Budget, une solutiontechnique initialement proposée par le ministre Thierry Detienne a finalement pu être adoptée. Dès lors, un complément de budget réservé aux articles60 sera octroyé après le vote de l’ajustement budgétaire. » Un complément qui se monte à 1,5 million d’euros, soit 1 million d’euros enmoins que ce que demandait la Fédération.
Du côté de celle-ci, on se félicite de ce réajustement, mais on reste prudent. Christophe Ernotte, directeur général de la Fédération,contacté ce 6 octobre, déclarait en effet n’avoir encore reçu aucune confirmation écrite de cet ajustement ni de son montant.
À la lecture du tableau ci-dessus, on constate aisément que les budgets ajustés sont en constante augmentation, comme d’ailleurs le nombre d’articles 60 et 61alors que les budgets initiaux sont eux en constante diminution avec un sérieux ajustement nécessaire pour 2003 puisqu’il manque, selon la Fédération des CPAS, pasmoins de 2,5 millions d’euros au budget initial pour arriver à couvrir toutes les primes à payer. Par contre, lorsqu’on observe la colonne des moyens de paiement,c’est-à-dire ce qui est réellement payé aux CPAS sur la base de leurs demandes de remboursement auprès de l’administration, celle-ci n’est pas enconstante augmentation, on passe en effet de 5 702 000 euros en 1999 à 5 382 000 euros pour 2002, or, on l’a vu, le nombre d’articles 60 et 61 est en constante augmentation,certains CPAS omettraient-ils de réclamer leur subvention ?
1. Union des villes et communes, asbl, rue de l’Étoile, 14 à 5000 Namur, tél. : 081 24 06 50, fax : 081 24 06 52,
courriel : federation.cpas@uvcw.be, site : http://www.uvcw.be/cpas
2. Montant unique depuis un arrêté d’octobre 2002, auparavant le montant était différent selon le statut du minimexé.
3. Cabinet Detienne, rue des brigades d’Irlande, 4 à 5100 Jambes, tél. : 081 32 34 11,
fax : 081 32 34 29, courriel : thierry.detienne@gov.wallonie.be