Le 16 janvier 2013, le projet-pilote de sevrage liégeois Tadam1 arrivait à son terme. Il consistait à délivrer de l’héroïne sous contrôle médical à des personnes dépendantes depuis cinq ans au moins et ayant échoué au traitement de sevrage de substitution par méthadone. Avec l’arrêt du projet, certains travailleurs sont déjà partis, d’autres prestent jusqu’au bout leur préavis. L’évaluation est attendue pour juillet. Mais le projet reprendra-t-il ?
Tadam a duré deux ans. Il couvrait l’arrondissement judiciaire de Liège. S’inspirant d’une expérience suisse, ce centre délivrait de l’héroïne sous contrôle médical à des personnes dépendantes. Tirées au sort, ces dernières acceptaient d’entrer dans un processus de 12 mois. Pour vérifier l’efficacité du traitement, un groupe contrôle, soigné à la méthadone, a été constitué. Le projet était financé à hauteur d’un million d’euros par an par le SPF Santé publique (fédéral) – le plus gros du budget –, la Ville de Liège et la Région wallonne – qui y consacre 100 000 euros par an.
Il y a un an, tous les acteurs espéraient que le projet serait reconduit. Mais le fédéral tend aujourd’hui à se retirer de nombre de projets-pilotes (ex. : Phénix, Article 23, Trempoline). Une déception pour les responsables de Tadam, mais aussi pour les riverains. « A la fermeture du centre, les riverains ont été déçus de la fin du projet pour l’équipe, mais aussi par rapport aux patients », raconte Marylène Tommaso, infirmière responsable de Tadam. Les membres du personnel ont reçu leur préavis, qu’ils ont presté jusqu’au 31 janvier. Elle-même partira le 1er mai. Les derniers membres du personnel seront là jusqu’à la mi-juillet au plus tard. Quant aux patients, ils n’ont pas été laissés livrés à eux-mêmes, s’empresse de préciser Marylène Tommaso. « Nous avons toujours eu une attitude respectueuse avec le patient. Au niveau de notre philosophie, on a toujours mis un point d’honneur à travailler le lien avec le patient. On a travaillé avec neuf autres centres partenaires pour prendre le relais, assurer la continuité des soins. »
Une expérience positive
Pour Marylène Tommaso, l’expérience a été très riche. « Au point de vue humain, on a rencontré des patients avec des histoires touchantes. Certains sont parfois arrivés dans un état de délabrement physique et mental et, au fil du temps, ils ont changé. On a pu réinscrire des gens dans le réseau médical. Certains ont bien sûr plus de ressources pour reprendre pied plus vite. Pour les autres, un an, c’est trop court. On a eu toutes sortes de publics : des SDF, un ancien avocat, une mère de famille en couple, une prostituée… Tous ont évolué. On leur demandait aussi d’être impliqués au niveau de Tadam. » Les retombées ne sont pas limitées aux usagers du centre : « Il y a eu aussi une perception positive de la part des riverains, des autres acteurs des soins de santé… Les riverains ont vu évoluer le centre. La police aussi. »
Interrogée sur une possible reprise du projet par la Région, la ministre wallonne de la Santé, Eliane Tillieux (PS), s’est montrée prudente : « Nous attendons les résultats de l’évaluation du projet pour savoir si cela vaut la peine de poursuivre l’expérience. Tout dépendra des avancées, de l’efficacité du projet. Les médecins ne sont pas unanimes. Est-ce que cela touche tout le monde ? Combien de personnes s’en sont sorties ? Combien de personnes ont été touchées ? Pour combien de succès ? Combien d’échecs ? » Autant de questions pour lesquelles les réponses ne seront connues qu’en juillet.
1. Fondation Tadam :
– adresse : boulevard Piercot, 2 à 4000 Liège
– tél. : 04 220 65 20
– courriel : info.tadam@skynet.be
Aller plus loin
Alter Echos n° 334 du 16.03.2012 : https://www.alterechos.be/index.php?p=sum&c=a&n=334&l=1&d=i&art_id=22208 Les rails trop courts du train de l’héroïne