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Regard critique · Justice sociale

Tous unis pour les droits de l'enfant !

Les acteurs de défense des droits de l’enfant ont fait front commun, le 1er février, devant le Comité des Nations unies pour les droits de l’enfant.

14-02-2010 Alter Échos n° 289

Les acteurs de défense des droits de l’enfant se sont répartis la parole devant les membres du Comité des Nations unies pour les droits de l’enfant. La situation qu’ilsdécrivent est préoccupante, notamment lorsqu’on aborde les problèmes de pauvreté infantile, la participation des enfants, les enfants migrants ou la justice pourmineurs.

Pour la première fois en Belgique, toutes les organisations de défense des droits de l’enfant se sont exprimées ensemble lors de la pré-session du Comité desdroits de l’enfant des Nations unies, le 1er février. Le délégué général aux droits de l’enfant et son homologue flamand, la Coordination des ONGpour les droits de l’enfant (Code)1, la Kinderrechtencoalitie Vlaanderen, le Conseil de la jeunesse, la Vlaamse Jeugdraad et l’Unicef Belgique2 ont fait le voyage ensembleà Genève et ont décidé d’insister sur leurs convergences, de souligner les urgences en matière de droits de l’enfant.

Toutes ces organisations, appliquées à la préparation de leurs rapports alternatifs à l’attention du Comité, ont vite remarqué que leurs constatations etsujets d’inquiétude se recoupaient. Elles ont donc décidé de parler d’une seule voix, de montrer leur unité, ce qui, selon Frédérique Van Houcke,coordinatrice de la Code, « a été fort apprécié par les membres du Comité ». Les différentes organisations se sont partagé laparole sur les six thèmes suivants : violence à l’encontre des mineurs nationaux et étrangers, pauvreté infantile, santé et bien-être, justice desmineurs, promotion de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant et participation des enfants.

Rappeler à l’État belge ses obligations

L’enjeu n’est pas dénué d’importance car les observations finales du Comité et ses recommandations, même si elles ne sont pas directement contraignantes, permettent derappeler au bon souvenir de l’État belge ses obligations dans le domaine des droits de l’enfant. De son côté, la Belgique, via la toute jeune Commission nationale des droits del’enfant, exprimera sa position officielle devant le Comité au mois de mai, sur la base de son copieux rapport périodique déjà envoyé àGenève3. Ce document de plus de 200 pages détaille toutes les initiatives prises en Belgique afin d’appliquer la Convention. La création d’une telle Commission, en2007, est en soi une évolution notable de ces dernières années, née d’une recommandation du Comité. Son principal rôle est de rédiger le rapportpériodique de la Belgique, en concertation avec les gouvernements et les acteurs des droits de l’enfant, elle doit aussi s’atteler à la tâche de collecte des données. Si lacréation de cette Commission a été bienvenue, la Code souligne le manque d’autonomie propre de cette Commission au sein de laquelle les représentants d’ONG sontassociés aux travaux mais n’ont pas de voix délibérative, contrairement aux représentants des ministres. Entre ces deux visions des droits de l’enfant, le Comitégenevois tranchera.

Le système des rapports soumis au Comité des droits de l’enfant à Genève

La Convention internationale des droits de l’enfant (Cide) a permis de créer un Comité des droits de l’enfant chargé « d’examiner les progrès accomplis parles États parties dans l’exécution des obligations contractées par eux. » Afin d’évaluer ces progrès, les États parties doivent remettre tous lescinq ans un rapport périodique au Comité des droits de l’homme.

Une fois le rapport périodique remis au Comité, ce dernier écoute, lors d’une « pré-session », différentes ONG ou « institutionsspécialisées » comme l’Unicef qui profitent de l’occasion pour remettre des rapports « alternatifs ».
Enfin, les représentants de l’État sont invités à répondre à différentes questions lors d’une « session » du Comité desdroits de l’enfant. Le Comité, à partir de ces différentes sources d’information, publiera ses observations finales composées de recommandations adressées auxÉtats.

Justice juvénile : une logique de sanction qui s’impose peu à peu

Des jeunes qui expriment leur malaise en IPPJ, des enfants en psychiatrie qui n’ont aucune idée de l’utilité des médicaments qu’ils ingèrent, des Menas perturbésd’évoluer dans des centres d’accueil pour adultes, tels sont quelques exemples du film projeté à Genève dans le cadre du projet « What do you think? », réalisé par l’Unicef. Faire participer les enfants, leur offrir un canal d’expression, particulièrement aux plus vulnérables, est un maillon original dansla chaîne des droits de l’enfant, car « il existe peu de structures de participation des enfants », affirme Maud Dominicy d’Unicef Belgique. Grâce à ce film,qui accompagne un rapport truffé de recommandations, les enfants ont pu entrer dans la cour des grands et faire entendre leur voix. Ces recommandations abordent, entre autres,l’égalité des chances, le droit de jouer, la volonté de participer aux décisions, les enfants vulnérables limités dans l’exercice de certains droits… brefdes thèmes très proches de ceux abordés par les adultes.

Impossible de dresser la liste exhaustive des sujets d’inquiétude de l’ensemble de ces organisations. La pauvreté, comme facteur d’érosion de tous les droits aété largement abordée devant le Comité des droits de l’enfant, les difficultés rencontrées par les enfants migrants ont aussi fait l’objet d’une attentionspécifique ainsi que les enfants victimes de violence. Mais lorsqu’on demande à ces organisations dans quel domaine la situation s’est aggravée depuis le dernier rapportpériodique de la Belgique, en 2002, la réponse fuse, en écho avec l’actualité récente : « la justice juvénile ». Manuel Lambert,président de la Code, estime que l’observation du Comité des droits de l’enfant de 2002 peut être reprise telle quelle. Il y a cinq ans, le Comité rappelait à laBelgique que la privation de liberté « ne constitue qu’une mesure de dernier ressort » et qu’en aucun cas, les personnes âgées de moins de 18 ans ne peuventêtre jugées comme des adultes. Le Comité exprimait aussi ses préoccupations quant au « fait que l’État partie n’a pas suffisamment pris en compte l’approcheglobale du problème de la délinquance des mineurs (…) y compris en ce qui concerne la prévention, les procédures et les sanctions. »

Dessaisissements en hausse

Depuis 2002, malgré une réfo
rme de la loi sur la protection de l’Aide à la jeunesse qui était censée rendre plus strictes les conditions du dessaisissement– qui consiste à soustraire un jeune de plus de 16 ans à la justice pour mineurs afin de le juger comme un adulte – le nombre de ces dessaisissements n’a cessé decroître, tout comme le nombre d’enfermements à Everberg ou en IPPJ. C’est en tout cas ce qu’affirme Manuel Lambert, estimant que la logique de sanction s’impose peu à peu faceà la logique de protection de l’enfance, comme en témoigne l’accord de novembre 2008 entre le gouvernement fédéral et les trois communautés, qui a fixé commeobjectif la création de nouvelles places fermées à l’horizon 2012.

Sur la question du dessaisissement, la position de la Belgique, à travers son rapport périodique est de qualifier cette pratique de « recours ultime », ou de« possibilité exceptionnelle », soulignant, s’il en était besoin, l’écart qui règne entre la Commission nationale des droits de l’enfant et lesorganisations de défense des droits de l’enfant.

Au mois de juin, le Comité rendra son avis sur le respect, ou non, par la Belgique de ses obligations en matière de droits de l’enfant. Quant au suivi de ces recommandations parl’État belge, rendez-vous est pris, dans cinq ans à Genève, lors de la prochaine session du Comité des droits de l’enfant.

1. Coordination des ONG pour les droits de l’enfant :
– adresse : rue du Marché aux Poulets, 30 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 223 75 00
– courriel : info@lacode.be
– site : www.lacode.be
2. Unicef Belgique:
– adresse : route de Lennik, 451 à 1070 Bruxelles
– tél. : 02 230 59 70
– courriel : info@unicef.be
– site : www.unicef.be
3. Le Troisième rapport périodique de la Belgique concernant la convention internationale relative aux droits de l’enfant peut-être consulté sur le site de laCommission nationale des droits de l’enfant : www.cnde.be/fr/(…)

Cédric Vallet

Cédric Vallet

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