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Regard critique · Justice sociale

Logement

Troubles psychiatriques et logement : pas facile de faire son nid !

Dans le Brabant wallon, le nouveau projet « Alodgî » veut offrir un habitat solidaire à des personnes souffrant d’une maladie psychiatrique chronique.

18-12-2011 Alter Échos n° 329

Quand on souffre de troubles mentaux, il n’est pas toujours évident de trouver un logement adapté. Dans le Brabant wallon, le nouveau projet « Alodgî »veut offrir un habitat solidaire à des personnes souffrant d’une maladie psychiatrique chronique.

Maladie mentale et stabilité dans le logement ne font pas toujours bon ménage. C’est un des constats établis par les partenaires du sous-programme Interreg IVFrance-Wallonie1 lors de la réflexion menée en 2010 sur la précarité et la santé mentale (voir Alter Echos 311 du 7/3/2011 : « Santémentale et logement : sortir des murs »). « Les produits « logement adapté » ne sont pas véritablement « adaptés » à deuxphénomènes dont la montée en puissance est évidente, lit-on dans le livret2 qui clôture ces réflexions : l’élargissement de laprécarité voire des précarités ainsi que l’évolution des situations personnelles. »

Benoît Van Tichelen, directeur administratif du service de santé mentale et du service de soins psychiatriques à domicile Entre Mots3 à Ottignies, corroboreces propos. « Ce qui ressort des rencontres avec nos patients, dit-il, c’est que quand ils vont mieux, ils n’arrivent pas à se loger dans le coin pour des raisonsfinancières. Alors ils bougent vers Bruxelles ou le Hainaut, ils quittent leur tissu social, familial et médical. Il arrive qu’on les retrouve deux ans plus tard vial’hospitalisation. » Il manque aussi de places dans les structures intermédiaires en psychiatrie telles que les habitations protégées, poursuit-il :« Aujourd’hui, dans les politiques de soin, on pousse de plus en plus le patient à regagner sa communauté locale, mais il n’y a pas assez de places. Comme les gens quipourraient vivre chez eux en continuant à suivre leurs consultations n’ont pas accès au logement, ils restent dans ces structures intermédiaires et bloquent l’accèsà d’autres qui en auraient besoin. »

Un projet de logement alternatif

D’où la nécessité d’imaginer pour ces personnes dites « stabilisées » de nouvelles formules qui ne soient pas des structures de soin, mais deslogements adaptés. Il s’agit de penser ces habitats pour qu’ils rencontrent divers besoins d’encadrement, d’ouverture vers l’extérieur… tout en prenant en compte les réseauxautour de ces personnes et leurs familles.

S’appuyant sur une petite enquête menée auprès de leurs patients, les soignants d’Entre Mots, en collaboration avec Similes Brabant wallon4, ont imaginé unhabitat solidaire à destination d’adultes avec une pathologie psychiatrique stabilisée. Le projet porte le nom d’Alodgî et une fondation du même nom a étécréée pour le gérer. L’idée est d’offrir un logement digne, accessible et à faible consommation énergétique, d’une durée àdéterminer avec le bénéficiaire (en cas de location) et conditionné par la poursuite d’une prise en charge ambulatoire. Il s’agirait d’une forme d’habitat groupé,entre logement collectif et logement individuel : des appartements individuels avec un espace communautaire, conjugués avec un encadrement léger. « L’idéal estque quelqu’un assure le rôle de veilleur, passe voir deux ou trois fois par semaine si tout va bien », explique Benoît Van Tichelen.

Le projet repose sur un partenariat entre la clinique Saint-Pierre d’Ottignies (dont dépend Entre Mots), l’asbl Prévoyance et Santé, l’agence immobilière sociale (AIS),les associations Similes et Psytoyen. La province a également proposé de réserver au projet des logements actuellement en construction à Gastuche et d’autres àOttignies (sous réserve d’obtention du permis de bâtir). « C’est l’hypothèse la plus confortable, mais cela nous excitait aussi d’avoir un bâtiment à nous,s’enthousiasme Benoît Van Tichelen. Je suis tombé sur une ancienne étude de notaire dans le centre d’Ottignies où il est possible de rénover onze appartements enplus d’un rez communautaire. » Une partie des logements sera louée au montant maximal d’un tiers des revenus et mise en gestion à l’AIS. Une autre partie sera mise en ventesous le modèle des Community Land Trust (la propriété foncière est séparée de la propriété du logement), la Fondation Alodgî resterapropriétaire du terrain et les occupants, locataires ou propriétaires, seront soumis au règlement d’ordre intérieur de la Fondation.

1. Habitat et Participation asbl et Relogeas asbl en Wallonie, PACT Métropole Nord et l’Association régionale d’étude et d’action sociale auprès des gens du voyage ducôté français.
2. http://www.accompagnement-social.eu
3. Entre Mots :
– adresse : rue des Fusillés, 18 à 1340 Ottignies
– tél. : 010 43 50 10
– fax : 010 41 88 78.
4. Similes Brabant wallon, Fédération des associations des familles et amis des personnes souffrant de troubles psychiques :
– Rue du Bauloy, 53 à 1340 Ottignies
– tél. : 010 41 01 58.

Marinette Mormont

Marinette Mormont

Journaliste (social, santé, logement)

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