L’UPEDI1 a publié le 23 avril son rapport annuel 1997. Elle insiste sur le « rôle social ‘naturel’ inhérent au développement économique de l’activité dusecteur » du travail intérimaire.
Elle propose en annexe à ce rapport les résultats d’un sondage réalisé par la firme Sobemap. Son but est de cerner le profil et le parcours des personnes qui ont en 1997presté une ou plusieurs missions d’intérim. Les données récoltées sont systématiquement comparées à la population active occupée. Eneffet, il n’existait pas jusqu’ici de données statistiques sur ces questions. Grâce à ces chiffres et à ces comparaisons, I’UPEDI entend approfondir les arguments de lacampagne par laquelle elle cherche la reconnaissance de son rôle social.
Voici quelques chiffres significatifs. Nous préférons – puisque c’est l’effet réinsérant de l’intérim qu’il s’agit, nous dit-on, d’étayer – comparer lesrésultats du sondage à la population active non employée : soit les statistiques connues sur les « chômeurs complets indemnisés demandeurs d’emploi ».
1997
actifs
intérimaires2
CCI DE3
Sexe
Hommes
59%
58%
42,9%
Femmes
41%
42%
57,1%
Age
– de 25 ans
13%
35%
19%
25 ans et +
77%
65%
81%
Origine4
1 ou 2 parents étrangers
–
16%
–
2 parents belges
–
84%
–
Formation
EP
10%
5%
30,9%
ESI
24%
19%
27,3%
ESS
37%
51%
24,7%
A1 ou EU
29%
24%
8,5%
autres
–
–
8,6%
Revenu mensuel net
du ménage
– de 50.000
–
21%5
27%6
50 => 100.000
–
39%
–
+ de 100.000
–
11%
–
On peut ajouter deux données fournies par l’UPEDI :
• par rapport à l’âge, les personnes embauchées pour des postes vacants, par quelque filière que ce soit ont moins de 25 ans dans 40% des cas, de 25 à 44 ansdans 57% des cas, et 45 ans ou plus dans 3% des cas;
• 36% des intérimaires reçoivent une offre de travail fixe pendant leur(s) mission(s). Mais il s’agit de 33% des femmes et de 36% des hommes, de 35% des moins de 25 ans et de 28%des plus de 45 ans.
Ce tableau nous permet de constater que :
• vis-à-vis des femmes, I’intérim est tout aussi discriminant que le marché de l’emploi;
• vis-à-vis des moins qualifiés, il l’est plus;
• vis-à-vis des plus bas revenus, son effet n’a pas l’air significatif.
Au moins sur ces trois critères, au lieu d’être insérant, I’intérim semble être reproducteur ou amplificateur des distorsions et discriminations qui ont classiquementcours sur le marché de l’emploi.
On peut certes, comme le fait l’UPEDI, monter en épingle un rôle social du travail intérimaire dans la mesure où il permet, dans un cadre légal, à deschômeurs, notamment de longue durée, de ne pas perdre le contact avec la sphère de l’activité.
Mais les arguments, même statistiquement étayés et proprement présentés, gagnent à être relativisés. Les remettre dans leur contexte d’unefaçon non fallacieuse doit passer par leur confrontation à la réalité sociologique de la population au chômage, vue dans son ensemble7.
1 UPEDI (fédération patronale des agences d’intérim), av. de l’Héliport 21 bte 3 à 1000 Bruxelles, tél.: 02/203 38 03, fax: 02/203 43 68, e-mail:
info@upedi.be ; site web: http://www.upedi.be
2 Actifs et intérimaires : données de l’UPEDI.
3 CCI DE : données de l’ONEm.
4 Le Centre pour l’égalité des chances nous confirme que ces statistiques n’existent pas. Elles ne peuvent être obtenues que par recensement, sondage ou enquête.
5 29% des sondés ne répondent pas â la question de la Sobemap. L’UPEDI compare ce chiffre aux 18% de ménages belges qui gagnent moins que le « minimum social » calculépar le Centrum voor sociaal beleid (UFSIA, Anvers).
6 Enquête 1992 du Centrum voor sociaal beleid (UFSIA, Anvers).
7 Il ne faut pas perdre de vue que le volume du travail intérimaire et son évolution sont, comme on sait, un indicateur (et un facteur) de la dérégulation du salariat. Letravail intérimaire représente 1,5% du volume total annuel de travail (1997, d’après l’UPEDI). Ce chiffre n’a l’air de rien, mais il représente en moyenne 52.200 personnespar jour sous contrat d’intérim (en venant de 34.816 en 94, et +/- 20.800 en 83.
Archives
« UDEPI : « Le rôle social `naturel’ de l’intérim » reste à prouver »
Alter Échos
18-05-1998
Alter Échos n° 30
Alter Échos
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