Christophe Degryse, journaliste et collaborateur de l’Observatoire social européen, vient de rédiger une nouvelle version, enrichie et actualisée, de son Dictionnairede l’Union européenne1. Cet ouvrage représente une mine d’informations utiles pour mieux comprendre l’Europe… et peut-être aussi pour lachanger.
Que les lecteurs d’Alter Échos nous permettent ce commentaire engagé et enthousiaste ! Le Dictionnaire de l’Union européenne (Éditions DeBoeck), écrit par le journaliste Christophe Degryse, est un trésor d’informations précieuses : pour tous ceux qui veulent saisir l’Europe, ses enjeux, ses politiques,et qui veulent être acteurs et non sujets de sa construction.
D’un côté, l’information qui circule sur l’Europe, grâce à la fée internet, abonde. Mais il s’agit, pour l’essentiel, d’uneinformation partielle, le plus souvent très technique, difficile à déchiffrer. Comment, en effet, comprendre des expressions aussi hermétiques que « laméthode ouverte de coordination », le « benchmarking » ou « la stratégie de Lisbonne » ?
L’objectif de Christophe Degryse ne consiste pas seulement à traduire en mots concrets ces notions complexes. Il est aussi d’aller au fond des choses, en soulignant lescontextes, les enjeux, les fils conducteurs des politiques européennes. Ainsi, cet ouvrage n’est pas un simple dictionnaire. C’est un outil pédagogique, qui permet àtous de s’approprier les politiques européennes et, le cas échéant, d’agir pour les infléchir. En ce sens, le Dictionnaire de l’Unioneuropéenne offre une sorte de manuel de la citoyenneté européenne active.
Plus de mille pages, 630 définitions, 1600 références législatives ou réglementaires : cette publication a demandé deux années de labeur àson auteur. Le Dictionnaire de l’Union européenne n’est pas destiné à un public de spécialistes. Il s’adresse à chacun d’entre nous.« En l’écrivant, nous confie Christophe Degryse, j’ai voulu qu’une personne comme ma grand-mère, femme de coiffeur, puisse comprendre. »
Pour Christophe Degryse, il faut redonner un sens social à l’Europe !
Pour l’auteur du Dictionnaire de l’Union européenne, les informations manquent qui éclairent le sens des politiques européennes. Il est urgent, dit-il, dereplacer le social au centre du jeu. C’est la seule façon de réconcilier le citoyen avec l’Europe d’aujourd’hui. Interview.
– AE : Quand on parle d’Europe, y a-t-il trop ou pas assez d’informations ?
– CD : Ces dernières années, l’Union européenne a consenti de gros efforts pour diffuser plus d’informations. Celui qui veut s’informer surl’Europe peut le faire. Internet fournit une information à profusion. Mais cette information est complètement éclatée. Il est très difficile, avecl’Europe, d’avoir une vision politique d’ensemble. Le plus ardu, c’est de comprendre le sens d’une politique européenne.
– AE : Comment pourrait-on améliorer la qualité des informations transmises sur l’Europe ?
– CD : Les institutions européennes doivent dire ce qu’elles font, en toute transparence. Il est normal que ces institutions présentent leurs politiques. Mais il ne leurincombe pas de fournir une information tout emballée, sinon c’est de la propagande. Les citoyens doivent se forger leur propre opinion. Ce n’est pas à la Commissioneuropéenne, par exemple, de faire un travail d’éducation permanente sur l’Europe. Tout le travail de mise en contexte des informations européennes revient auxjournalistes, aux associations, à la société civile.
– AE : L’Union européenne a fêté récemment en grande pompe le cinquantième anniversaire du Traité de Rome, à l’origine del’Union européenne. Quel regard portez-vous sur ces commémorations ?
– CD : Ces commémorations, d’accord, c’est bien sympathique. Il est logique qu’on fête ces 50 ans. Mais finalement cela ne concerne que les six Étatsqui étaient signataires du Traité de Rome. Aujourd’hui, l’Union européenne compte 27 États. L’Europe, dans son esprit initial, est le projet le plusmagnifique qu’on ait pu concevoir. Mais l’Europe est maintenant en friche et la situation actuelle n’est pas glorieuse. Les élargissements récents n’ont pasété opérés dans une optique de solidarité, comme ce fut le cas avec les précédents élargissements. Le premier but, c’étaitcréer un grand marché économique. Dans l’Europe des débuts, le marché n’était qu’un moyen. À présent, il est devenu une finen soi. Il n’est pas étonnant que les gens ne veuillent pas de ce projet-là.
– AE : Que peut-on faire concrètement pour redynamiser l’Europe, d’ici à 2009, la date des prochaines élections au Parlement européen ?
– CD : Pour que le citoyen se réconcilie avec l’Europe, il doit retrouver de l’intérêt à la construction européenne. Pour cela il faut redonnerune place importante au social. L’Union européenne a perdu sa vision des années 70, où l’objectif proclamé était le bien-être des peuples.J’aimerais entendre dire que le marché n’est qu’un moyen pour conduire à l’amélioration des conditions de vie et de travail des citoyens.
1. Christophe Degryse, Dictionnaire de l’Union européenne, 3e édition, Éd. De Boeck, février 2007, 1088 pages, 75 euros.