A Liège, Seconde peau travaille à domicile pour aider au développement d’enfants négligés. Les familles précarisées sont les principales bénéficiaires de ce service qui conçoit ses propres méthodes et les essaime.
Une seconde peau. Voilà ce que propose à de tout petits enfants l’équipe du service éponyme installé à l’hôpital de La Citadelle de Liège. Un service qui poursuit un but ambitieux : aider au développement d’enfants négligés (de zéro à trois ans) et contribuer à leur intégration sociale ultérieure. Pour ce faire, « Seconde peau » – anciennement connu sous le nom d’Etape – a développé une méthodologie qui lui est propre.
Au commencement, il y eut le docteur Hainaut, pédiatre de la clinique de l’Espérance à Montegnée. Lors de ses consultations, il constata simplement que de nouveaux-nés bien portants allaient de moins en moins bien en grandissant. Pour lui, c’était évident, cette dégradation du développement de l’enfant était due au manque de stimulations proposées par les parents. Le docteur Hainaut suggéra que des psychomotriciens se rendent au domicile familial. Etape était né (Ensemble travaillons autour de la petite enfance).
L’initiative était portée par la clinique de l’espérance, bien sûr, mais aussi par la Maison médicale de Tilleur. L’idée d’Etape était simple : aller stimuler ces enfants et aider les parents à le faire eux-mêmes.
Aider les familles vulnérables
L’intervention des psychomotriciens de Seconde peau se veut « précoce ». Elle peut avoir lieu avant la naissance. Pour Sylvie Roberti, psychologue chez Seconde peau, « l’intervention précoce à domicile permet d’agir directement sur les compétences relationnelles. Cela aide à constituer le lien ». Quant au lien entre les psychomotriciens de Seconde peau et les familles, il se tisse grâce au jeu. Dixit Sylvie Roberti : « Lors d’un temps de jeu, beaucoup de choses se jouent dans la famille. Les parents nous parlent, cela crée du lien avec l’enfant, nous observons. Cela permet d’entrer dans la famille, de proposer un moment de pause. » Le travail mené par Seconde peau se fait en collaboration avec les autres intervenants que côtoie la famille : médecin, travailleur médico-social, crèche…
L’action du service vise prioritairement les familles vulnérables et bien souvent en « grande précarité ». Un choix que justifie Sylvie Roberti : « Tout le monde est un peu perdu avec un enfant à la maison. Dans ces familles vulnérables le bouleversement est encore plus important. » Afin d’identifier les familles qui ont besoin de l’aide de Seconde peau, l’équipe a créé un outil : « Puce à l’oreille ». Cette « puce à l’oreille » est une grille de lecture qui permet d’évaluer la vulnérabilité des familles sur base de six critères : Problèmes de logement, de finance, de santé mentale ou physique, de compétence psychosociale, problèmes de relations entre adultes ou problèmes de réseau social. Si une famille remplit quatre de ces six critères, elle sera suivie par Seconde peau… à condition qu’elle le désire. Car ce sont les familles qui contactent le service et non l’inverse.
Etape fait sa mue
Etape, avec deux autres services – l’Intergroupe liégeois des Maisons médicales et Apalem (Aide et prévention anténatale à l’enfance maltraitée) – ont imaginé Seconde peau pour « créer une structure d’intervention intégrée auprès des familles et de soutien aux intervenants », nous explique Sylvie Roberti. Etape fait donc sa mue, tout en gardant son objectif central de développement de l’enfant.
Désormais, Seconde peau va un cran plus loin. Le service rédige un « Guide méthodologique sur les mises en réseau formatives » et donne des formations sur ce thème. Mais qu’est-ce que la mise en réseau formative ? « C’est tenter d’identifier la logique de fonctionnement entre intervenants, nous répond Sylvie Roberti. Seconde peau, l’ONE, les Maisons médicales, les crèches, le Service d’aide à la jeunesse. Si on ne se coordonne pas, avec nos logiques d’intervention différentes, nous allons envoyer des messages contradictoires aux familles. » Les formations s’organisent autour de cas concrets qui sont analysés et décortiqués par l’équipe de Seconde peau. L’idée est de comprendre comment le réseau s’organise autour de la famille. Une méthodologie qui se diffuse et « qui permet aux intervenants de se parler »… et de se connaître.