Vous êtes de gauche et vous vous rêvez plus intelligent que vos compagnons de droite ? Vous avez de plus un amour inconsidéré pour les études en tous genres, au point d’avoir dévoré celle dédiée aux chances de survie de l’espèce humaine en cas d’attaque zombie ? Une série de recherches parues ces dernières années vous ont alors sûrement rempli de joie au fur et à mesure que vous les épluchiez. Comment en effet ne pas sourire en apprenant que les gens de gauche seraient plus malins que ceux de droite ? Que votre cerveau serait plus sensible aux stimuli positifs ? Qu’en tant qu’athée, vous seriez plus intelligent que les croyants ? Que vos enfants seraient également plus altruistes que ceux élevés dans la religion ? Et qu’enfin, à force d’avoir lu toutes ces briques jusque tard dans la nuit, votre chat sur les genoux, vous aviez gagné quelques point en plus : les couches-tard et les amoureux des chats auraient en effet plus de plomb dans la tête que les couches-tôt dingues de chiens.
Mais voilà, toutes les bonnes choses ont une fin. Il faut dire que vous le sentiez arriver. Voilà quelques temps que vous vous voyiez atteindre le point Godwyn à la vitesse d’une onde gravitationnelle lors de certaines discussions agitées avec un(e) ami(e). À force de traiter tout le monde de nazi dès qu’un argument ne vous plaisait pas, c’est qu’il y avait forcément un problème. Et puis, un jour, au détour d’une énième étude, la vérité est apparue dans toute sa cruauté : d’après une équipe de chercheurs menée par le psychologue Lucian Gideon Conway III – ça ne s’invente pas – de l’Université du Montana, les personnes de gauche seraient tout aussi dogmatiques et simples d’esprit que celles de droite. Il s’agirait juste d’une question de sujets abordés. Ainsi, les gens de droite seraient par exemple plus dogmatiques sur les questions liées à la religion. Et celles de gauche sur les questions liées à l’environnement. Plus fort : vos comparses de droite montreront plus de complexité dans leurs réflexions lorsqu’ils aborderont des sujets comme la peine de mort, la question des réfugiés ou l’immigration. Vous vous montrerez plus complexes lorsqu’on en viendra au sexe avant le mariage, la véracité de la Bible ou l’alcool.
Bien sûr, on pourra toujours arguer qu’il s’agit là d’une étude américaine, peut-être peu en phase avec les lignes de fractures politiques d’application en Europe. L’équipe de chercheurs parle ainsi de « Liberals » et de « Conservatives », ce qui ne correspond pas vraiment – voire pas du tout – au clivage gauche-droite européen. Mais à bien y réfléchir, on aurait tort de dénoncer trop vite les conclusions de ce bel effort. Car il est tout de même porteur d’une bonne nouvelle : en ce qui concerne la mauvaise foi, la naïveté, l’étroitesse d’esprit et la bêtise, nous sommes tous égaux. Et ça, c’est déjà un fameux pas en avant pour l’humanité…