Le désarroi. Quand on ne reconnaît plus celui ou celle avec qui on vit depuis des années. « Mon mari ne sait plus marcher, plus communiquer. Des infirmières passent trois fois par jour mais c’est moi qui lui donne à manger », dit Marie-Claire. Luc, grand, mince presque maigre, donne l’impression d’une grande fragilité : « Ma femme est agressive, elle me jette le téléphone au visage, me fait sans cesse des reproches. J’ai mal à l’estomac. J’ai mal partout. Je suis tout seul. Elle, elle pense qu’elle va bien, que les problèmes viennent de moi. Quand elle est méchante, je me réfugie dans une autre pièce de la maison ». Aux côtés de Luc, Agnès intervient : « Je suis leur voisine et je suis témoin de ce que vit Luc. On va essayer de t’aider ».
« Ma fille n’a que 58 ans et elle est atteinte par l’Alzheimer. Elle est violente, elle frappe tout le monde. Je voudrais qu’elle soit placée mais le psychiatre dit que si on lui donnait les médicaments dont elle a besoin, elle va mourir », raconte Christiane. Autour d’elle, plusieurs opinent de la tête.
« Je n’ose plus rien dire car très vite, le ton monte et je n’interviens plus qu’en cas de danger pour lui. Mon mari met la vaisselle sale dans le four et quand je me limite à lui suggérer de la mettre ailleurs, il se fâche. Il continue à mettre cinq tasses, cinq assiettes sur la table alors que nous vivons à deux. Il a des hallucinations, il parle à des absents. Mais je sais que je ne le placerai jamais même si ce serait plus facile pour moi», explique Chantal.
Désarroi et lucidité aussi. Marie-Claire constate que « la maladie s’installe » et qu’elle n’atteint pas que le cerveau. Son mari ne voit plus, n’entend plus bien. Le mari est présent et intervient : « Je continue à lutter contre ce que j’ai. Parfois je veux aller au poulailler et je me retrouve tout seul dans le bois comme le Petit Chaperon Rouge qui est perdu ».