Dans les Alzheimer cafés, les participants s’échangent des pistes pour aider à vivre avec la maladie. Des petites photos sur les armoires pour rappeler où sont les assiettes, les denrées alimentaires, où est le frigo…. Ils apprennent comment, autant que possible, impliquer la personne malade dans la gestion de sa vie, lui apprendre à se battre tout en acceptant l’inévitable dégradation de ses facultés.
« L’important dans cette maladie, c’est de garder le pouvoir chez soi, voire le reprendre. Voir les choses de manière plus relativisée, estime Sabine Henry. Pour cela, on va développer l’écoute active dans les Alzheimer Cafés, assurer un accueil solidaire et soutenant. Ce qui compte avant tout, c’est la participation active des malades et des aidants. A Tournai, ils ont écrit au bourgmestre pour lui demander que la ville devienne « amie » de la démence. A Mons, il y a une dizaine d’années, ils ont fait la même démarche pour obtenir un centre de jour et, au bout de deux ans, ils l’ont eu ». Cette implication des malades est très importante pour les responsables des « Alzheimer cafés » qui aiment rappeler qu’ils sont là pour eux au départ. A Tournai, Nadine tient un journal de bord pour consigner l’évolution de son état. Elle explique avec un grand sourire : « J’aime passer ici pour papoter en prenant un café. J’ai la maladie mais je vais bien ».
A côtés des « cafés », la Ligue a créé des « groupes de battants » qui rassemblent exclusivement les personnes atteintes d’Alzheimer précoce (à moins de 60 ans). Ce sont des groupes fermés où ne viennent que le malade et la personne aidante. « L’idée est de leur donner la parole autant que possible pour qu’ils restent acteurs de leur vie », explique la présidente de la Ligue francophone. Et de donner l’exemple de ce motard de 58 ans qui participe au « groupe » à Liège. « Il vient avec sa grosse Yamaha depuis Huy, qui est à une trentaine de kilomètres. Il m’explique avec passion le fonctionnement de sa merveilleuse machine mais quand je lui demande par où il est passé pour venir à Liège, il ne sait pas me le dire Mais il trouve la route ! Cela prouve qu’il y a encore des capacités très présentes et utilisables chez les personnes malades».
A côtés des « cafés », la Ligue a créé des « groupes de battants » qui rassemblent exclusivement les personnes atteintes d’Alzheimer précoce (à moins de 60 ans). Ce sont des groupes fermés où ne viennent que le malade et la personne aidante.
Dans les « groupes de battants », on choisit un thème de discussion et on partage le groupe en deux, celui des malades et celui des aidants. Ensuite, on confronte ce qui s’y est exprimé. « On se rend compte alors que le point de vue du malade peut être très différent de celui de l’aidant. Et que l’aidant ne peut pas toujours être le porte-parole de la personne malade. C’est important, pour nous, Ligue quand nous devons répercuter notre position auprès des instances officielles. Il faut écouter le point de vue du patient, même si c’est difficile, car il a des droits comme patient ». L’euthanasie fait partie de ces thèmes où les points de vue divergent. « A Bruxelles, il y a trois ans, une jeune participante nous a dit qu’elle désirait l’euthanasie. On était tous abasourdis mais on l’a accompagnée dans sa démarche et elle a été euthanasiée parce qu’elle était encore, d’après la loi, dans la capacité de le demander ». Pour les couples, c’est très difficile : « Notre motard de Huy veut en finir le plus rapidement possible pour ne pas être à la charge de son épouse. Mais, elle ne veut pas qu’il meure ».
L’Alzheimer impacte fort la relation de couple. Entre ceux qui finissent par craquer et ceux qui tiennent vaille que vaille malgré l’épuisement physique et mental, chacun cherche sa voie. Retour à Tournai. Daniel est accompagné de son épouse malade. « Je suis quelqu’un qui va vite dans la vie. J’ai beaucoup d’activités, je suis très impliqué dans la vie associative dans mon village. Avec Guilaine, cela ne va plus et cette différence de rythme est difficile pour moi. Le danger, c’est que je continue tout seul et qu’elle soit réduite à se contenter de passe-temps. J’essaie de trouver des méthodes qui lui permettent d’agir en autonomie. Mettre des signets, des photos pour indiquer où se trouvent les choses. Ce midi, nous avons fait des chicons au gratin. Elle a pu mettre le jambon autour des chicons. Après, elle m’a demandé qui « a fait les chicons ? » parce qu’elle pense ne plus pouvoir le faire avec moi. Nous avons créé, Guilaine et moi, un jardin potager collectif. Nous essayons de faire ensemble des choses sans que je lui dise ce qu’il faut faire. J’essaie de trouver, au quotidien, des moments de bonheur avec elle ». Juste ça et c’est déjà ça.