À Frameries, c’est le long de la rue Ferrer et au pied de l’ancienne église du Sacré-Cœur, désacralisée pour être transformée en espace de coworking, que se cachent les locaux de la section Borinage et Haut-Pays des Compagnons Dépanneurs. Sa responsable Sylvia Giliberto y a certes son bureau, mais le bâtiment tout en longueur abrite aussi et surtout un café social et un magasin de seconde main, Aux p’tits bonheurs des Compagnons Dépanneurs.
Statuettes à l’effigie du Père Noël, décorations en forme de bonhomme de neige, guirlandes lumineuses, sapins, couronnes et flocons ont déferlé sur la petite boutique. Pas de doute : les fêtes de fin d’année sont à nos portes.
Les Compagnons Dépanneurs, c’est une ASBL au crédo simple et qui repose sur un droit élémentaire : un logement décent pour tous. Elle vient donc en aide aux personnes précarisées en réalisant des petits dépannages et travaux de réparation, de rénovation ou d’entretien dans les habitations de celles et ceux qui n’ont pas les moyens de faire appel à des professionnels de la construction.
Les Compagnons Dépanneurs, c’est une ASBL au crédo simple et qui repose sur un droit élémentaire : un logement décent pour tous.
L’histoire de la section du Borinage débute il y a une petite vingtaine d’années par un hasard, par une rencontre. Au détour d’une banale conversation, Cécile Nyssen, directrice générale de l’association, évoque avec une connaissance la volonté de créer une antenne dans les environs de Mons, tout en déplorant se heurter à un refus clair et net, tant du CPAS que de la Ville. « Cette personne m’a conseillé d’aller frapper à la porte de la commune et du CPAS de Frameries, qui se sont d’emblée montrés très enthousiastes et partants. On s’est dit qu’on allait étendre nos services à d’autres localités de la région du Haut-Pays, c’est-à-dire les communes situées le long de la frontière franco-belge. Des partenariats ont alors été noués avec les CPAS de Colfontaine, Boussu et bien d’autres. Il y en a sept ou huit en tout, à l’heure actuelle. »
À la tête de l’antenne boraine, il y a donc la dynamique Sylvia. Responsable des titres services du CPAS de Frameries pendant 14 ans, elle a été engagée par les Compagnons Dépanneurs il y a quelques années pour relancer la section qui était en soins palliatifs et menaçait de s’éteindre. « Elle connaissait bien le CPAS avec qui nous avions des liens, ainsi que les gens qui le fréquentaient. Ce sont des atouts importants. Pour nous, c’est fondamental que les responsables de section soient ancrés dans leurs territoires. Je ne mettrais pas un Bruxellois comme responsable à Frameries », explique Cécile Nyssen.
Un duo de choc
L’association, dont le siège social est situé à Bruxelles (Saint-Gilles), compte neuf sections actives un peu partout en Wallonie. Chacune a son propre fonctionnement et ses particularités. Ici, c’est un duo de choc, composé de Sylvia et Joseph, qui est à la manœuvre. Les deux compagnons professionnels – comme ils s’appellent l’un l’autre – ont ouvert le café social et le magasin de seconde main en 2021. « L’idée est venue parce qu’on fonctionnait souvent à perte. Comme il ne s’agit pas d’une facturation à l’heure mais bien à la tâche effectuée, Joseph reste dans certains cas toute une journée sur un chantier. Les bénéficiaires ne payent qu’un petit forfait pour le travail effectué. Si ça nous rapporte une vingtaine d’euros par jour, ça ne suffit pas à couvrir nos frais. En plus, il faut compter l’utilisation de nos machines, l’essence, etc. », détaille Sylvia.
Il y a trois ans, les deux seuls salariés de l’ASBL se démènent, avec leurs bénévoles de la première heure, pour ouvrir un magasin et générer des bénéfices indispensables à la survie de l’antenne locale. « J’ai commencé par recevoir des dons d’une autre section de l’association. Petit à petit, on a investi dans quelques armoires pour aménager les lieux et recevoir correctement les gens. À ma demande, Joseph a construit une cabine d’essayage et des fauteuils ont été installés dans l’espace dédié au café social », raconte Sylvia, en pointant le « coin papote » du lieu.
Une banquette matelassée, quelques coussins colorés et des boissons chaudes se trouvent en effet à disposition de celles et ceux qui ont envie d’un peu d’intimité pour se lancer dans de longues discussions ou simplement parler de la pluie et du beau temps. Les confessions se perdent dans le brouhaha ambiant, qui fait office de fond sonore rassurant. En ce jeudi matin, deux bénévoles s’y rencontrent pour se raconter leur quotidien, les mains occupées par des aiguilles à tricoter et les yeux rivés sur leur ouvrage respectif.
C’est précisément cet accueil chaleureux qui fait toute la différence. « Il y a comme un aimant qui nous attire ici. Ce n’est pas qu’un magasin, c’est bien plus que ça », lance, tout sourire, une volontaire. En trois ans, le nombre de visiteurs n’a fait que grimper, certains d’entre-eux se sont même mués en bénévoles fidèles qui, une fois entrés, ne veulent plus en sortir.
Aux p’tits bonheurs des Compagnons Dépanneurs, il n’y a pas d’autre musique d’ambiance que les rires sonores et communicatifs de l’équipe de Sylvia et Joseph. Bonne humeur et plaisanteries emplissent les lieux et les cœurs d’une atmosphère détendue et joyeuse. Dans son métier, c’est ce qui lui plaît le plus à la jeune femme : « J’adore le contact avec les gens. Je suis là pour les écouter, je sens qu’ils en ont besoin. Et ils me le rendent bien. Quand j’ai été licenciée du CPAS, on m’a dit que je faisais preuve de trop d’empathie et de gentillesse, et qu’en tant que cheffe, j’aurais dû être plus sévère. J’étais aussi très réservée, à ce moment-là. Ça, ça a changé : maintenant, j’ai beaucoup moins peur d’aller vers des inconnus et de leur parler. Il n’y a pas qu’aux bénévoles que ça fait du bien de venir ici. »