«Sugar baby love, sugar baby love
I didn’t mean to make you blue
Sugar baby love, sugar baby love
I didn’t mean to hurt you
All lovers make
Make the same mistakes
Yes, they do
Yes, all lovers make
Make the same mistakes
As me and you»
Loin des vociférations de Johnny, la salle compte aussi son lot de romantiques. Au rythme de Sugar Baby Love des Rubettes, Patrick se déhanche comme si la piste n’était qu’à lui. Élégant, avec son costume et un pull à col roulé, il cherche du regard une complicité avec laquelle il pourrait partager sa passion pour la danse, voire plus si affinités. A 55 ans, il cherche quelqu’un à qui parler, me dit-il. «Une fille de mon âge», me glisse-t-il. Avant de retourner sur la piste, il me demande encore si mon journal publie des petites annonces. Il aimerait que je fasse part de sa quête à nos lecteurs…
Patrick est venu avec un groupe de Spa. Loïc et Noëlle, ses éducateurs, viennent pour la deuxième fois à la Groove. «Il y a peu d’endroits qui sont dédiés à des bénéficiaires comme les nôtres, atteints de déficience mentale. Outre l’ambiance, la Groove offre un cadre qui est celui d’une boîte telle que chacun peut fréquenter un jour ou l’autre. En tout cas, ils sont demandeurs. Pour la musique ou prendre un verre. Mais aussi pour faire des rencontres. Certains ont même retrouvé des amis de l’école ou d’autres centres !»
Jonathan est lui aussi de la partie. Il vient pour la première fois à Malmedy. «C’est génial ! J’adore danser.» Il rassure sa petite amie, Loane. Ils restent côte à côte, entre eux, au milieu de la foule, en se tenant l’un contre l’autre. «Tu sais, elle ne supporte pas le bruit, mais elle tenait à m’accompagner, à ce qu’on soit ensemble.»
Trois minutes trente de bonheur
A leurs côtés, d’autres couples se forment comme celui de Carl et Clara. Ils se regardent, silencieux, ils se tiennent la main, en se balançant doucement l’un contre l’autre, et cela leur suffit, même si c’est à contretemps du reste de la foule qui les entoure.
Au bout de quelques chansons, Patrick a trouvé une partenaire. Ils dansent un rock. Patrick me fait un clin d’œil. Il est tout heureux, presque sur un petit nuage. Cela durera trois minutes trente.
Noyé dans la cohue, Ajoy veut jouer au journaliste avec moi. Il fait le tour de la salle pour aller poser quelques questions à d’autres participants. «Pourquoi venez-vous ? Parce que c’est bien ?» Et l’échange se poursuit. «Vous êtes ensemble depuis quand ? Vous êtes amoureux, vous», demande-t-il en direction de Camille et Quentin. «Cela fait longtemps qu’on est ensemble. On s’est connus à l’école. Je l’ai croisé et on est tombé amoureux», raconte Camille.
«Et toi, qu’est-ce que t’aimes bien à part danser ?», lance-t-il en direction d’Axel.
«Les filles !» Tout le monde rigole.
Nicolas, lui, aime bien venir à la Groove, mais pas spécialement pour les rencontres. «Surtout pour boire et manger, parce que pour danser, ce n’est pas ça», dit-il en dégustant son biscuit. «Je ne suis pas doué pour me faire des amis, non plus.» Pourtant, une fois son dessert achevé, Nicolas ira sur la piste pour danser avec des amis, et pas seulement le temps d’une chanson.
«Quand la musique est bonne… Bonne ! Bonne !» Et tout le monde reprend en chœur, la chanson de Jean-Jacques Goldman. Même Nicolas, accompagné pour l’occasion d’une éducatrice.
Christiane, elle, reste assise, buvant sa limonade. «Je viens pour voir des amis, tu sais. J’aimerais bien danser, et si quelqu’un vient m’inviter, ce serait chouette.» Patrick arrive justement dans sa direction…